Après Olivier Bertrand, le multi-entrepreneur du secteur (Hippopotamus, Léon, Au Bureau…), Stéphane Courbit avec Ladurée (racheté à la famille Holder-Paul) ou Paris Society (fondé par Laurent de Gourcuff et repris par Accor) et Benjamin Patou (Moma Group, associé d’Antoine Arnault…), c’est maintenant un financier plus classique, davantage redresseur d’entreprises (Atys, Anovo, NXO, France Champignons…) de lorgner sur la gastronomie tricolore. Il s’était essayé à une certaine époque aussi au groupe Flo.
Walter Butler, énarque de 67 ans, connu pour ses montages financiers sophistiqués, jette son dévolu sur l’une des plus belles tables de notre patrimoine culinaire puisqu’il s’agit du restaurant triple étoilé Michelin, « L’Ambroisie », sis place des Vosges à Paris, non loin du musée Victor Hugo.
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Un établissement prestigieux et connu dans le monde entier, fréquenté par des chefs d’État comme Barack Obama lors de leurs séjours dans la capitale. Son grand ordonnateur, le grand chef Bernard Pacaud a fait un peu l’inverse que ses nombreux prestigieux confrères. Au lieu de multiplier les adresses ou les établissements sous licences comme Cyril Lignac, Alain Ducasse, Thierry Marx ou Guy Savoy, Bernard Pacaud, lui, comme le lyonnais Paul Bocuse, n’a pas quitté son établissement de la place des Vosges depuis 1986. Au point d’en faire une institution, affichant complet en permanence (11 millions d’euros de chiffre d’affaires annuels) avec ses 40 couverts et ses deux services par jour, se vantant d’y être présent au quotidien de 8 heures du matin jusqu’au soir.
Un peu à l’image de Georges Blanc, le grandiose chef gastronomique de la Bresse, qui même s’il a multiplié les ouvertures dans le « village gourmand » de Vonnas, dans l’Ain, cher à sa grand-mère ou aux alentours (Bourgogne et Lyonnais), constituant au passage un véritable empire (26 millions d’euros de chiffre d’affaires avec 370 collaborateurs, 8 restaurants, cinq hôtels, et un vignoble) reste présent chaque jour dans son magnifique trois étoiles bressan.
Une fidélité et une constance qui payent
On se souvient aussi que le groupe Loiseau s’est fait coter sur Euronext mais sans se développer à outrance malgré des ouvertures de tables récemment à Beaune ou Besançon.
À « L’Ambroisie », Walter Butler met la main sur le fonds de commerce et les murs, tout en prenant soin de laisser un tiers du capital aux mains du chef Bernard Pacaud. Une transmission intelligente qui ne préjuge en rien d’un changement ultérieur de stratégie. Walter Butler qui a déjà mis dans son escarcelle Le Paradis Latin (salle de spectacles fondée par Jean-Marie Rivière et transformée en restaurant) ou, depuis 2021, la célèbre marque de pâtisserie de Pierre Hermé. Reprise par Butler Industries en s’adossant au pâtissier alsacien qui en conserve 33% des actions ; la marque culte du macaron français (102 millions d’euros de chiffre d’affaires, pour 62 boutiques) pourrait être développée dans le monde entier sous forme de salons de thé à la française, un peu comme veulent le faire actuellement Ladurée (Courbit), Angelina’s (groupe Bertrand) voire Christophe Michalak dont les pâtisseries viennent d’être relancées avec l’entrepreneur Didier Tabary, ex patron de la marque anti-âge Filorga.
Décidément les grandes manœuvres dans la restauration et la pâtisserie à la Française ne font que commencer. Le paradoxe est que ce secteur reste autant atomisé et dispersé en petits établissements que prisé et réputé de par le monde. Cherchez l’erreur. C’est peut-être précisément toute la stratégie de Walter Butler qui, pour l’instant, s’est borné à ne rien exclure.
Mais la gourmandise, c’est bien connu, n’a pas de prix.
