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Expertise, la grande équivoque

Eugène-François Vidocq

La première partie du XXI ème siècle est marquée, semble-t-il, par le recours quotidien aux méthodes expertales dont la finalité est de rassurer la prise de décision en la pourvoyant d’un éclairage cognitif.

En la fourvoyant pourrait-on plus sûrement risquer, par ce paradoxe gribouillesque qui veut que les héros des farces et patelinades médiévales se précipitent en général dans les pièges qu’ils veulent éviter. En bref, l’expertise le plus souvent obscurcit l’entendement plus qu’il ne le facilite. Les exemples fourmillent des mauvaises, voire catastrophiques conséquences qu’ont engendré les bons conseils politiques de spécialistes de la chose publique préposés à l’assistance de nos princes. Un des derniers en date, et non des moindres, est la disposition nommée « regroupement familial » ayant permis l’immersion sans ménagement de plus de dix millions d’individus en provenance d’Afrique à majorité musulmans dans un vieux pays chrétien en dénatalité.

On comprend la fuite du Royaume-Uni dans cette situation, lui même aux prises avec les effets d’une immigration consécutive à la mise en oeuvre de la décolonisation de son Empire, ainsi qu’à l’indéniable attractivité de son espace économique que n’affecte aucune idéologie humanitariste pénalisante, à l’inverse de l’Europe hallucinée par un rêve hypnotique et logorrhéique.
Oui, on comprend que Boris Johnson ait prit ses jambes à son cou, surtout quand on voit l’exportation ridicule et néfaste de conflits religieux, sans queue ni tête pour un esprit rationnel, dans l’espace européen jadis celui de Goethe et de Descartes. Certains s’en régalent malheureusement, possédés à n’en pas douter par la joie maléfique qui anime le cancre dont le chahut qu’il a déclenché a saccagé la salle de classe.

Mais voilà, ce n’est plus l’enfance et les dégâts ne se comptent pas qu’en morts mais aussi en destructions mentales et je dirais civiques, (pour ne pas employer volontairement les barbarismes que sont les mots « citoyennes » et « civilisationnelles » qui fleurent trop le jargon).En bref, l’expertise a ceci de véritablement « expertal » qu’elle installe l’ignorance et l’impuissance au sommet de la chaîne de commandement, facteur de tâtonnement quand il faudrait agir vite. Ce qui est vrai en politique l’est également au regard du marché et l’on se rendra compte un jour, mais trop tard pour obéir aux lois de la tragédie antique, qu’on a installé l’ignorance aux commandes du monde de l’Art. Léon Daudet parlait d’un de ses contemporains écrivains en le coiffant du sobriquet «  le gnome hilare ». Cette définition me parait aller à merveille à certains qui gesticulent. D’autres sont hélas davantage des gnomes grognons.Tant pis.

Si le recours incessant à l’avis autorisé de Diafoirus propulsés « proprio motu » au rang oraculaire a pu sembler réguler la prise de décision, soulignons que c’est au prix de l’imprécision sémantique et juridique, ce qui est rigoureusement le contraire du but recherché et poursuivi « ac cadaver » énoncé en début d’article: éclairer la décision. Ainsi du marché de l’Art, je l’ai dit, qui en est la deuxième victime après l’ordre public, victimes tous deux aujourd’hui de l’irrésolution et du désordre. La dernière conséquence de cette déréliction est qu’elle renforce la police tout en la désarmant, ce qui donne au juge la part belle pour aller à la pêche. Où es tu,Vidocq?

En réalité, la situation d’aujourd’hui présente beaucoup d’analogies avec la maladie mentale nommée schizophrénie qui est une séparation antagonique de l’être en deux parties qui s’ignorent et poursuivent une route différente, sinon opposée. Le discours est dur mais la politique est molle, quand ce n’est pas le contraire. Pourquoi ? Parce que l’action publique n’est qu’ un pastiche dont la fonction est de faire croire qu’elle existe en réalité quand elle n’est que mimée. Ce qui est vrai pour le monde de l’Art l’est aussi pour la sécurité publique. Le discours est utilisé pour duper celui qui l’écoute afin de masquer le réel dessein poursuivi, qui est de ne rien faire du tout pour éviter les ennuis.

Quant à la surveillance extraordinaire que ce système entraine, elle sert surtout à évaluer le degré de mécontentement de la population, comme la pseudo-lutte contre la contrefaçon des objets d’art ne sert in fine qu’à juguler l’arrivée de l’argent de la fraude fiscale sur le marché, les experts étant réduits à n’être que les collaborateurs stipendiés du fisc ou des douanes plutôt que des sachants appelés à discerner le vrai du faux.

L’existence de politiques parallèles couvrant des buts différents fait en définitive douter de la sincérité comme de la vérité des discours tenus en public. C’est toute la limite du « en même temps ».

Jean-François Marchi


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