Dans un autre registre, l’écrivain Jean-Edern Hallier parlait en 1996 « d’inversion générale des valeurs ! » Même s’il n’avait pas encore connu la périlleuse montée dans les milieux universitaires ou intellectuels du funeste wokisme. J’avais pu l’interviewer quelques mois avant sa disparition dans son appartement de la rue Birague à Paris, près de la place des Vosges. Que dirait aujourd’hui le fondateur de l’Idiot International ? Devant la montée de la « culture de l’effacement » (cancel culture), il n’aurait pas été le dernier à résister. Sachons résister chaque à notre niveau …
Dans le monde de l’art, le président de la Maison des Artistes ne dit pas autre chose aujourd’hui avec un style moins tonitruant que notre écrivain révolté. Et il faut écouter ce que dit Rémy Aron, artiste peintre de 72 ans à la voix feutrée (voir son interview sur EntreprendreTV). Pour lui, on assiste actuellement dans certains établissements de formation à l’art (« à une véritable dénaturation de l’enseignement et à un décervelage de nos étudiants. » « Toute cette rigueur, cette précision, cette exigence qui faisaient la force de l’école artistique française ou de l’enseignement du dessin est en train d’être foulée au pied par des enseignants, qui, sous couvert de progressisme, croient que tout ce qui est nouveau est forcément mieux que ce qui est ancien !»
Et cela se retrouve au plus haut niveau. Aron cite par exemple la dernière exposition Van Gogh au musée d’Orsay : « où on a osé tronquer en hauteur certains tableaux du maître d’Auvers-sur-Oise pour des raisons utilitaires d’éclairage ou de lisibilité. Une négation de l’œuvre car la perspective est fondamentale et à respecter à la lettre. C’est cette perspective qui fait la force du tableau en comparaison d’une photo où tout est plat ! » (Sic)
Autre exemple qui le choque : la façon dont on est en train de nettoyer le fameux chef d’œuvre de Delacroix « La liberté guidant le peuple » (1830) : « on le nettoie au Karcher pour raviver les couleurs, mais désolé, ce n’est pas ce que le peintre a voulu ! »
Un puriste Aron ? Non, seulement un homme respectueux au plus près de l’œuvre des créateurs ! Merci au journaliste, notre ami Gérard Meftah de nous l’avoir présenté en compagnie du sculpteur Mauro Corda.
On devrait franchement l’écouter davantage. Aron représente pas moins de 22 000 artistes professionnels. C’est considérable. Et Rachida Dati gagnerait beaucoup à l’inscrire en tout premier à son agenda de nouveau ministre de la culture !
Bonne nouvelle : Rémy Aron interviendra régulièrement désormais dans le magazine Entreprendre, plus que jamais magazine de tous les créateurs ! On en a besoin !
Robert Lafont
A la fin de la vidéo, le problème crucial de la transmission d’un héritage culturel et de sa valorisation est effleuré.
– L’inquiétude est vive concernant l’emblématique Liberté guidant le peuple de Delacroix !!
Dans le programme en cours de mutations esthétiques fondamentales au prétexte « d’épaisses couches de vernis jaunis englués […] état de présentation jauni […] à améliorer (le tableau ne présentant pas de problèmes structurels majeurs !) ». Débutait un plan d’ensemble dans l’assurance de pouvoir mener la ‘restauration’ de toutes les oeuvres des salles Mollien du Louvre, La Liberté comprise. Dès lors il n’y a pas de mots assez forts et adaptés pour exprimer la sidération : massacre ? pictocide ? karcher ? appropriation fourbe ? etc.
On touche à l’altérité… irrémédiablement, ce au prétexte d’un jaunis mal documenté, mal interprété, etc. Voilà pourquoi, grâce à Rémy Aron, les artistes vivants de la MdA s’insurgent et demandent un moratoire pour une prise de conscience et pour améliorer nos facultés de perception.
– Au fond, il convient de ‘restaurer’ les artistes vivants et non les œuvres des artistes d’antan !…