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France : ne sommes-nous pas devenus les cocus de l’Europe ?

Entreprendre - France : ne sommes-nous pas devenus les cocus de l’Europe ?

La question mérite d’être posée, et pas seulement à la manière polémique d’un Philippe de Villiers ou d’un Éric Zemmour ? Ne sommes-nous pas devenus effectivement à la faveur d’un élargissement sans limite, après avoir été l’un des principaux créateurs de l’Europe des six avec l’Allemagne, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg ( Traité de Rome du 25 mars 1957), l’un des principaux  » dindons de la farce  » de cette construction européenne sans limite, qui n’en finit pas de s’agrandir, de se complexifier et de se technocratiser.

Soyons concrets. En premier lieu, au plan financier, remarquons que nous contribuons davantage au budget commun que ce que nous en recevons Ensuite, au plan des règles, nous sommes le pays membre qui applique avec le plus de zèle l’ensemble des réglementations et des normes édictées par Bruxelles ; demandez à nos agriculteurs ! Cela est sans doute lié à la qualité et à l’excellence de notre administration.

Au plan politique, la France, géant diplomatique, voix écoutée dans le monde, seul membre du Conseil de sécurité de l’ONU, ne pèse pas plus qu’un pays comme le Luxembourg dans un système paralysant, où toutes les décisions doivent être prises à l’unanimité.

Seule puissance militaire disposant de l’arme nucléaire, notre armée sert de fait de bouclier à une Europe qui ,en retour, ne lui apporte aucune contribution financière. Et qui continue de lui laisser faire seule le « sale boulot « comme elle le fait actuellement au Mali pour combatte la montée islamiste. Rajoutons que lorsqu’il faut acquérir des armes ou des avions, la plupart des pays continue de se tourner vers l’option américaine, ne faisant preuve, c’est le moins qu’on puisse dire, d’aucune solidarité d’achat made in Europe, voire made in France. On l’a vu avec la Pologne ou récemment avec la Belgique, pays amis, mais qui, lorsqu’il faut s’équiper, achètent américain plutôt que français alors que nous disposons d’avions compétitifs, les Rafale du groupe Dassault. Un non sens, ou plutôt le signe manifeste que cette Europe ne fonctionne pas comme elle le devrait.

Au plan de l’immigration sans contrôle, n’en parlons pas, l’Europe est ouverte à tous les vents. Schengen reste un vœu pieux et notre pays paye les pots classés, en devenant le principal réceptacle de toute  » la misère du monde « , comme disait Michel Rocard, en accueillant sur son sol en dernier ressort le plus d’étrangers grâce notamment à une politique sociale sans égal et un laxisme intérieur sans nom. En Ile-de-France, les Étrangers en situation irrégulière ont même droit aux transports en commun gratuits. Une disposition ubuesque qu’a souvent dénoncée Valérie Pécresse, la présidente de la Région.

Au plan industriel, faut-il rappeler ici que la Commission par ses lois privilégiant la concurrence, a empêché des alliances industrielles d’envergure qui auraient permis à certains de nos groupes de devenir des géants mondiaux. Faut-il rappeler les refus de l’union Schneider- Legrand, Alstom- Siemens voire Pechiney avec un groupe canadien.

Une véritable myopie de courte vue d’une politique européenne incapable d’envisager les enjeux économiques de long terme .Au plan numérique, c’est pire, nous avons été Incapables d’impulser une politique commune visant à constituer des GAFAS européens, Bruxelles n’a rien fait pour s’opposer à la domination des géants américains d’internet sur le territoire. Les mesures de rétorsion prises aujourd’hui à l’encontre du chinois Huawei ne sont qu’un paravent tardif d’autant plus inutile que la présence de groupes asiatiques auraient pu servir à faire contrepoids.

Que nenni, vive la totale dépendance vis à vis de l’Oncle Sam et de ses merveilleuses machineries numériques. Le JDD annonçait dans une édition récente que, lors des dernières présidentielles de 2017, le candidat Macron avait cru juger bon d’avoir recours à l’Intelligence Artificielle pour mieux pouvoir rédiger son discours de candidature. C’est pour dire jusqu’où on en est rendu…

Et ne parlons pas de ce qui fâche, l’extraterritorialité par exemple, l’arme juridique suprême par excellence, et dont se sont arrogés les États-Unis sans vergogne et sans restriction non plus. La menace plane sur tous ceux qui commercent en dollars, c’est à dire la quasi totalité de nos entreprises. Demandez à ce sujet au patron de BNP-Paribas ce qu’il en retourne, et combien il a du débourser en 2015. Une amende à 8,9 milliards de dollars ! Dans les westerns, on appelle cela une rançon !

On l’a vu récemment en Iran, pays où nos constructeurs automobiles étaient les mieux placés, l’interdiction américaine intempestive leur a fait perdre beaucoup. Peu ou personne n’a réagi. Le pays semble s’être habitué à la dépendance. D’ailleurs, c’est bien connu : ce n’est pas la faute de nos gouvernants, c’est Bruxelles qui dirige !

Alors bien sûr, il reste l’Euro. Oui, un vrai avantage du point de vue des échanges européens. Mais une arme monétaire inopérante dans la guerre économique planétaire dès lors que la BCE ne dispose pas statutairement d’objectifs concernant la croissance, mais uniquement pour la lutte contre l’inflation. L’allié américain peut continuer à dormir tranquille et à faire fonctionner sa planche à billets comme il le désire.

Alors certes, il reste le plan de relance européen. Une belle opération, mais ce n’est pas de chance, nous allons devoir nous Français, rembourser plus que ce que nous allons emprunter, sans doute 20 milliards. Ce n’est pas une mince affaire. Mais avec le quoiqu’il en coûte, pas de problème, le bateau ivre de nos finances publiques peut continuer à voguer. Accessoirement, ce sont nos enfants qui continueront à payer. Après moi, le déluge ! En attendant, c’est la souveraineté du pays qui se dilue un peu plus.

On aurait pu ajouter le scandaleux démantèlement de notre avantage compétitif, celui de l’énergie nucléaire qu’EDF est obligé par Bruxelles de brader pour permettre aux autres opérateurs d’y avoir accès. EDF et Orano ont fait les investissements. Mais tout le monde peut y avoir accès. Elle est belle la stratégie ! Étonnez-vous après qu’EDF soit aujourd’hui en grande difficulté.

Alors bien sûr, nous n’étions pas obligés d’accepter toutes ces reculades ou compromis. Quel malin plaisir ont trouvé nos gouvernants successifs à vouloir privilégier l’intérêt de cette Europe plutôt que de défendre pied à pied les intérêts de notre pays. Il est plus que temps de remettre à plat ce projet européen technocratique en privilégiant des projets en commun pays par pays et en s’exonérant de toute idéologie ou de toute prépondérance technocratique. Où est passé le principe de la subsidiarité à propos ?

Faut-il, pour finir, parler du cas de la langue française ? C’est bien la langue officielle de l’Europe. Pourquoi a-t-elle disparu de 90 % des textes qui sont produits par elle alors que c’était obligatoire ? Peut être va-t’elle revenir à la faveur du Brexit ? Cela ne se fera pas sans l’affirmation d’une forte volonté.

L’Europe est une belle idée et elle ne peut reposer que sur le principe d’une union libre. Les mariages forcés ne durent jamais longtemps quand les partenaires n’ont plus rien à y gagner. D’ailleurs comme le rappelle à juste titre le grand philosophe allemand Peter Sloterdijk dans Le Figaro magazine : « L’Europe est aux yeux de beaucoup une organisation très prosaïque qui tient plus de l’association de consommateurs que du projet politique. »

Ouvrons les yeux !

Robert LAFONT


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