Aux États-Unis, Éric Careel serait depuis longtemps considéré comme une super star des affaires ou de la Tech. En France, ce leader de la French Tech, ingénieur de l’ESPCI ParisTech de 63 ans, originaire d’Amiens, donne parfois des interviews mais seulement à la presse économique qui, à Challenges, Entreprendre ou Capital mais cela ne va guère plus loin.
Et pourtant, entrepreneur récidiviste, véritable touche à tout de génie, il a déposé quelques 60 brevets. N’a-t’il pas été l’un des pionniers dans les années 90 des Box internet avec Inventel ! En 2010, avec Invoxia, il commercialise les premiers traceurs GPS avant d’innover dans l’impression 3D avec Sculpteo, revendu en 2020 à BASF. En 2017, il participe même à l’aventure des vélos en libre -service avec la création de Zoov, Pme depuis fusionnée avec Smoove dans Fifteen devenu leader européen des services de vélo partagés.
Et pourtant, c’est dans la santé connectée qu’Éric Carreel a acquis ses lettres de noblesse avec sa jeune pousse, Withings, pionnière de la montre connectée en 2008, qu’il a fondée avec Frédéric Potter et Cédric Hutchings, cédée puis reprise à Nokia en 2018 . Une entreprise aujourd’hui de 360 salariés qui est en train de devenir dans ses bureaux paysagers d’Issy-les-Moulineaux (92) une véritable fourmilière de la santé connectée made in France. Une pépite apte à rivaliser sans complexe sur certaines gammes avec le géant mondial Apple
Outre la montre, son innovation, la Body Scan offre ainsi et pour 400 euros prix public, une balance connectée permettant un check-up santé complet en moins de 60 secondes. Via un système truffé d’électrodes, la balance connectée de Withings informe en quasi temps réel sur les risques cardiovasculaires via des données sur l’âge vasculaire, la masse grasse, ou la santé nerveuse. Autant de données jugées essentielles pour prévenir des risques de crise cardiaque voire de diabète.
Ces données d’une manière générale qui constituent aussi l’un des fonds de commerce essentiel de la startup tricolore. Collectées depuis 12 ans, via ses différents appareils, Withings a amassé une base de données inestimable sur la santé de chacun de ses clients. Une data pertinente et utile pour mieux suivre la santé de chacun au jour le jour .
Ainsi, le succès de sa montre ScanWatch qui permet, entre autres, de mesurer le taux de saturation d’oxygène dans le sang bien utile pour certaines opérations chirurgicales. Dernière innovation en date, et non la moindre,largement primée au dernier CES de Las Vegas, le U-Scan , véritable laboratoire d’analyse d’urine à domicile qui permet de réaliser,grâce à un lecteur optique embarqué, une authentique analyse chimique. Une technologie commercialisée au prix de 500 € le kit de démarrage très précieuse pour analyser la qualité de son alimentation ou de son hydratation. Des informations primordiales pour certains patients sujets aux calculs rénaux par exemple.
Autant d’atouts qui ont convaincu nombre d’investisseurs dont Idinvest Partners, Bpifrance, Large Venture ou Gilde Healthcare ou le fonds 2050, de participer à la dernière levée de fonds de 53 millions d’euros souscrite en juillet 2020. Du coup avec ses 105 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022, dont 41 % aux Etats-Unis et son million de produits vendus en une année, la pépite française de la santé connectée intègre pour la troisième année consécutive le programme French Tech 120 qui sélectionne les jeunes pousses les plus performantes identifiées par BpiFrance comme susceptibles de devenir un jour des leaders mondiaux. Pas vraiment un mauvais signe pour l’avenir !
Reste aussi à Withings à franchir les obstacles administratifs notamment avec les agréments des régimes de sécurité sociale voire des mutuelles pour obtenir le remboursement de ses produits. C’est aussi une des clés pour réussir dans la durée. Espérons que le ministre de la Santé, Monsieur François Braun, jettera un regard attentionné sur la bonne prise en compte par les administrations des technologies de cette pépite de la French Tech.
On sait par exemple, sur un autre secteur, que l’entrepreneur de Metavisio, Stéphan Français, pourtant dernier fabricant français et européen de Pc avec Thomson Computing (lire son interview dans Entreprendre 369), attend toujours, depuis 10 ans, ses premières commandes de l’Education Nationale !
Amis journalistes : en matière de santé connectée, il n’y a pas qu’Apple. Parlez aussi de Withings… La bataille économique est aussi un match sur l’information et l’image.
Robert Lafont
