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Supprimer l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) ?

Entreprendre - Supprimer l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) ?

Par Jean-Luc BRULARD, agent immobilier.

Tribune. Les députés viennent d’adopter en première lecture, la transformation du fameux ISF, en un nouvel IFI : « Impôt sur la Fortune Immobilière » … Quelle erreur, quelle honte, dans un pays où le manque de logements se fait si crucialement sentir, et depuis si longtemps, particulièrement dans les zones dites « tendues », au détriment grandissant des foyers les plus fragiles et les plus modestes.

Quelle est la part du Logement dans l’Immobilier ? Quel est l’un des biens de première nécessité essentiels sinon le Logement ?

Le Logement, un bien qualifié « d’improductif » ? Quand on manque de tant et tant de solutions locatives, pour ceux qui n’ont pas la chance de pouvoir accéder à la propriété : travailleurs pauvres ou modestes, femmes seules avec enfants, étudiants et jeunes travailleurs, personnes âgées nécessitant une solution adaptée et proche des services, des commerces et des soins.

Avec l’IFI, que l’on peut ainsi surnommer pour une large part IFL « Impôt sur la Fourniture de Logements », on vient stigmatiser – au lieu de soutenir – cet élément essentiel, fondamental, dans une société développée comme la nôtre, au risque d’accroître encore la fracture sociale, la relégatio…

Pour nombre de personnes aisées (et non pas fortunées au sens où on veut nous le faire croire), déjà frileuses à investir pour offrir des solutions locatives, pour des raisons souvent fantasmées, liées à des abus – rares mais marquants – de locataires indélicats et/ou de mauvaise foi, on vient maintenant donner le coup de grâce à l’investissement locatif ( et qu’on ne nous parle pas des investissements de pure défiscalisation, type PINEL), comme étant le symbole de ce qu’il faut bannir et donc sanctionner fiscalement…

On peut, dans les hautes sphères argumenter et débattre sur les statistiques de la production neuve, les besoins non satisfaits annuellement depuis des années : 100.000 ? Plus ? Moins ? Ce que nous constatons, nous, les acteurs de terrain, comme nombre d’associations, c’est la demande toujours plus grande, les situations toujours plus précaires, les loyers et les garanties toujours plus élevés…

Un simple exemple : pour offrir sur le marché locatif un logement ancien de 65 m² en région parisienne loué 20 euros/m², soit 1.300 euros, et qui à l’achat coutera 5.000 euros/m² (plus 5,70% de droits de mutation au bénéfice de l’Etat, soit 18.000 euros au passage), le loyer remboursera les mensualités d’un emprunt de 260.000 euros sur 20 ans : il faut donc disposer d’un capital de 80.000 euros en apport de fonds propres pour rendre l’opération possible. Devait-on donc ainsi détourner l’investisseur de cette solution Logement, pour l’orienter vers les voitures de sport italiennes, les œuvres d’art, les yachts, les lingots d’or ? Je ne comprends pas, nous ne comprenons pas.

Il eût été si simple, et si productif, afin, tout au contraire, d’inciter les plus aisés d’entre nous à contribuer au Logement du plus grand nombre, (et accessoirement pour l’Etat collecter des impôts sur les mutations, les revenus fonciers, CSG et RDS, soutenir les travaux de rénovation, d’entretien, donc l’emploi), de sortir de l’Assiette de l’IFI, les logements loués durablement (baux de 89, nus ou meublés), et si nécessaire – on peut en débattre – avec des loyers maîtrisés.

Et si cela avait pour conséquence, pour les quelques dizaines de grands fortunés dont tout le monde médiatique parle (le maigre bosquet qui cache la forêt des investisseurs lambda), de leur faire développer un patrimoine locatif de plusieurs centaines de Logement, pour loger plusieurs milliers de personnes à loyer maîtrisé, faudrait-il s’en choquer ? Pour ma part, je n’en serai pas envieux : ce qui m’intéresse c’est que chacune et chacun puisse trouver un logement adapté à ses moyens et à sa situation.

« Gouverner, c’est d’abord loger son peuple » déclarait l’Abbé Pierre en 1956 : avec ces mesures toujours erratiques, irréfléchies, non concertées avec les professionnels et autres vrais spécialistes de la question, on n’en prend pas le chemin. Et ce ne sont pas les faibles moyens d’un Etat exsangue, les niches fiscales aussi pléthoriques qu’incompréhensibles, le rythme de la production neuve, qui nous donneront une chance, dans la durée, d’améliorer la situation.

Ce sont aussi les moyens financiers privés, mobilisés par tous les foyers un peu plus aisés que la moyenne, et rassurés par une règlementation et une fiscalité claires et incitatives, qui pourront apporter le levier nécessaire, en complément de l’action publique, pour relever ce défi et, peut-être, gagner ce combat du Logement pour tous …

Est-il trop tard, pour ramener le Législateur, nourri par une technostructure souvent « hors-sol », vers le bon sens et la réalité de terrain ?

Je garde espoir et j’apporte ma contribution au débat.

Jean-Luc BRULARD


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