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Rodolphe Saadé, le patron de CMA CGM, vante les mérites de l’entreprise familiale

Rodolphe Saadé, propriétaire du géant du fret maritime CMA CGM (photo Blondet Eliot/ABACA)

Le Medef a-t-il eu tendance au fil des années à délaisser les entreprises de capitalisme familial au profit des groupes multinationaux ? Même si les frontières sont aujourd’hui plus floues, la question est posée à son président Geoffroy Roux de Bezieux, pourtant redoutable entrepreneur.

Engagé sur de nombreux fronts, Rodolphe Saadé, le prolifique chef d’entreprise propriétaire du géant du fret maritime CMA CGM vient à la rescousse du modèle de l’entreprise familiale. Pour l’armateur marseillais, numéro trois mondial avec 54 milliards de CA, il le rappelle dans une tribune des Échos (8/7/2022) : « L’avantage de l’entreprise familiale est sa gouvernance simple qui permet d’agir vite. Et parce qu’elle s’inscrit dans la durée, elle peut investir sur du long terme. Enfin, elle porte des valeurs humaines fortes, sachant que ses collaborateurs sont sa première ressource… »

Un modèle pourtant malmené en France depuis 40 ans par des politiques successives ds matraquage fiscal incessant malgré de récentes amodiations bienvenues (droits de succession, ISF, impôts de production qui vont baisser de 8 milliards en 2023, …). Lire à ce sujet les tribunes pertinentes de notre chroniqueur, l’avocat Jean- Philippe Delsol, (dans Entreprendre 360). Il fait des propositions importantes pour nous remettre à niveau de nos voisins européens. C’est un sujet qui n’est pas mineur. Où sont passées les Lafarge, Cantalou ou Lacoste ? Des entreprises vendues à l’étranger faute d’intérêt à organiser leurs successions dans l’hexagone.

Sur ce plan, la stratégie menée par la famille Peugeot, via le holding familial Peugeot Frères Industrie (PFI), en reprenant et fédérant un certain nombre de belles PMI industrielles, semble assez exemplaire. PFI qui vient de reprendre le lunettier de sport jurassien Julbo (40 millions d’euros de chiffre d’affaires), est un train de constituer un beau groupe industriel (200 M€ de CA) en fédérant  des PMI (moulins à poivre Peugeot, le spécialiste clermontois des lunch box MonBento, ou Tivoly, belle Pme savoyarde d’outils coupants).

Autant d’affaires indépendantes qui, sans lui, seraient tombées dans l’escarcelle de l’un de leurs concurrents internationaux. Les lunettes Julbo étaient activement convoitées par EssilorLuxottica, Thélios (LVMH) ou Kering.

L’initiative est donc à saluer. Au lieu de placer leur argent dans un fonds de Private Equity, le clan Peugeot, présidé par Christian Peugeot, , en réinvestissant sur de belles PMI françaises en mal de succession, reste fidèle à son ADN d’origine. Chapeau bas.

Me revient a ce propos une discussion avec un industriel allemand, de passage à Paris, il y a une dizaine d’années. Il était estomaqué par la faible proportion d’enfants de dirigeants à vouloir succéder à leurs parents chez nous : «Outre Rhin, c’est l’inverse. la question ne se pose pas. C’est presque systématique. Les enfants prennent la suite… ».

Ne nous y trompons pas, c’est  sur ce modèle de l’entreprise familiale que s’est fondé l’essor et la prospérité de l’économie allemande, suisse ou italienne, . C’est sur ce levier que nous devons nous  appuyer. Il correspond parfaitement à la diversité de nos territoires et de notre tissus économique. Il permet de réconcilier économie et développement social. Il donne à l’entreprise un visage humain et conduit ses dirigeants à s’impliquer au niveau local dans les territoires. Jamais Goodyear ou Continental n’auraient liquidé massivement leurs établissements si ces entreprises avaient eu à leur tête des dirigeants propriétaires ancrés localement dans leurs régions C’est presque d’évidence. Les entreprises familiales sont les dernières à vouloir délocaliser, contrairement aux multinationales.

Même si tout n’est pas parfait, elles vivent d’avantage au diapason de leurs collaborateurs. Osons le dire. Ce que l’on appelait autrefois  » paternalisme » pouvait même avoir du bon. Oui, il n’est pas inintéressant que des dirigeants portent attention aux conditions de vie de leurs collaborateurs. Comme l’ont fait nombreux les industriels textiles ou miniers du Nord par exemple à une certaine époque. C’est du reste dans leurs intérêts.


En France, Yvon Gattaz,(ex-Président du Medef et fondateur du mouvement Ethic de l’excellente Sophie de Menthon) a fondé également en 1995 avec nombre d’ETI une belle association d’entreprises, le METI (Mouvement des Entreprises de Taille Intermédiaire), aujourd’hui présidé par le président de Sisley, Philippe D’Ornano, qui défend à merveille l’essor de ces entreprises. Bruno Le Maire à Bercy ou Olivia Grégoire, nouvelle ministre en charge des PME seraient bien avisés de s’inspirer de leurs travaux.

La chasse aux riches et grandes fortunes a déjà fait suffisamment de dégâts dans notre pays, pour que l’on ne tente pas de faire l’inverse ; favoriser l’éclosion de nouveaux riches, ceux qui créent emplois et pouvoir d’achat.

 » Quand les gros maigrissent, les maigres meurent… » Lao- Tseu

Robert Lafont


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