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Que serait Elon Musk sans les aides de l’État américain ?

Elon Musk (Photo Yichuan Cao/SPUS/ABACAPRESS.COM)

En économie, l’angélisme n’est pas de mise. Les États-Unis, considérés par beaucoup comme la Mecque du libéralisme et du capitalisme triomphant, dissimulent aussi un interventionnisme à tous crins quand il s‘agit de défendre les intérêts américains. On vient de le voir spectaculairement avec l’irruption de l‘IRA (Inflation Reduction Act), nouvelle politique industrielle de dumping telle que l’on n‘en avait pas vue depuis plusieurs décennies. L‘Europe, elle, n’a toujours pas réagi… sauf en paroles.

Ne nous y trompons pas, sans les aides et subventions d‘Etat, du Pentagone ou de l‘Etat, jamais Elon Musk, aussi talentueux et génial soit-Il, n‘aurait pu devenir ce qu’il est devenu : à savoir l‘un des entrepreneurs les plus puissants du monde économique actuel, deuxième fortune mondiale derrière le français Bernard Arnault qui, lui, et contrairement à Musk, a développé LVMH sans aides de l’État.
Pour ses voitures électriques, Tesla a ainsi bénéficié en 2015 de la bagatelle de 4,9 milliards de dollars de subventions publiques.

Pour SpaceX et son aventure spatiale, Elon Musk a bénéficié en 2021 d‘un financement de 885 millions de dollars de la part de la FCC (Fédéral Communications Commission). Ce ne sont que deux exemples. Il y a tant d’autres outre- Atlantique.

Et on pourrait dire pareil pour les entrepreneurs vedettes, à la tête des GAFAM, Jeff Bezos, Bill Gates ou Mark Zuckerberg qui inondent aujourd’hui la planète numérique du monde occidental. Jamais Google n’aurait pu réussir dans la durée avec ses déficits initiaux considérables sans ses appuis étatiques sans nier pour autant la formidable puissance du capitalisme américain qui a su également largement soutenir ce qui est devenu le premier fournisseur d’accès et moteur de recherche internet mondial.

Pour ordre de grandeur, rappelons que Google aura levé en plusieurs décennies plusieurs centaines de millions de dollars. En 1999, 4 ans à peine après leur création, Sergey Brin et Larry Page lèvent par exemple quelques 25 millions de dollars !

La force du capitalisme privé n’empêche pas les formidables coups de pouce de la puissance étatique. Autre exemple de l’interventionnisme étatique aux États-Unis, le Pentagone, ministère de la Défense américaine, aura conclu en 2022 des contrats géants de service Cloud de 9 milliards de dollars avec Google, Amazon ou Microsoft. Dommage qu‘OVH, la pépite française du Cloud créée à Roubaix par Octave Klaba (qui vient de reprendre Qwant) ne soit pas américain. Il n’est pas trop tard pour notre gouvernement et pour l’Europe de le soutenir et à fond !

La leçon à tirer pour notre pays est d’accepter enfin de mettre notre État et ses nombreux tentacules au service et à l‘appui des projets ou entrepreneurs identifiés comme potentiellement capables de devenir des leaders mondiaux. À l’instar de ce que fait avec talent Nicolas Dufourcq à la tête de Bpifrance avec son label French Tech 120.

Imaginer si nos moyens se mettaient ouvertement à les développer et en toute transparence à l’image du projet industriel novateur tel que celui développé à Limoges par Romain Stefanini avec sa jeune pousse technologique AirMems pour lancer avec une levée de fonds de 40 millions d’euros une unité de production de commutateurs électroniques nouvelle génération (voir sur EntreprendreTV).

Dans la santé connectée, on pourrait parler aussi de Withings dont les produits n‘ont rien à envier dans leurs domaines à ceux d‘Apple. Qu’attend la Sécurité Sociale pour enfin les agréer ? Et je ne vous parle bien sûr pas de Metavisio-Thomson computing, présidé par Stephan Français (voir son interview en une d’Entreprendre 369) dont les PC made in France ne sont toujours pas privilégiés par l‘Éducation nationale alors qu’ils n’ont rien à envier à ceux de l’américain Dell.

N’attendons plus car c’est justement cette lenteur dans le soutien public qui met nos entrepreneurs ambitieux en position de plus grands fragilité vis à vis de leurs challengers américains. Rien n‘est perdu pour autant car cela dépend de nous.

Robert Lafont


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2 commentaires sur « Que serait Elon Musk sans les aides de l’État américain ? »

  1. A noter que soutenir un cloud français comme OVH ou autres permettrait d’avoir de nombreuses retombées économiques indirectes pour l’état et les collectivités locales (taxes, impôts etc.) : la facture finale réelle est donc moindre.
    Ne parlons pas non plus de la réglementation RGPD, qui ne peut être garantie qu’avec un acteur européen (cf. communiqué de la cour européenne du 16 juillet 2020 : « La Cour invalide la décision 2016/1250 relative à l’adéquation de la protection assurée par le bouclier de protection des données UE-États-Unis »).
    Pour se conformer au RGPD, l’état français, tous ses services, et toutes les collectivités, ne devrait pas recourir au cloud européen, mais le DOIVENT tout simplement.

    Répondre
  2. @Paul : Oui, entièrement d’accord. Cet arrêt reste peu connu et mériterait plus d’échos médiatiques (un futur article dans Entreprendre sur ce sujet serait très intéressant).

    Il faudrait même solliciter un ou des parlementaires pour inscrire dans la loi cette obligation venant de la cour européenne : dès qu’un système informatique est soumis au RGPD (données personnelles), alors il doit être hébergé sur un cloud européen. Cela permettra de se prémunir face aux potentiels nombreux contentieux à venir au niveau européen (pas de respect du RGPD si cloud de l’autre côté de l’atlantique).

    OVH ou autres hébergeurs devraient normalement tirer parti de cet arrêt de la cour, encore une fois peu répertorié dans les médias, mais fondamental.

    Répondre

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