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Prime de partage de la valeur : décryptage pratique


Par Christine Artus, avocate associée au cabinet K&L Gates, et Natacha Meyer, avocate La loi n°2022-1158 du 16 août 2022 « portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat » instaure de façon pérenne la « prime de partage de la valeur », qui est exonérée de cotisations, impôt...

Entreprendre - Prime de partage de la valeur : décryptage pratique

Par Christine Artus, avocate associée au cabinet K&L Gates, et Natacha Meyer, avocate

La loi n°2022-1158 du 16 août 2022 « portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat » instaure de façon pérenne la « prime de partage de la valeur », qui est exonérée de cotisations, impôt sur le revenu, CSG/CRDS sous certaines conditions.

Cette prime se substitue à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat introduite en 2018 à la suite du mouvement des gilets jaunes , communément appelée « Prime Macron ».

L’occasion est de répondre aux questions pratiques que se posent les entreprises.

1. Les entreprises sont-elles tenues de verser la prime de partage de la valeur aux salariés ?

Les entreprises n’ont pas l’obligation de verser une prime de partage de la valeur aux salariés. Sa mise en place est volontaire tout comme la « Prime Macron ».

Instituée par le Gouvernement afin de soutenir le pouvoir d’achat des Français, la prime de partage de la valeur peut être versée rétroactivement par les entreprises depuis le 1er juillet 2022 et mise en place chaque année.

La prime peut être versée en plusieurs fois au cours de l’année calendaire, et ce, dans la limite d’une fois par trimestre. Elle ne peut pas être versée chaque mois, au risque de se confondre avec un élément de rémunération soumis à impôt et cotisations.

2. À qui la prime de partage de la valeur peut-elle être versée et pour quel montant ?

Sous réserve de respecter le principe d’égalité de traitement, les entreprises peuvent décider de verser une prime de partage de la valeur à tout ou partie du personnel sous contrat de travail (en CDI, CDD, à temps plein ou à temps partiel, etc.).

Dès lors que les entreprises ont fait le choix de verser une prime de partage de la valeur, elles peuvent en fixer librement le montant. D’ailleurs, ce montant pourra être modulé selon les salariés en fonction des critères prévus par la loi, à savoir la rémunération, le niveau de classification, la durée de présence effective pendant l’année écoulée ou la durée du travail prévue au contrat, ou encore l’ancienneté qui figure désormais parmi les nouveaux critères.

Cette prime ne devra pas se substituer à un élément de rémunération existant pour pouvoir bénéficier des exonérations de cotisations, CSG/CRDS et impôt décrites ci-après.

3. Comment les entreprises peuvent-elles mettre en place la prime de partage de la valeur ?

En pratique, les entreprises ont le choix dans les modalités de mise en place de la prime de partage de la valeur :

  • • Elles peuvent décider de conclure un accord au niveau de l’entreprise ou du groupe conformément aux dispositions du Code du travail pour les accords d’intéressement (accord collectif de travail conclu avec le délégué syndical, avec le Comité social et économique, etc.) .

Dans ce cas, les entreprises devront veiller à déposer cet accord sur la plateforme de téléprocédure dédiée du Ministère du Travail nommée « Téléaccords ».

• Les entreprises peuvent également mettre en place cette prime par une décision unilatérale de l’employeur. Il conviendra alors dans cette hypothèse de consulter au préalable le Comité social et économique et d’informer les salariés.

4. Quel bénéfice pour les entreprises de verser la prime de partage de la valeur ?

Outre le fait de pouvoir être un atout de fidélisation des salariés, l’intérêt principal pour les entreprises de faire bénéficier l’ensemble ou une catégorie de salariés d’une prime de partage de la valeur tient à son régime social de faveur. En effet, la prime est exonérée de cotisations sociales dans la limite de 3.000 euros par salarié, et ce peu importe le niveau de rémunération des salariés.

Toutefois, le plafond d’exonération s’élève à 6.000 euros notamment pour les entreprises :

• d’au moins 50 salariés qui ont conclu un accord d’intéressement (outre un accord de participation également requis) ;

• de moins de 50 salariés ayant volontairement mis en place un accord d’intéressement ou de participation.

5. Quelles sont les spécificités à retenir au niveau fiscal et de la CSG/CRDS ?

La prime de partage de la valeur présente également l’avantage d’être exonérée temporairement d’impôt et de CSG/CRDS dès lors qu’elle a été versée entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés ayant perçu, au cours de l’année précédant son versement, une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du SMIC (60.442,20 euros en 2022).

À compter du 1er janvier 2024, les primes de partage de la valeur qui seraient versées aux salariés seront soumises intégralement à l’impôt sur le revenu et à la CSG/CRDS.

En cas de versement d’une prime de partage de la valeur et de la Prime Macron au titre de l’année 2022, le montant total exonéré d’impôt sur le revenu ne peut excéder 6.000 euros. Cette limite ne s’applique pas aux exonérations de cotisations sociales.

Enfin, des règles spécifiques ont été également prévues en matière de forfait social (taux de 20%) pour les entreprises ayant au moins 250 salariés.

***

Cette prime de partage de la valeur a l’atout essentiel de permettre aux entreprises de choisir librement d’augmenter le pouvoir d’achat de leurs salariés ou d’une catégorie de salariés ayant les revenus les plus modestes tout en bénéficiant d’exonérations.

Par Christine Artus, avocate associée au cabinet K&L Gates, et Natacha Meyer, avocate


[1] Loi n°2018-1213 du 24 décembre 2018 « portant mesures d’urgence économiques et sociales »

[2] Article L. 3312-5 du Code du travail

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