Pourquoi l’Éducation nationale ne commande-t-elle pas des uniformes scolaires au Slip Français ?
Devenu symbole du made in France et de la reconquête industrielle dans notre pays, la jeune société de Guillaume Gibault, fondée en 2011, n’a toujours pas reçu à ce jour de commandes fermes. Alors qu’elle s’est associée à la marque 1083, ses uniformes scolaires fabriqués en France attendent toujours preneur.
Même le maire souverainiste et patriote de Béziers, Robert Ménard, n’a rien trouvé de mieux que de valider l’achat de tenues moins chères auprès d’un groupe étranger. Il faut savoir ce que l’on veut. Pour réindustrialiser rapidement notre pays, tous les acteurs doivent être mobilisés, publics ou privés, et sans exception. Laurent Wauquiez, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a pris soin de son côté de s’assurer que la confection était bien 100% tricolore. Et c’est bien!
Au moment où on apprend que Renault choisit un groupe coréen pour ses nouvelles batteries au lieu de conforter le pôle ElectryCity du Losange en cours de construction à Douai dans les Hauts-de-France, que Stellantis va privilégier le recrutement d’ingénieurs moins coûteux exerçant au Brésil, en Inde ou au Maroc, que Sanofi fait la même chose avec ses chercheurs et a fermé en 2022 son site R & D de Chilly-Mazarin (91) de 1600 personnes, et qu’au plan financier, le géant français de l’énergie, poids lourd du Cac40, TotalEnergies fait étudier une cotation à Wall Street, on se dit qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond malgré tous les beaux discours sur la reconquête industrielle!
À force de taper sur nos capitalistes et nos chefs d’entreprises patrimoniaux, on a favorisé l’émergence d’une économie dominée par les fonds anglo-saxons. Tous nos grands groupes du Cac40 ont aujourd’hui en majorité ce type d’actionnaires prédominants. Il n’est donc guère étonnant qu’ils ne se préoccupent guère, et c’est logique, dans leur prise de décision ou d’investissement de l’intérêt national. Ce qui n’est pas le cas des entrepreneurs familiaux enracinés dans les territoires. Ce sont ceux-là qu’il faut aujourd’hui encourager en priorité.
Le président Macron, qui court à juste titre après les investissements internationaux avec notamment son brillant rendez-vous annuel, intitulé en bon Français : Choose France (le 23 mai 2024 au Château de Versailles), serait bien inspiré d’organiser aussi une grande messe ouverte aux investisseurs et intitulée : « Entrepreneurs France ». Chiche. Certes, l’Élysée aura beau jeu de nous répondre et d’évoquer Viva Tech qui se tient à Paris du 22 au 25 mai! Un magnifique rendez-vous, initié par Maurice Lévy et organisé par Les Échos, devenu le rendez-vous incontournable de la Tech européenne, sauf qu’il n’y a pas que la Tech dans l’économie. Il y a aussi des menuiseries, des imprimeries, des ateliers de mécanique, des chocolateries ou des producteurs de compote.
Le Slip Français (20 millions d’euros de chiffre d’affaires), de son côté, aura investi cette année sur de grosses commandes pour faire baisser ses coûts de revient. C’est un magnifique symbole du renouveau textile avec d’autres comme Armor-Lux, l’atelier Lemahieu, Saint James, ou le dernier venu Le Pull Français. Et pourtant, il n’a toujours pas reçu la moindre commande publique à ce jour. Un peu le même syndrome dans l’informatique que celui de notre ami Stephan Français, le brillant patron de Thomson Computing (Metavisio), (qui fait la une du magazine Entreprendre avec son associé Teddy Riner et deux gros contrats signés avec l’Inde et la Chine). Le dernier fabricant de PC européen et français demeure, à part une commande de la région Île-de-France et Valérie Pécresse, toujours en demande de fortes commandes publiques. C’est toujours utile au début dans l’industrie. Demandez à Elon Musk aux États-Unis. Sans commandes du Pentagone, SpaceX n’existerait pas. Comme Google…
Robert Lafont
