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« En France, la pression fiscale est à son paroxysme »

Agnès Verdier-Molinié

Impôts abusifs, gabégie de l’Etat, endettement insoutenable… Elle dit tout haut ce que les hommes politiques savent tout bas. Rencontre avec Agnès Verdier-Molinié, directrice de la fondation iFRAP, un groupe de réflexion de tendance libérale chargé d’examiner les administrations et les politiques publiques.

Cette réforme des retraites est-elle si importante du point de vue de l’équilibre de notre système ? Ou est-elle, comme le dit Alain Minc, un signal nécessaire envoyé aux marchés financiers ?

Agnès Verdier : Le signal réforme des retraites n’était que le premier signal à envoyer. Les agences de notations auraient dégradé la France sans la réforme des retraites. C’est une certitude. Maintenant, il n’est pas certain qu’elles ne le fassent pas quand même. Il faut montrer patte blanche. Nous rentrons maintenant dans une séquence « revue de dépenses » qui est absolument essentielle. C’est la fin de l’argent magique et le réveil pour le meilleur ou pour le pire. Espérons pour le meilleur ! Mais, oui, le gouvernement aurait dû jouer la transparence et dire que la vraie raison de la réforme des retraites, c’est l’urgence face à la dette pour éviter la dégradation de la note de la France par les agences de notation. D’éviter un emballement des taux.

D’éviter une explosion du coût annuel de la dette et de montrer à ceux qui nous prêtent que notre pays est capable de réformer et d’assainir ses finances publiques. La réforme des retraites est la première pierre pour rassurer les investisseurs qui nous prêtent. Le besoin de financement annuel de la France, sur la totalité des administrations publiques, est de plus de 300 milliards d’euros encore cette année. Le taux à 10 ans dépasse déjà les 3 %. Si nous voulons pouvoir continuer à emprunter tout en ayant un coût annuel de la dette qui soit soutenable, nous devons prouver notre capacité à réformer et à réduire le déficit public. Sinon, nous risquons un scénario à la grecque. Les risques financiers qui pèsent sur la France sont énormes. Et la France est le seul pays de la zone euro où le pourcentage de dette publique par rapport au PIB a augmenté au troisième trimestre 2022.

Nos compatriotes sont-ils conscients de l’endettement public ?

A.V. : Je pense que nos compatriotes ont tout à fait conscience que le niveau d’endettement de la France a pris un virage dangereux avec la période Covid. Après, ils ne sont pas forcément conscients du fait que notre dette publique augmente de 344 millions… par jour. D’ici le 25 mai, la dette de la France aura dépassé les 3000 milliards d’euros et ce sera 3 200 milliards d’euros en 2024. La dette devient un problème car le coût annuel de la dette est en train d’exploser. La France emprunte la plupart sur dix ans et paie seulement les intérêts pendant la période comme pour un crédit in fine. Ensuite, d’année en année, nous roulons la dette. Les emprunts qui arrivent à échéance sont remboursés grâce à de nouvelles dettes.

Ce qui fait que la dette augmente toujours. Le coût annuel de la dette était autour d’une trentaine de milliards d’euros quand les taux étaient négatifs. En 2022, la facture était de 53,2 milliards d’euros. En 2023, on sera dans les 60 milliards, 70 en 2024 et ainsi de suite. Selon nos projections, on pourrait arriver plus vite que prévu à 100 milliards d’euros par an… À partir de 70 milliards par an, le coût de la dette devient le premier budget de l’État et tous les feux doivent passer au rouge. On ne pourra pas financer sans de vraies baisses de dépenses.

Comment arriver à faire baisser les impôts ?

A.V. : En France, la pression fiscale est à son paroxysme. 45,3 % du PIB en 2022 selon l’Insee. Nous sommes même redevenus numéro 1 européen en la matière d’après la commission européenne en repassant devant le Danemark. Selon ces prévisions, l’écart risque même de se creuser encore davantage en 2023 et 2024. Si nous sommes arrivés là, c’est qu’en France, institutionnellement, personne ne nous protège de la folie fiscale. Cela devrait être leur rôle, mais ni le Conseil constitutionnel, ni la direction de la législation fiscale à Bercy, ni le conseil des prélèvements obligatoires ne tirent jamais la sonnette d’alarme sur l’overdose fiscale, personne n’est là pour définir des limites ou pour chiffrer le niveau acceptable de l’impôt sur le capital, le travail, les ménages, les entreprises…

Bref, la fiscalité française semble pouvoir monter jusqu’au ciel, les ménages et les entreprises ployer sous la charge, sans que l’on ne parle jamais de confiscation. Seuls ceux qui paient l’IFI ont droit à un bouclier fiscal constitutionnel à 75 % (et encore, sans compter les impôts locaux). Et pourquoi pas les autres ? La première étape pour baisser les impôts (ou au moins éviter qu’ils ne continuent à augmenter) serait d’adopter comme au Danemark un bouclier fiscal grâce auquel le cumul du taux marginal d’imposition global est plafonné à 59 % et où ce plafond est réévalué tous les ans.

De combien nos entreprises payent-elles en plus par rapport à leurs homologues européennes ?

A.V. : Nos entreprises sont toujours surtaxées. Malgré les efforts qui ont été fit ces dernières années. Nos entreprises paient 13,2 % par rapport au PIB de prélèvement obligatoires quand la moyenne de la Zone euro hors France est de 7,3 % !En milliards l’écart est encore de 148 milliards et cet écart était de 149 milliards en 2017. Autrement dit, on fait du sur place. Pour renouer avec la compétitivité pour nos entreprises, réindustrialiser et réduire notre déficit commercial abyssal sur les biens, il est urgent de réduire cet écart !

Les Français sont-ils bien informés au plan économique ?

A.V. : Tout dépend de ce que l’on entend par information économique. Si l’on parle des flux de données sur les impôts, les finances publiques, la qualité des services publics, clairement non. Plus les années passent et plus il est difficile d’obtenir des documents de base comme les coptes de la nouvelle ENA (INSP) et les rapports sociaux des collectivités. Nous avons à la Fondation iFRAP fait la demande à 70 grandes villes en août 2022 et nous avons en avril 2023… seulement 30 réponses ! Et ce alors que la loi de 2019 stipule bien que la publication de ces rapports est obligatoire.

Quant à l’efficience, à savoir si l’argent est bien dépensé, là, c’est l’omerta complète. La raison est simple, il n’y a aucune volonté de la part de nos administrations et de la puissance publique en général de constituer des indicateurs analytiques pertinents pour évaluer les politiques publiques. Et notamment au Parlement où l’on ne dispose toujours pas d’un organisme de chiffrage dédié, ou au niveau local où l’on est encore à vouloir que les collectivités présentent des comptes consolidés, rassemblent leurs budgets généraux et annexes… des exigences qui existent pour les états financiers des entreprises depuis la loi du 3 janvier 1985 !

La cour des comptes fait, certes, des rapports comme je le dit dans un des chapitres de mon livre Où va notre argent mais elle ne dit jamais où et combien économiser, elle ne compare pas les collectivités ou les l’écoles ou les hôpitaux entre eux alors qu’il y a des écarts de coût et de qualité de services publics énormes. Elle ne joue pas le rôle par exemple du NAO son homologue britannique qui chiffre toutes les économies réalisées grâce à ses rapports et travaille vraiment au service du Parlement.

Bref, tout est en contravention avec l’article 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui stipule que « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi… »

Les médias doivent-ils éclairer les réformes difficiles au lieu d’attiser les divisions ?

A.V. : Les médias font avec le peu qu’ils ont… c’est-à-dire pas grand-chose au niveau du chiffrage des réformes. Ou alors les scénarios tronqués du COR calculés avec 4,5 % de chômage… Pour mémoire, l’étude d’impact fournie avec la loi sur la réforme des retraites était très succincte… Le gouvernement souhaitant assurer la pédagogie de la réforme tout en donnant paradoxalement le moins de chiffres possible. Aucune boite à outil n’a été livrée avec la réforme sur le modèle d’une calculatrice afin de permettre aux citoyens de s’approprier la réforme : et si l’on décale moins l’âge, et si la solidarité du système baisse ou augmente ? Et si les régimes spéciaux étaient supprimés ? Etrangement aucun média ne s’est offusqué du fait que la clause du grand-père ne soit pas appliquée pour les fonctionnaires de l’Etat, des collectivités et des hôpitaux. Ils ont pourtant un mode de calcul de leur pensions beaucoup plus avantageux que dans le privé et cela va subsister !

Pourquoi les entrepreneurs sont-ils à ce point absents des grands débats ?

A.V. : Sans doute parce qu’ils pensent qu’ils ont plus à y perdre qu’à y gagner. Qu’ils craignent pour la côte de leur entreprise. Ou de leur réputation au sein de l’Etat… En off, ils expriment toutes leurs inquiétudes sur les impôts, l’inflation, les prix de l’énergie, les défaillances d’entreprises qui augmentent. Mais rares sont ceux de nos entrepreneurs qui vont dans les médias pour appeler un chat un chat. Ils ont peur Beaucoup d’entre eux ont vu de leurs yeux partir une grand partir de l’activité française à bas bruit via le développement très important des sociétés françaises à l’international. Réjouissant sur l’aspect du rayonnement da la France à l’étranger, moins réjouissant quand on fait le compte des 2 millions d’emplois qui ont disparu en France dans l’industrie depuis les années 1980.

Les entrepreneurs n’ont malheureusement pas assez alerté ces dernières décennies sur la désindustrialisation de la France et n’ont passez pointé que le coût du modèle social français par le fait des allégements sur les bas salaires faisait peser de plus en plus de charges sur les emplois qualifiés notamment dans l’industrie et, résultat, nous nous retrouvons avec par rapport à l’Allemagne plus de 500 000 emplois manquants dans les hauts salaires de l’industrie et de la construction. Un modèle social de luxe financé par une France smicardisée, cela ne tient pas.

Quelles sont les premières pistes pour faire des économies ?

A. V. : Après le dossier retraites, deux dossiers doivent d’imposer : celui de la masse salariale publique qui est plus chère d’environ une quarantaine de milliards par an par rapport à nos partenaires européens et qui a dépassé les 300 milliards d’euros par an. Quand nous comparons la réparations des agents publics dans les départements de France, nous nous rendons compte qu’il a un effectif surnuméraire par rapport aux départements bien gérés de plus de 500 000 agents. En réalité, c’est quasi exactement l’écart que l’on retrouve avec les pays comparables.

Seconde piste d’économie : le contrôle des aides sociales et une véritable instauration du devoir de travailler quand on le peut. Les pays du Nord de l’Europe sanctionnent durement les allocataires du chômage ou de minima sociaux qui refusent des emplois en leur baissant voire, en supprimant les indemnités en question. Pourquoi est-ce que cela ne fonctionne pas en France ? En en parle depuis 2008 avec l’ORE, l’offre raisonnable d’emploi et les sanctions, uniquement de suspension pour quelques semaines pour l’assurance chômage ne sont appliquées qu’à environ 200 personnes par an ! Où sont les sanctions pour les allocataires de RSA qui sont 60 % à ne pas être inscrits à Pôle emploi ? Il n’y en a pas. Idem pour ceux qui touchent des aides sociales en vivant à l’étranger ou ceux qui touchent le minimum vieillesse sans avoir jamais résidé en France grâce à des domiciliations fausses… Comme je l’explique dans un des chapitres du livre, la fraude sociale n’est pas du tout assez contrôlée. Comme si’il y avait une forme de complaisance. C’est pourtant 20 milliards par an de fraude par an aux prestations et aux cotisations.

Le RSA étant le plus fraudé. Autre volet : celui de l’éducation. L’Education nationale est ultra mal gérée. Et les résultats des élèves du public sont catastrophiques ! Les élèves du privé ont de meilleurs résultats alors que la dépense totale pour eux est 30 % moins chère car les personnels techniques sont pléthoriques dans le public et les retraites beaucoup plus chères pour les enseignants statutaires (10 milliards de plus par an). Là encore, des milliards d’économies seraient possibles tous les ans.

Quelles sont les priorités pour engager le redressement du pays ?

A.V. : Je propose dans mon livre Où va notre argent ? d’appliquer en France 20 principes qui marchent ailleurs dans les grandes démocraties et garantissent aux citoyens de leurs pays qu’il n’y ait pas de surtaxation, pas de dépenses publiques sans contrôle et une qualité meilleure des services publics. Il est plus que temps que la France s’en inspire car la façade de notre village Potemkine se fissure de plus en plus.

Faut-il supprimer l’IFI ?

A.V. : Pour rappel, on sait que l’ISF a fait perdre à la France, de 1982 à 2017, 143 milliards d’euros expatriés, 45 milliards d’euros de perte de capitaux et environ 400 000 emplois directs non créés. À l’époque, la collecte annuelle de l’ISF tournait autour de 5 milliards d’euros contre seulement 2 milliards pour l’IFI mais c’est plus le message, celui d’une fiscalité agressive sur les riches, qui impacte négativement notre pays.

Si un certain nombre de mesures de baisse de taxation ont été entreprises pendant le premier mandat d’Emmanuel Macron, nous restons parmi les plus taxés sur le capital. Cela n’a pas baissé depuis 2017, nous sommes toujours à 10,7 % du PIB, 2,5 points au-dessus de la moyenne de la Zone euro. Nous sommes toujours parmi le plus taxés sur le capital donc oui il faudrait supprimer l’IFI tout en garantissant constitutionnellement un bouclier fiscal. Cela pourrait faire revenir certains de nos compatriotes qui sont partis en Suisse ou ailleurs. Cela rapporterait sans doute même plus aux caisses publiques.

Vous parlez d’Inquisition immobilière ?

A.V. : En 2022, dans les deux cents plus grandes villes de France, la hausse de l’impôt local des propriétaires a gonflé en moyenne de 4,7 % et il est attendu que cette tendance s’aggrave en 2023. On se retrouve donc dans une situation où, d’un côté, on dit aux propriétaires qu’il ne faut pas augmenter les loyers pour ne pas pénaliser leurs locataires mais, de l’autre, on les matraque fiscalement. Un matraquage doublé d’un un profilage qui se précise puisque, depuis le 1er janvier 2023, tous les propriétaires d’un bien d’habitation doivent se déclarer avant le 30 juin et donner les noms de ceux qui louent ou utilisent leurs biens sous peine de devoir payer une amende de 150 euros, par bien, pour inexactitude. Si on n’appelle pas cela de l’inquisition foncière je ne sais pas comment cela s’appelle ?

Ajoutons aussi que les propriétaires de résidences secondaires seront les seuls à continuer à payer la taxe d’habitation. Comme si posséder une résidence secondaire était un signe de richesse alors que seulement 34 % de leurs propriétaires sont des ménages aisés selon l’INSEE.

Comment faire revenir nos grandes fortunes exilées ?

A. V. : Outre la suppression de l’IFI que nous venons d’évoquer… En allégeant les prélèvements sociaux pesant sur le capital qui sont aujourd’hui le dernier résidu du mantra consistant à « taxer les revenus du capital comme ceux du travail ». En mettant à zéro comme en Allemagne les droits de succession sur les transmissions d’entreprises. En baissant le coût des droits de succession en ligne indirecte et en autorisant la transmission des démembrements de propriété en franchise de droits sans limitation de degré.

D’autres pays, pourtant réputés pour leur modèle social, ont été encore plus radicaux comme la Suède qui a supprimé tous droits de succession depuis 2005. Para ailleurs il ne faut pas faire revenir que les grandes fortunes mais aussi les hauts salaires. Nous publions bientôt une nouvelle étude de la Fondation iFRAP sur le sujet montrant à quel point les hauts salaires supportent plus de charges en France qu’en Allemagne et l’impact négatif sur notre économie et notamment notre industrie.

Pourquoi les hommes politiques n’osent-ils pas dire ce que vous dites ?

A.V. : Parce qu’ils pensent à tort que dire la vérité sur les comptes publics, la gestion des services publics ou la qualité de nos services publics n’est pas vendeur. Ils ont aussi une grande crainte à Bercy des prophéties autoréalisatrices du type : ne parlez pas d’inflation cela va faire monter les prix ou ne dites pas que les taux vont monter sur la dette cela va les faire monter ou ne parlez pas d’une possible attaque des marchés sur la France…

C’est ce qui a fait que l’on n’a pas eu tous les sous-jacents de la réforme des retraites exposés aux Français. De mon point de vue, c’est un tort car planquer les données sous le tapis ne résout pas les problèmes, au contraire ! Le gouvernement se réveille maintenant et annonce le désendettement de la France. Espérons que ce ne soit pas que des mots.

Faut-il supprimer les subventions aux syndicats et les libérer ?

A.V. : Il faudrait commencer par faire la transparence sur les subventions et les avantages dont bénéficient les syndicats, à commencer par leur imposer de publier des comptes consolidés. Ensuite, il est essentiel de mettre fin au monopole syndical de désignation des candidats qui veut que seuls les syndicats « représentatifs » ayant obtenu 10 % aux dernières élections puissent présenter des candidats au premier tour des élections professionnelles.

Cela entretient une forme de chasse gardée, cela empêche le renouvellement des profils ou encore le développement d’un syndicalisme alternatif. Les salariés devraient être libre de choisir leurs représentants. L’autre point urgent, c’est l’encadrement du droit de grève pour garantir la continuité du service public à 100 % pendant les heures de pointe et les départs en vacances comme en Italie.

Comment mieux gérer la fonction publique ? Et diminuer ses effectifs ?

A.V. : Il nous faut tout d’abord faire le tri dans les compétences : aujourd’hui tout le monde s’occupe de tout et les doublons sont légion entre l’Etat, les collectivités et la Sécurité sociale. Dans les collectivités par exemple, les compétences partagées conduisent à une multiplication des effectifs. La décentralisation a également conduit à un doublonnage des effectifs entre l’Etat et les collectivités. En clair l’Etat a décentralisé mais a continué à s’occuper de toutes les politiques publiques. L’autre voie pour y parvenir c’est de libérer le potentiel dans l’enseignement et dans la santé en favorisant un mode de fonctionnement proche de celui du secteur privé.

Comment faire la décentralisation ?

A.V. : Les Français expriment massivement le souhait de voir les collectivités assumer plus de responsabilité, en particulier la commune et la région. Les élus locaux aussi mais, quand on leur demande s’ils sont prêts à assumer la gestion de l’éducation ou de la santé au niveau local, tout de suite, cela devient plus compliqué ! Il manque entre tous les élus, locaux et nationaux et les responsables d’administrations, centrales et locales un accord sur la répartition optimale des missions publiques.

Nous avons montré dans une étude que si nous nous mettions dans la norme de nos voisins européens, les collectivités locales dépenseraient 100 milliards de moins mais nous économiserions sur les coût de production de nos services publics 38 milliards d’euros par an ! Ces n’est pas rien. Cela s’explique car, avec l’empilement des doublons et l’enchevêtrement des compétences, la France a un coût de production des services publics qui est beaucoup plus élevé qu’ailleurs en Europe : 27 % du PIB en 2021 quand la moyenne des pays européens est de 25 %. Un écart qui représente un surcoût de 70 milliards par an.

Pourquoi n’applique-t-on pas les recommandations de la Cour des Comptes ?

A.V. : Les rapports de la Cour des comptes s’enchaînent, ils sont souvent passionnants, mais ils portent sur des points précis, comme la fiscalité directe locale ou l’endettement hospitalier… Qu’a fait la Cour des comptes, durant la crise sanitaire, pour alerter sur les dangers du « quoi qu’il en coûte » et mettre en garde le gouvernement contre les risques de l’inflation à venir ? Très occasionnellement, des exceptions existent heureusement comme le rapport qu’elle a produit à l’issue de la crise sanitaire expliquant que la France allait devoir faire 9 milliards d’euros d’économies par an.

Hélas, la Cour n’a pas précisé sur quelles politiques publiques devaient porter ces économies. Dommage car les magistrats de la Cour connaissent très bien les surcouts de l’école publique par rapport à l’école privée ou des hôpitaux par rapport aux cliniques ou des retraites publiques par rapport aux retraites privées…

Comme je le dis dans mon chapitre sur ce sujet, l’homologue britannique de la Cour, le NAO chiffre et dit comment réaliser les économies. D’ailleurs, outre-Manche, le Parlement suit, grâce au NAO, l’utilisation de chaque denier public… ce qui est malheureusement loin d’être le cas en France alors que l’article 14 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 est très claire sur le sujet : « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi… »

Propos recueillis par Robert Lafont


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