Émile Garçon, un créateur qui ne veut ressembler à personne !

Il a beau être le fils d’une créatrice de mode originale et sans pareil dans le milieu parisien, Émile Garçon mène son chemin et vibre au gré de ses envies. « Parce qu’il y a plusieurs vies dans une vie », celui qui, après l’École Bleue, se destinait au design ou à l’architecture, aboutit aussi à la mode masculine. Génial touche-à-tout, Émile s’est trouvé en Tunisie durant le confinement Covid, à Sidi Bou Said. Il y a pire dans la vie.

C’est là qu’il eut le déclic de créer ses propres modèles, conçus à partir de pièces rares de soies naturelles chinées dans les friperies. « La fripe tunisienne est une des plus qualitatives au monde. C’est ici que j’ai pu mettre la main sur quantité de pièces rares venues de belles maisons de couture italiennes, françaises ou américaines… » Des collections uniques, transformées, numérotées, bien dans la tendance du recyclage, ou upcycling.

Hasard ou nécessité, difficile à dire avec cet esprit en perpétuel mouvement qui s’intéresse à tout et que surtout tout intéresse. Celui qui est ami avec le journaliste écrivain producteur Georges-Marc Benamou ne s’enflamme pour autant : « Je viens de finir sa maison au Cap-Ferret, mais je peux tout aussi bien dessiner des meubles, des modèles pour des stations de recharge électrique ou concevoir un centre commercial d’un nouveau type. Ce qui m’intéresse avant tout, c’est de créer des monuments ou des objets qui vont passer la décennie. Paris est une ville majestueuse parce qu’elle est cohérente… »

Mais surtout ne lui parlez pas d’uniformité : « On est allé trop loin dans le marketing et les études de marché. Les gens reviennent au vrai et à la spontanéité. On recommence à respecter le gantier de Millau, l’espadrille de Mauléon ou le lin normand. Moi, mes pièces, elles sont uniques. D’ailleurs, les acheteurs du Bon Marché ne sont venus me chercher que pour cela. Je n’avais pourtant que quelques dizaines de suiveurs sur Instagram. C’est tout à leur honneur. Ce vrai, ce goût, ce risque, ils l’ont et c’est probablement le seul grand magasin qui marche vraiment aujourd’hui. »

S’il reste proche de sa mère, Nathalie Garçon, une créatrice de mode à succès qui a eu jusqu’à 300 distributeurs dans les années 2000 pour sa fast fashion, Émile, lui, ne cherche pas forcément à bâtir un empire. Ses modèles de vie sont plutôt à rechercher du côté des purs créateurs ou designers du genre Philippe Stark.

À nos côtés, nous sommes Chez Francis place de l’Alma, le communicant Éric Bonnet fait remarquer que Christian Dior non plus ne cherchait pas forcément à bâtir un empire au début. On connaît la suite. Émile Garçon est confiant. Il sait qu’il a un rayon de lumière qui illumine ses pas. S’il est prêt à rencontrer tout type d’industriel, il ne fera pas trop de concessions. Sa liberté le lui commande. Cela promet. On a tellement besoin de beau et de surprises. C’est aux entrepreneurs de les mettre sur le marché.

Robert Lafont