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Cinéma : Frères, une apologie de la fraternité

Entreprendre - Cinéma : Frères, une apologie de la fraternité

Si vous avez vu, lecteurs, ce film intitulé Frères, vous avez compris que les relations humaines peuvent être séduisantes, extraordinaires et éclairantes. En sortant du cinéma d’Antony où j’ai vu ce film Frères, je me suis dit que, des trois valeurs figurant sur les mairies françaises, ce ne serait peut-être pas, suite à ce film, les deux premières qui mériteraient d’y rester, à savoir la Liberté et l’Egalité, mais plutôt…

… la Fraternité qui, en théorie, est une notion banale, sauf pour moi et le réalisateur qui sommes des fils uniques ! Mais, sans dire que la relation entre ces deux personnes nées de mêmes parents devrait (pouvoir) s’étendre à toutes les relations humaines, il importe d’indiquer que ce film en montre la force et l’originalité. Ce mot « frère », d’ailleurs, est à tel point motivant qu’il était déjà très valorisé, bien avant l’apparition de ce film, en étant utilisé dans les monastères pour désigner la nature spirituelle de la relation qui lie les moines entre eux !

Par le mot « frère » nous entendons donc d’abord un lien « génétique », mais aussi et ensuite « spirituel » qui peut unir deux personnes masculines, deux hommes. Sans oublier le sens du mot « frère » lorsqu’il est utilisé de manière populaire pour désigner un ami : « mon frère » remplaçant aujourd’hui ce qu’hier nous appelions « mon pote » ! Ainsi, le terme de « frère » a un sens dans notre société qui ne se réduit pas au lien génétique, même si c’est ce type de relation qui est cinématographié par le film Frères.

La relation entre ces deux garçonnets, Patrice et Michel, est tellement forte qu’elle nous fait penser qu’ils ne sont pas seulement frères. L’idée m’a traversée qu’il pourrait être des jumeaux, soit, bien sûr, des frères, mais formant une unité telle qu’on devine l’œuf commun dont ils proviennent. Toutefois, cette hypothèse ne tient pas puisqu’il y a un frère aîné 2 ans plus âgé que son frère cadet. L’autre idée qui me vint est que leur relation est si forte qu’elle pourrait être vue comme homosexuelle, le sexe n’étant pas le but de cette relation mais son passage quasi obligé dans l’amour. A dire vrai, le film ne montre rien illustrant cette thèse, et les enfants sont si jeunes qu’ils paraissent prépubères !

Donc ni jumeaux, ni homos, ces frères sont des enfants qui semblent préparés à ne pas vivre très séparés. Pourtant, ils se marient et l’un d’eux à des enfants tandis que l’autre se découvre stérile. L’un, Michel, se sent une dette morale envers son aîné, Patrice, qu’il considère comme l’être qui lui a sauvé la vie.

Il faut dire que la partie de leur vie avant l’adolescence apparaît comme négative pour le spectateur alors qu’elle est le noyau dur de leur énergie et de la force de leur Fraternité. Le film commence par leur vie de famille, la découverte de leurs parents, une mère volage, donc infidèle et un père amoureux, et malheureux. Le jour où un homme vient chercher leur mère pour l’emmener quelque part, leur père cherche à s’y opposer, mais, n’y parvenant pas, il se pend. Lorsque les enfants découvrent leur père pendu dans une grange, l’aîné, Patrice veut le libérer en coupant la corde, coupure qui fait tomber le père, apparemment déjà mort, en se fracassant le crâne sur un objet. Le sang coule à flot et Patrice est convaincu qu’il a tué son père et qu’il risque, par conséquent, la prison.

Raisonnement doublement faux car d’abord son père était probablement déjà mort avant de tomber et, ensuite, car on ne place pas des enfants si jeunes en prison ! Néanmoins, obnubilé par ce risque et cette mort, Patrice, 7 ans, part en courant et explique, à son petit frère, 5 ans, qu’il entraîne, qu’il faut fuir pour échapper à la prison. Michel suit Patrice tout aussi traumatisé par la chute de son père que par le risque courut par son frère. A quelques kilomètres de leur foyer, les enfants se cachent et s’installent dans un bois en construisant une cabane. C’est la deuxième guerre mondiale et de nombreux enfants disparaissent sans que de réelles recherches soient menées pour les retrouver ; et sa mère semble moins intéressée par ses enfants que par sa séduction des hommes ! Et lorsqu’on sait que ses enfants vécurent 7 ans isolés dans un bois, on comprend que la maternité peut-être une réalité moins forte que la fraternité ! Il suffit de se rappeler que Médée, figure mythique grecque, est cette femme qui tua son fils nommé Louvre, sans parler des faits divers nous apprenant que des mères ont tué leurs enfants !

Ainsi, si aujourd’hui sort ce film Frères, n’est-ce pas le signe que la maternité et la paternité sont en recul et en perte de valeur et d’intérêt au profit d’une relation familiale plus horizontale que celle du parent à l’enfant ? Je ne dis pas que le film a été réalisé pour prouver ce recul puisqu’il part d’un cas vécu ; mais je veux montrer que ce film est le signe, voire le symptôme, de la fin d’une civilisation où la famille s’effrite et, lorsque les enfants vivent concrètement le cas de l’effritement, ils y résistent par une relation fraternelle intense qui prime sur toute autre relation. Ce film insiste ainsi pour montrer que le petit frère, Michel, abandonne sa famille – celle qu’il a fondée – et zappe l’anniversaire des 20 ans de sa fille lorsqu’il apprend que son frère a quitté son épouse pour, selon elle, quitter la vie. La nouvelle rencontre fusionnelle des 2 frères, adultes et solidement installés dans la vie, montre que cette fois, c’est le frère cadet qui veut sauver l’aîné, comme si la fraternité fonctionnait dans tous les sens et hors de toute hiérarchie.

Si Frères part de l’exemple de deux personnes qui ont vécu cette histoire montrée dans ce film, c’est pour raconter l’histoire de deux hommes. Je me permets de préciser cela pour calmer les féministes qui pourraient encore voir dans ce titre une marque du machisme. Qu’elles se mettent en quête de femmes ayant vécu une histoire aussi originale et réalisent le film Sœurs !

Pour finir, je tiens à dire que ce film n’est pas un bon film : c’est un Chef d’œuvre ! Il est accompagné d’une excellente musique qui entrelace la vie des deux frères lorsqu’ils étaient enfants à la vie qu’ils mènent à un âge adulte mûr et vieillissant. A la différence des Films d’Action qui déferlent sur les écrans, Frères est un Film de Passion, d’une passion originale de deux frères l’un pour l’autre. Sur une île déserte, on peut imaginer Robinson et Vendredi, et, dans une société qui s’effrite, deux frères, tels que Michel et Patrice ! Foncez le voir !

Emmanuel Jaffelin
Philosophe, sage, auteur de l’Eloge de la gentillesse (Pocket) et de Célébrations du Bonheur ( Michel Lafon éditeur)


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1 commentaires sur « Cinéma : <em>Frères</em>, une apologie de la fraternité »

  1. Ce ne sont pas les parents des enfants .. ce n est pas le père qui se pend , ni la mère qui part ailleurs … mauvaise compris du scénario

    Répondre

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