Sabine Leveiller, General Manager de Vista France, décrypte les effets de la crise du Covid sur les TPE/PME et l’accélération de la transformation numérique dans les entreprises.
Selon vous, en tant que partenaire des TPE/PME, comment analysez-vous le comportement adopté par les chefs d’entreprise face à la crise que nous traversons ?
Cette crise inédite a apporté de nombreux bouleversements, en impactant fortement les TPE/PME, mais elle a également révélé l’extraordinaire agilité des chefs d’entreprise. Ces derniers ont su adapter leurs stratégies en ajustant ou en ajoutant de nouvelles offres de produits et de services à leur activité.
Parmi les chefs d’entreprise que nous avons interrogés dans une précédente étude, ils étaient un quart à affirmer avoir complètement réinventé leur entreprise, en commençant à vendre des produits et des services innovants, tout en approchant un nouveau type de clientèle.
C’est un effort incroyable qu’il a fallu réaliser dans un temps record et un grand climat d’incertitude. C’est une remise en question parfois très poussée, et compliquée à gérer en si peu de temps avec parfois peu de personnel. Mais au global, 66 % d’entre eux affirment aussi que les changements qu’ils ont réalisés pour améliorer ou développer leur business ont été positifs, voire très positifs. Ils en retirent les bénéfices sur le long terme.
En France, les TPE notamment, ont du retard en termes de digitalisation de leur activité ; est-ce toujours le cas aujourd’hui dans un constat « post-crise » ?
Lorsque la crise sanitaire a atteint son paroxysme pendant le premier confinement, beaucoup ont été inquiétés par les conséquences potentielles dramatiques de la disparition de la clientèle physique pour les TPE. Cette situation a amené les chefs d’entreprise à accélérer sur le numérique plus rapidement que prévu. Notre dernière étude montre que 60 % des chefs d’entreprises qui ont adapté leur activité déclarent avoir mis en place une nouvelle stratégie commerciale axée sur une présence en ligne renforcée. Que ce soit en créant un e-shop, en affirmant leur présence sur les réseaux sociaux, notamment Facebook, ou en proposant la livraison ou un service de « Click and Collect ». Beaucoup de ces services ont perduré post crise.
Les chefs d’entreprises interrogés ont également mobilisé une partie des aides gouvernementales (environ 10 %) pour renforcer leurs outils marketing, allant parfois jusqu’à travailler leur stratégie SEO, une première pour beaucoup d’entre eux. Ils sont aussi nombreux à s’être servis du chèque numérique, mis en place par le gouvernement, pour booster leurs compétences et se faire accompagner dans leur projet de transformation digitale.
Le marketing aurait-il donc pris une place prépondérante dans la stratégie des petites entreprises ?
L’adaptation de leurs supports marketing a été nécessaire, et le marketing s’est retrouvé au centre des préoccupations des chefs d’entreprise, qui ont pu prendre le temps de mener une véritable réflexion stratégique, et développer leur image de marque, offline et online.
Le focus a clairement été sur le digital lors de la crise, avec notamment 40% des chefs d’entreprise interrogés qui ont développé une stratégie « réseaux sociaux », à même de recréer une partie du lien social de proximité pour lesquels leur activité était connue. Des nouveaux supports physiques ont été développés en parallèle. Je pense par exemple aux packagings avec l’essor de la vente à distance.
Aujourd’hui, on assiste clairement à un retour en force des actions offline qui ont fait leurs preuves par le passé. Nos progressions de chiffre d’affaires sur des supports marketing papier plus traditionnels (les flyers ou les bannières par exemple enregistrent des taux de croissance à deux chiffres par rapport à l’avant crise en 2019) montrent bien l’importance de réfléchir son approche marketing de manière globale et équilibrée, en mixant online et offline.
Au-delà des ajustements stratégiques à visée purement commerciale, les chefs d’entreprise ont également saisi la crise sanitaire comme une opportunité de réflexion sur leurs valeurs et leur impact. Ils sont nombreux à mettre en avant le respect de l’environnement dans leur positionnement de marque. Je pense aussi que le rôle social des TPE/PME a bien été mis en lumière et beaucoup cherchent avec raison à cultiver cette proximité avec leur clientèle.
Vous venez de publier une étude sur le rapport qu’entretiennent les Français avec leurs cadeaux de Noël, comment les petites entreprises peuvent tirer leur épingle du jeu en cette période commerciale forte ?
Notre étude sur Noël révèle en effet que 33% des Français font leurs achats de Noël début décembre. Les petites entreprises ont donc tout intérêt à profiter de cette période !
On le sait, le cadeau en dit beaucoup sur celui qui offre, et sur sa relation avec celui qui reçoit. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : moins de 5 secondes, c’est le temps qu’il faut à 60 % des Français pour décider s’ils comptent ou non garder leurs cadeaux à Noël !
Autant dire que la décision est quasi immédiate, ce qui laisse à penser que le processus décisionnel démarrerait juste avant, au moment où la personne reçoit son présent.
Et c’est peut-être à ce moment-là que les petits commerçants peuvent faire une différence face aux grandes enseignes : proposer un bel emballage, lui ajouter une touche personnelle, une jolie carte d’accompagnement etc. qui apportent une vraie valeur ajoutée au cadeau. C’est ce qu’a fait la marque de collants et de chaussettes écologiques « REV. Society », qui ajoute des planches de stickers dans ses commandes.
D’ailleurs, on constate que la personnalisation des cadeaux est de plus en plus plébiscitée par les Français : ils sont 7 sur 10 à nous dire qu’ils seront plus susceptibles d’aimer instantanément un cadeau s’il est personnalisé. Parfois négligé par le passé, cet aspect ne peut plus être ignoré par les petites entreprises, qui doivent se démarquer et recréer la chaleur des échanges physiques à travers un emballage soigné et personnalisé.