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McKinsey et les consultants : impôts, éthique et transparence

Entreprendre - McKinsey et les consultants : impôts, éthique et transparence

Tribune. Depuis la création  d’une commission d’enquête au Sénat sur le paiement ou non d’impôts par McKinsey en France et l’utilisation intensive, par les pouvoirs publics et même le Président de la République, de cabinets de conseil, nous assistons à un débat qui témoigne d’une certaine méconnaissance  des pratiques réelles.

Ayant moi-même appartenu, entre 1974 et 1983, au bureau parisien de McKinsey , je constate en plus que  mon ancien employeur, compte tenu de sa présence et renommée mondiale, se trouve au centre d’une discussion qui concerne  en réalité toute la profession, donc aussi ses concurrents directs comme, par exemple, le Boston Consulting. Group, les cabinets Bain, Booz Allan et Roland Berger, mais aussi les prestataires, bien plus nombreux, issus de l’audit (PWC, Coopers, E&Y, Mazars, etc.) ou du monde informatique (Cap Gemini, Accenture, IBM et des centaines d’autres.) Que peut-on dire pour éclairer le débat ?

Au niveau des feuilles d’impôts, où un contrôle rigoureux par les services de Bercy est certainement déjà en cours, deux particularités sont à prendre en compte: McKinsey comme, par exemple, tous les grands cabinets d’avocats, est un partnership. Le bénéfice, si bénéfice il y a, est en grande partie distribué aux associés, qui, à leur tour, paient les impôts correspondants…En plus, chaque bureau, comme les bureau français, importe ou exporte régulièrement une partie importante de ses ressources, ce qui entraîne des facturations croisées, parfois à des tarifs journaliers différents, généralement très surveillées par le fisc.

Faire appel à un consultant n’est généralement pas du tout, comme le débat le laisse penser, une alternative à savoir ou pas savoir faire le même travail soi-même en interne. Le consultant est appelé pour améliorer significativement la performance de son client – de gestion et de fonctionnement, stratégique ou opérationnelle, commerciale, industrielle, sociale et financière en fonction de l’objectif de la mission – et tout ceci de façon  rapide et efficace. Grâce à son oeil extérieur , sa spécialisation, ses expériences répétitives,  sa  connaissance des pratiques et outils des meilleurs entreprises ou organisations et sa disponibilité totale, sa contribution est généralement appréciée et reconnue et ne doit pas être comparée au savoir-faire propre des employés du client. Mais ceux-ci en profitent aussi , comme McKinsey l’exige, par le détachement de quelques collaborateurs, souvent issus des plus talentueux, au sein d’une équipe de projet mixte…rien que pour assurer également la mise en oeuvre des recommandations en fin de projet

Le contenu des interventions et surtout l’origine des clients, très maîtrisable de mon temps avec un bureau parisien à taille humaine au sein d’ un réseau essentiellement américain et européen, est devenu de nos jours,  avec une taille multipliée par dix et une présence mondiale, nettement plus complexe: accepter ou non de travailler pour des concurrents directs, grâce à une discrétion totale et des « Chinese walls » entre équipes, ou pour des entreprises à vocation délicate ( production d’armes ou de produits néfastes à la santé, etc.), missions pour des gouvernements à « vertuosité » discutable ( Russie, Chine, Moyen Orient, Afrique et même Europe ) devient une question importante.

De mon temps, le co-fondateur de McKinsey, Marvin Bower, nous apprenait un professionnalisme sans faille (et qui m’a beaucoup servi dans ma carrière ultérieure de dirigeant d’entreprise) Aujourd’hui reste une charte éthique (mais qui assure son application ?) et surtout la faculté de chaque consultant de refuser son « staffing » sur une mission, dont il désapprouve l’objectif, qu’il ne sent pas ou qui implique, par exemple, des voyages intenses à un moment difficile pour sa vie familiale. Mais il est souvent facile de trouver un remplaçant, la hantise de tout consultant étant d’être non affecté à une mission ( dans le langage interne « on the beach ») Pourquoi ne pas nommer un « Chief Ethics Officer  » pour l’ensemble du cabinet ou même pour chaque zone géographique ?

Chez McKinsey, le travail « pro bono », gratuit, à toujours existé, mais il était quasi exclusivement réservé à des organisations humanitaires ou d’utilité publique. L’étendre à une organisation ou même un homme politique me semble inadéquat et source de conflits d’intérêt ultérieurs.

Mais le plus important, pour tout travail dans le secteur public et contrairement à des clients privés, qui exigent une discrétion assurée et totale, est une transparence totale: appel d’offre respectant le code des marchés publics, publication des recommandations, visibilité des intervenants et, bien sûr, des budgets…ce qui autolimitera les demandes d’appel aux consultants…

Axel Rückert

Ancien dirigeant d’entreprises et auteur de Faire réussir la France que j’aimepropositions du plus Français des Allemands, disponible sur www.fairereussirlafrancequejaime.com ou sur Amazon



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