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« Inflation Reduction Act », la réforme américaine, ou comment s’occuper des effets et non des causes !

Joe Biden (Chris Kleponis / CNP America America)

La chronique économique hebdomadaire de Bernard CHAUSSEGROS

Le texte américain

En faisant voter une réforme majeure pour le climat et la santé, dans un texte nommé « Inflation Reduction Act », le président des États-Unis prévoit de convaincre les entreprises américaines à se tourner vers les énergies renouvelables. L’adoption de ce texte est vue comme une victoire par les partisans d’un Joe Biden qui prépare les élections législatives déterminantes de mi-mandat. Il propose, dans ce but, un vaste plan d’investissement dans les secteurs du climat et de la santé, en le dotant d’incitations financières destinées à faire évoluer l’économie américaine vers les énergies renouvelables et à limiter le prix de certains médicaments, en taxant, même a minima, les grosses entreprises.

Joe Biden affirme vouloir parler d’avenir en jugeant enfin nécessaire « d’apporter le progrès et la prospérité aux familles américaines » et de « montrer à l’Amérique et au peuple américain » [mais aussi au monde entier, et notamment aux européens] « que la démocratie fonctionne encore aux États-Unis ».

Une enveloppe financière est prévue à hauteur de 370 milliards de dollars avec l’espoir de réduire les émissions de GES de 40 % d’ici à 2030. L’opposition républicaine estime qu’il ne s’agit que d’un effet d’annonce sans lendemain, tandis que les démocrates sont persuadés que ces mesures permettront de combattre efficacement les lobbies des industries fossiles, et de développer les énergies alternatives et vertes pour un avenir plus sain, plus propre et plus équitable pour tous.

Ce n’est pas le seul objectif de l’I.R.A. qui entend réformer une nouvelle fois l’accès aux soins afin de corriger, comme l’avait voulu le président Obama, l’insupportable inégalité des américains qui ont besoin de soins. À titre d’exemple, on peut indiquer que le président Biden s’engage à faire baisser les prix des médicaments et qu’il propose de financer ces mesures en taxant de 15 % toutes les sociétés dont les profits dépassent le milliard de dollars, dans le but de les empêcher d’échapper à l’impôt comme elles le font actuellement en utilisant toutes les subtilités fiscales existantes.

On pourrait applaudir à ces réformes sociales d’un président qui prend le contrepied de son prédécesseur Trump ! Mais, en fait, ce texte inquiète beaucoup les Européens qui veulent s’opposer à des mesures d’une telle ampleur financière, destinées au climat et la santé, et qu’ils voient comme des mesures discriminatoires destinées à concurrencer fortement leurs économies. Ils font remarquer qu’il s’agit avant tout de subventions déguisées et de mesures protectionnistes qui favoriseront outrageusement les entreprises américaines au détriment de leurs propres entreprises.

Quel est le projet I.R.A. ?

Le principal volet de l’I.R.A. concerne le climat. Un deuxième volet plus modeste comporte des mesures destinées à réduire le coût des soins de santé, en particulier pour les seniors. Initialement beaucoup plus ambitieux, puisqu’il prévoyait des mesures en faveur de la petite enfance et des aides aux familles, ce volet avait été développé sous le nom de « Build Back Better » et devait concrétiser symboliquement le mandat de Joe Biden sous son angle social.

 Malheureusement pour le président, ce projet n’a pas pu trouver de majorité parlementaire pour faire voter le budget, ce qui a provoqué l’abandon d’une partie du volet climatique et social.

Même si les Européens le trouvent démesuré, le projet, financé comme je l’ai déjà indiqué, et rebaptisé I.R.A. en raison du contexte inflationniste, est devenu, comme partout dans le monde occidental, la principale préoccupation des ménages, sans que l’on sache pour autant si son impact sur l’évolution du coût de la vie sera aussi positif qu’on l’espère outre-Atlantique.

Sans rentrer trop avant dans les détails, on sait que des incitations sont prévues sous forme de crédits d’impôt pour les ménages afin de soutenir la vente des véhicules électriques neufs ou d’occasion, mais obligatoirement américains, que des aides seront versées pour l’installation de panneaux solaires ou pour la rénovation des logements anciens ou mal isolés. Pour ce qui concerne les entreprises, le plan envisage aussi le versement de crédits d’impôts pour soutenir les investissements et la production dans les domaines des énergies vertes et renouvelables, éoliennes, centrales solaires, hydrogène vert et biocarburants, dans la recherche de technologies propres à séquestrer le carbone, dans celle des batteries, et comme on l’a vu, de quoi produire des véhicules électriques de plus en plus performantes.

Cette loi protectionniste contrarie infiniment les dirigeants Européens parce qu’elle met en danger leurs industries. Les subventions ne seront versées que pour des produits fabriqués aux Etats-Unis et on connait déjà la lutte acharnée que se livrent les constructeurs automobiles américains et européens sur l’électrique. De même, le développement des parcs éoliens devront faire appel massivement à des aciers fabriqués aux USA. Les Européens craignent donc de voir les industriels européens, ou les américains ayant investi en Europe se délocaliser massivement pour aller s’installer sur le sol américain afin de pouvoir bénéficier de ces aides. Plus largement, on sait que la loi américaine s’étendra aussi aux composants ou aux matières premières que l’on sera tenu de se procurer auprès de fournisseurs américains.

Il s’agit d’un retour brutal au protectionnisme le plus libéral, ce qui sous-entend, selon les experts économiques français et allemands spécialisés dans le droit de la concurrence, que les obligations prévues dans la loi I.R.A. ne respecteront pas les règles fixées par l’OMC (Organisation mondiale du commerce), notamment en ce qu’il autorisera le versement de « subventions très fortes avec des clauses de préférence nationale ».

Depuis l’adoption de cette loi par les USA, la crainte non dissimulée de l’UE est de voir ses usines de fabrication de batteries, de panneaux solaires, et plus généralement de technologies propres, s’installer aux États-Unis plutôt que sur son sol. Cette crainte est loin d’être un fantasme car les américains disposent de réserves importantes de financement public, accessibles et ciblées sur le long terme avec une prévisibilité d’au moins 10 ans et l’avantage de pouvoir profiter de la simplicité du régime fédéral unique américain.

Il faut savoir que l’I.R.A. ne se contente pas de subventionner uniquement la fabrication de technologies propres. Dans le cas des véhicules électriques, par exemple, il soutient aussi l’extraction des minéraux critiques, la fabrication des batteries, l’achat de la voiture électrique et la production d’électricité renouvelable indispensable. Les États-Unis disposent ainsi d’un véritable double plan d’investissement, pour son industrie de pointe et pour le climat, mobilisable sur le long terme.

La réponse européenne

Les présidents français et allemands, ainsi que leurs ministres de l’économie ou des finances se sont rencontrés et entendent répondre, diplomatiquement, à ce qu’ils considèrent comme une provocation. En tout état de cause, ils tentent de négocier des exemptions pour certains secteurs industriels européens, comme il semblerait qu’il en existe déjà pour les Mexicains et les Canadiens. Les débats qui ont déjà eu lieu en décembre dernier n’ont pas abouti à de grands progrès mais à de simples déclarations d’intention.

Le président français est un des rares à espérer que l’Europe se dote de son propre « IRA », que l’on a récemment intitulé « Buy European Act », afin de s’imposer comme des partenaires obligés. Il a fait valoir l’importance du vieux continent dans la compétition économique mondiale et dans la lutte globale contre la fragilité du monde, née conjointement de la crise sanitaire, de la guerre en Ukraine, de la crise énergétique et climatique. Paris et Berlin sont, à tout le moins, d’accord pour exiger des évolutions des textes pour garantir leur compétitivité, déjà face aux USA, mais également face à la Chine.

Il est en effet important de pouvoir définir de réelles modalités d’agréments pour les projets d’intérêts européens qui ne peuvent prospérer sans être largement subventionnés par les États-membres, et d’étendre ces derniers à des secteurs aussi incontournables que le développement de la filière « hydrogène », les recherches sur les batteries de haute capacité, les technologies de la santé, tant en production de médicaments comme les ARN messagers, qu’en termes de développement de nouveaux matériels de soins, ayant recours, de près ou de loin, aux progrès de l’intelligence artificielle, etc.

L’Europe n’aura d’ailleurs pas seulement à se battre contre les volontés hégémoniques américaines et à son protectionnisme officialisé par l’I.R.A. qui les encadrent. L’Europe doit aussi tenir compte des agissements similaires émanant de la Chine qui dispose désormais d’un plan quinquennal, mais aussi des velléités du Japon qui vient de définir un programme de transformation verte doté d’un budget de 20 000 milliards de yens.

Face à la recrudescence de telles offensives qui pourraient déboucher sur des stratégies plutôt positives en matière de climat, l’UE devrait être suffisamment réactive pour se doter elle aussi d’un plan d’investissement à long terme, qui soit à la mesure du continent et qu’elle se recentre sur des recherches et des productions propres de technologies encore plus performantes, et ce, en se fondant sur des partenariats publics/privés définis à l’échelle de l’UE.

C’est le cadre institutionnel du Conseil européen qui doit saisir aujourd’hui l’occasion de convaincre les chefs d’État et de gouvernement des 27 d’apporter à leur soutien à un plan d’investissement dans les technologies propres, et d’aider ainsi l’Europe prise dans sa globalité à concevoir sa loi sur l’industrie net-zéro prévue pour 2023. Mais, aussi nécessaire soit-il, ce plan ne doit être qu’une étape. L’UE devra en effet répondre à tous les besoins d’investissement climat si elle veut que les objectifs du Green Deal deviennent une réalité tangible pour les entreprises, les travailleurs et les citoyens.

Les États-membres de l’Union européenne consacrent déjà des financements publics à la lutte contre le changement climatique. Il est indispensable de les identifier, mais surtout désormais de les cibler dans les budgets nationaux. Il convient en effet de rendre parfaitement lisibles les dépenses favorables au climat mondial, pour les séparer nettement de celles qui lui pourraient lui être défavorables. Si l’Europe semble démunie face aux avances américaines, si Bruxelles ne semble pas toujours savoir comment réagir face à la puissance des moyens mis en place par l’I.R.A. qui semble déloyale (il ne faut pas craindre de la qualifier ainsi), c’est avant tout parce que les dirigeants fondateurs des institutions européennes sont en grande partie passés « à côté de leur sujet » !

Même si l’UE manifeste bruyamment son désaccord par de multiples réactions individuelles des principaux États-membres, elle peine à être entendue. Il manque une réelle unité, celle d’un continent tout entier réuni et parlant d’une seule voix ! Il n’est donc pas certain que les américains s’en émeuvent et en tirent comme conclusion qu’ils doivent respecter enfin leurs alliés du vieux monde européen qui ont largement participer à leur émancipation et à leur indépendance au XVIIIe siècle. Dès la 2ème guerre mondiale, il a toujours été dans l’esprit des USA de considérer les pays européens comme une constellation d’entités informes et sans force. Voilà longtemps que je fais remarquer que l’Europe fédérale, unie autour d’une constitution politique unique et de règles sociales applicables à tous, d’un grand marché économique unique, d’une monnaie, elle aussi unique comme c’est déjà le cas, mais surtout d’une fiscalité solide et équilibrée, représenterait une force que ses 450 millions d’habitants amplifieraient largement face aux 340 millions d’américains. Le président Macron a tenté de négocier des aménagements avec les américains, sans grand espoir et sans plus de résultats que les ministres.

L’I.R.A. a été instauré aux USA pour favoriser l’industrie américaine. Le 7 février, les ministres français et allemand de l’Économie se sont rendus à Washington avec la mission d’exprimer le désaccord de l’Union Européenne vis-à-vis de la politique protectionniste américaine et d’exiger, très diplomatiquement, plus de transparence. On ne peut que constater la vanité de ces efforts ! Les américains ne changeront pas d’objectif et c’est précisément ce que craint l’Union Européenne qui dénonce que la politique américaine. « Si elle est mise en œuvre dans sa forme actuelle, la loi (…) pourrait déclencher une course mondiale aux subventions » .

Une Europe plus puissante à inventer

Une seule réponse paraît utile et opportune, l’unité si difficile à faire entre les États-membres pour ne parler que d’une seule voix. Face à l’ampleur du péril, les 27 doivent décider d’une réponse ferme. Certes, il aurait été possible, légalement, de poursuivre les USA devant l’OMC pour avoir recours à des pratiques contraires aux règles du commerce international auquel l’UE a toujours été viscéralement attachée. Mais ce n’est pas la réponse qui a été choisie par les États-membres. Les Européens ne peuvent s’engager dans une voie qui impliquerait de rompre l’unité indispensable entre les États du monde libre et les USA alors qu’il faut présenter un front uni face à Moscou dans le contexte de la guerre en Ukraine.

Faut-il alors réellement répliquer par une initiative industrielle européenne, équivalente à l’I.R.A. qui est une des ambitions de la Commission Européenne, une sorte de pacte « vert » ? Mais cette proposition ne rencontre pas l’adhésion générale d’autant qu’elle nécessiterait de nouveaux financements à prendre sur les nationaux, à prélever donc sur ce qui est déjà marqué comme des subventions et des crédits d’impôt en faveur des technologies vertes.

Le sujet est sensible. Nombreux sont les États-membres qui craignent, comme l’Italie, l’Irlande, l’Autriche, la Pologne ou la Belgique, qu’un nouvel affaiblissement des règles, déjà sensiblement assouplies lors de la pandémie, favorise, in fine, les industries des États qui disposent de vrais moyens budgétaires. Afin de pallier ce déséquilibre, un compromis sera quasiment impossible à trouver et il faudrait alors instaurer une solidarité financière pour permettre aux États disposant de capacités budgétaires limités d’aider leurs propres entreprises. Mais le recours à un second endettement en commun des 27, après l’expérience inédite du plan Selon toute vraisemblance, un tel plan de relance apparait comme une ligne rouge pour les pays du Nord de l’Europe comme les Pays-Bas, l’Autriche, le Danemark ou la Suède.

Pourquoi quémander aujourd’hui un assouplissement auprès des américains ?

L’Europe n’a pas saisi les bonnes opportunités lorsqu’elles se présentaient. Au lieu de rajouter ou de surajouter des États-membres parfois insolvables, il aurait fallu mettre en place une fédération politique forte et comprendre dès les années 70 que l’état du monde dessinait de grands blocs, qui plus est possesseurs de la technologie nucléaire. Le mondialisme, qui oscillait entre les idées bienveillantes des droits de l’homme et la volonté des capitalistes de capter de plus en plus de profits, ont offert à des dirigeants que cela arrangeait bien de véritables œillères.

En réalité, les décideurs de nos pays, et tout particulièrement de la France, n’ont eu de cesse que d’abandonner leurs savoirs-faires ancestraux pour développer de manière maximale les secteurs les plus rentables en termes de profits, voire de surprofits. J’ai déjà évoqué cette faillite des élites dans d’autres chroniques et je ne citerai que deux exemples pour illustrer ce propos. Le premier, qui parlera à tous ceux qui font leurs courses alimentaires, est une publicité pour un distributeur de produits de l’agriculture Bio qui montre, vu du ciel, un porte-conteneurs sur l’océan tandis qu’une voix Off dit : « Pourquoi aller chercher si loin ce que l’on peut produire chez soi ? »

L’autre exemple est celui de l’électricité et de son prix qui a augmenté en France de façon hallucinante ? J’ai déjà évoqué cette question mais il faut y revenir tant cela frise le scandale d’État ! Prenons l’exemple d’un tout petit pays, le Costa Rica, État d’Amérique centrale, de 5 millions d’habitants sur une superficie de 50.000 km² environ. Pourquoi en parler ? Parce qu’il a la double particularité d’être autosuffisant sur le plan énergétique et de produire une électricité verte qu’il exporte. Il a recours à la géothermie, aux éoliennes, au solaire et à l’hydraulique.

Même si, par ailleurs, ce pays réputé pour être parmi les plus égalitaires du monde, subit une inflation proche de celle de la France (de l’ordre de 7,8 %), celle-ci n’est pas due à ses charges énergétiques, mais surtout à sa petite taille et à ses besoins d’importation de produits manufacturés. Ses ressources sont essentiellement le tourisme et notamment l’écotourisme dans un pays « en paix avec la nature » et l’agriculture (fleurs et fruits). Mais prendre un tel exemple nous oblige à faire le constat qu’une simple volonté politique peut faciliter le développement d’une stratégie efficace en termes de production énergétique au point de le rendre totalement autosuffisant en favorisant des solutions adaptées au pays.

Et cet exemple nous permet de revenir sur celui de la France des 30 Glorieuses qui avait réussi à être, à une échelle 10 à 12 fois plus grande que le Costa Rica, une nation autosuffisante et exportatrice d’électricité. Ce n’est plus le cas aujourd’hui et on peut affirmer que l’inflation que connait la France est largement causée par la hausse du prix des énergies et tout particulièrement celui de l’électricité.

Les remèdes oubliés

On pourrait être aujourd’hui tenté en France de soigner les effets d’une mauvaise politique énergétique alors qu’il aurait fallu en soigner les causes lorsque c’était le moment de le faire. S’offusquer de la mise en place de l’I.R.A. américain alors qu’on a raté depuis 50 ans toutes les occasions de conserver notre indépendance est la démonstration, une nouvelle fois de la faillite des élites.

En effet, la mauvaise gestion par nos dirigeants politiques de la production électrique, le manque d’entretien des centrales nucléaires, la politique erratique en matière de recherche sur les énergies renouvelables ont fait de la France avant-gardiste, autonome et autosuffisante des 30 Glorieuses, le mauvais élève de l’Europe et du monde d’aujourd’hui.

La balance des paiements est dans un état désastreux, la France important beaucoup plus que ce qu’elle exporte (53,5 Mds €) et se trouve en grande partie due aux importations de pétrole et de gaz, voire, à moindre mesure, d’électricité. En rajoutant à ces carences en termes de stratégie, l’obligation européenne de rendre le marché concurrentiel, nos dirigeants n’ont fait que dévaloriser un secteur de pointe dont la France détenait les clefs, et enclencher la hausse démesurée des tarifs.

Si le gouvernement a mis en place un « bouclier tarifaire » pour aider les ménages frappés de plein fouet par le prix de l’électricité, il n’en est pas de même pour les PME, les artisans et les commerçants qui ont vu leurs charges multipliées par un coefficient allant de 4 à 10 ! De telles augmentations paraissent bien excessives quand on étudie de près ce qui les motivent, et ce qui les expliquent.

Les pouvoirs publics, sous des gouvernements de gauche comme de droite, ont mené une politique particulièrement désordonnée depuis les années 70, dans le domaine de ce qui avait pourtant été le grand « fleuron » de la réussite française de l’après-guerre (c’est-à-dire dès l’avènement de la Ve République en 1958).

La société publique EDF, a été réformée, pour ne pas dire dépecée, et a explosé en plusieurs entités, EDF, RTE, ERDF et ENGIE, démultipliant ainsi les strates de décisions, les intervenants et les équipes, et créant ainsi de nouvelles niches de profits préjudiciables à l’intérêt de la nation comme des abonnés.

La gestion du nucléaire, confiée à des sociétés comme AREVA ou LE CREUSOT, a été chaotique, une succession d’erreurs de stratégie et une source de gabegies, l’exemple le plus flagrant étant le projet de l’EPR de Flamanville qui a accumulé les bourdes techniques, les erreurs technologiques, les décisions politiques et industrielles absurdes prises par des gens ne disposant pas de connaissances requises, ce qui a abouti à des surcoûts inacceptables qui ont abouti à de nouvelles gabegies. Le pire étant, au-delà de l’argent public gâché, la maximisation des profits attribués à des responsables incompétents et des surcoûts insensés ayant généré des émoluments privés supportés par l’argent public et donc par l’argent des contribuables.

En 2004, Areva s’était engagé sur le chantier d’un EPR Finlandais qui s’est révélé ruineux, avec une perte de 6Mds €. En 2005, EDF lance l’EPR de Flamanville, pour lequel Areva devra fournir l’îlot nucléaire. Le projet sera l’échec que l’on connait, avec une source de pertes financières : malfaçons, retards et dépassements de budget se multiplient. Initialement prévu pour une mise en service en 2012, le site n’est toujours pas en service en 2023 et on peine à chiffre la perte finale.

En raison du retard du chantier de l’EPR Finlandais, Areva doit provisionner pour verser des pénalités à TVO. Une provision de 60 millions d’euros a été passée en 2005, puis une provision évaluée à 200 millions d’euros au premier semestre 2006. À fin 2006, le montant de ces provisions est estimé à 700 millions d’euros. En 2007, de nouvelles provisions devraient être passées pour un montant évalué entre 500 et 700 millions d’euros, ce qui porterait le surcoût à 1,5 milliard d’euros. Au premier septembre 2009, Areva porte ces provisions à 2,3 milliards d’euros et menace d’arrêter le chantier, après avoir porté plainte contre son client. En mars 2015, de nouvelles provisions sur perte d’un montant de 720 millions d’euros sont incluses dans les résultats annuels 2014.

Après de multiples rebondissements, Areva finit par faire faillite après avoir fait l’acquisition de l’entreprise des forges Le Creusot qui livrera finalement un dôme fissuré. Ces errements sont inqualifiables et devraient en toute logique voir les responsables politiques et industriels renvoyés devant les tribunaux, ce qui ne semble pas être le cas, même maintenant que les scandales ont éclaté au grand jour.

Et aujourd’hui, le coût de l’électricité devenu insupportable vient largement expliquer l’inflation que supportent les citoyens, à travers l’ensemble de leurs achats quotidiens. En effet, en dehors du budget consacré aux carburants par les automobilistes, l’essentiel des achats des ménages est impacté par le prix de l’électricité, charge principale des commerçants et artisans, notamment dans l’alimentation, mais aussi des PME dont les machines ou l’informatique ne fonctionnent que grâce à l’énergie électrique. On peut même citer l’économie du spectacle qui est en déroute, puisqu’on sait que de nombreux théâtres, cinémas, salles de spectacles sont désormais obligés de fermer leurs portes ou, moindre mal, de limiter leur consommation électrique ou de revoir à la baisse leurs productions.

La France avait une production d’avant-garde en matière énergétique. Elle pouvait consacrer des budgets à remplacer les hydrocarbures par des sources d’énergie alternatives et notamment vertes. Elle ne l’a pas fait à une époque où elle aurait pu le faire, et elle se trouve de ce fait, aujourd’hui, tributaire d’importations onéreuses, en provenance de pays qui nous font payer très cher leur domination, ceci sans parler de l’impact de la guerre génocidaire menée par la Russie en Ukraine..et là encore,à l’image de ce qui s’est passé pendant le COVID, à qui profite la crise..aux entreprises américaines

Conclusion

Alors, plutôt que de prier respectueusement les États-Unis de nous respecter et de nous laisser une part du gâteau de la prospérité économique à venir, en réalité quelques miettes, ne serait-il pas opportun de proposer une réforme des institutions européennes et de préparer l’instauration d’une fédération économe en moyens publics afin de laisser aux citoyens et aux innombrables entrepreneurs les moyens financiers nécessaires aux développement des projets qu’ils ne manquent pas d’imaginer et de tenter.

L’Europe d’aujourd’hui ressemble à une « copie carbone..sic » du jacobinisme à la Française, elle multiplie les strates de décisions qui contraignent la libre entreprise plus qu’elle ne la contrôle vraiment, mais surtout elle multiplie « les intervenants » dont la « production » se traduit rarement en plus-values mais occasionnent essentiellement des surcoûts.

Pourquoi démultiplier les coûts de la démocratie à ce point. Au-dessus du mille-feuille français, doit-on rajouter d’autres sinécures princièrement rémunérées à des « élus » qui n’apportent en réalité aucune plus-values démocratique.

Le spectacle honteux des débats actuels au Palais-Bourdon devrait nous servir d’exemple et d’alerte !

Bernard Chaussegros


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