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Didier Parakian, 100 % Marseillais

Copyright photos : Antoine Bordier

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Depuis qu’ils sont arrivés à Marseille, les Parakian n’ont pas quitté la ville ou si peu. Didier est la 3è génération présente dans cette capitale ensoleillée du sud de la France. Nous l’avons suivi pendant une demi-journée à travers quelques évènements importants, comme le salon des entrepreneurs.

Entrepreneur, Didier Parakian a été une des figures emblématiques de la mode française. Puis, il s’est investi un peu plus pour sa ville en devenant l’un des adjoints de Jean-Claude Gaudin. Portrait d’un homme qui est 100% Français, 100% Arménien et 100% Marseillais.

Ah, Marseille, son vieux port, sa forteresse, sa cathédrale de la Major, sa basilique Notre-Dame-de-la-Garde, ses petits quartiers qui ressemblent à des villages de pécheurs, et, ses ruelles où ombres et lumières semblent jouer à cache-cache. « A Marseille, prévient Didier Parakian, vous avez 300 jours de soleil par an. » Le cri des enfants, qui se font la course à trottinette, résonnent sur les murs de la citadelle. Sur les hauteurs de Marseille se trouve la maison de Suzy, la maman de Didier. Cette maison a servi de décor aux derniers films d’Henri Verneuil, de son vrai nom Achod Malakian.

« Cette maison a une belle histoire, car nous sommes au 4 square Monticelli, c’est l’adresse officielle. Mais nous sommes, aussi, au ‶588 rue Paradis″, le titre du dernier film d’Henri Verneuil. Il a tourné une partie du film dans les jardins. » Didier parle en souriant, il parle avec le cœur. Ces films, Mayrig et 588 rue Paradis, racontent, en creux, l’histoire d’Henri Verneuil, qui est arrivé à Marseille, sur le quai de la Joliette, avec ses parents survivants du génocide de 1915-1921.

L’histoire de Didier n’est guère différente. Sa famille, également, a survécu au terrible génocide. Marseille a accueilli ses grands-parents. « En 1920, Arakel, mon grand-père maternel, arrive à l’âge de 20 ans à Marseille. Il était originaire de Bursa, en Turquie. »

Quand il était jeune, Didier se souvient avoir fait la fête avec ses grands-parents. « Nous nous sommes très bien intégrés, explique-t-il, parce que nous aimons la famille, le travail, et, la religion. Puis, nous savons faire la fête et nous entendre avec tout le monde. »

Du journalisme à l’entrepreneuriat

Didier a de qui tenir. Son grand-père était un travailleur acharné. Il travaillait jour et nuit, comme le raconte Suzy. « Mon papa, il fabriquait la nuit, et, le matin, il vendait au marché. » Elle raconte qu’il s’est sauvé à la nage en 1915, et, que depuis il avait horreur de l’eau. Le peuple arménien est un peuple traumatisé. De cette tragédie poussée à l’extrême, il en a gardé une force qu’il a transmise à ses enfants et à ses petits-enfants. Travaillant dans les tissus, Arakel se développe de plus en plus. Pendant la Seconde Guerre, il est victime d’une rafle à Lyon. « Dans le train de la mort, il fait la rencontre d’Edmond Michelet. Il restera 15 mois à Dachau. Libéré par les Américains, il a été protégé par une prière qu’il portait toujours sur lui. Et, que je porte moi-aussi. Quand il sort de Dachau, il ne pèse plus que 37 kg. Il a échappé au four crématoire. »

Le grand-père maternel est resté un exemple pour Didier. D’autant plus, qu’il lui a montré le chemin de l’entrepreneuriat. Son grand-père a lancé une des premières marques de jeans en France, dans les années 60, qui s’appelait New Jeans.

C’est en 1964 que naît Didier, le 5 mars, à Marseille. Son enfance est, fortement, marquée par cet entrepreneuriat qui se transmet de père en fille. Ses parents, Gérard et Suzy, gèrent des magasins de prêt-à-porter à Bollène, Orange et Marseille. Avec sa sœur, Marjorie, Gérard se rêve en entrepreneur, lorsqu’il entreprend ses études supérieures. Il se souvient avoir vu ses parents se lever tous les matins « avec la passion chevillée au corps. Avec le sourire aux lèvres, ils avaient tout le temps la banane. »

En 1985, pendant ses études à l’Ecole Supérieure de Commerce de Toulouse, l’ESCT, Didier écrit dans la revue Armenia. II s’occupe de la rubrique ‶ Rencontre avec les chefs d’entreprise ″. « C’est comme cela que j’ai rencontré, à Genève, Les Cigares Gérard. Puis, la société Stephane Kélian, le fabricant de chaussures, qui a été fondé par Stéphane Kéloglanian en 1960. Enfin, le déclic se fait grâce à Alain Manoukian, le roi du prêt-à-porter et du pull ! »

En 3è année de son école de commerce, Didier écrit les premières lignes de sa future réussite entrepreneuriale. « Alain Manoukian devient mon parrain de thèse, qui parle de ma création d’entreprise. Il aime mon slogan : Didier Parakian : Les femmes le fascine, il les rend fascinantes. » Didier sort major de sa promotion.

La marque Didier Parakian est lancée

Didier pourrait faire du cinéma avec la casquette de metteur-en-scène. Lors de la soutenance de sa thèse, ce génie du slogan, réussit le tour-de-force de faire un défilé de mode avec des étudiantes de son école de commerce, qui portent sa première collection. Le succès est au rendez-vous. C’est le premier. Avec ses prêts d’étudiants cumulés, qu’il a pris soin d’économiser, il ouvre, à 23 ans sa première société et lance sa marque Didier Parakian. De fil en aiguille, Didier se fait un nom dans la profession. Il ouvre sa première boutique à Toulouse, puis, ce sera Marseille, et, l’international. Celui que ses amis appellent le ‶James Dean de la mode″ devient boulimique. « J’avais une rage de conquête, de vaincre, qui était incroyable. Je faisais tous les salons de la terre. Je me rendais, même, au Japon, qui est réputé comme étant d’accès très difficile. » Il aime les femmes, il les habille.

En 1988, il fait son 1er salon à Paris, la capitale de la mode. Dans l’aventure, il embarque sa sœur, Marjorie, qui dessine les collections. Comme pour les start-ups qui naissent dans les garages, Didier et sa sœur travaillent dans celui de leurs parents. « Je me revois couper les tissus sur la table de ping-pong, du garage. J’achetais les tissus à Lyon. » La boucle est presque bouclée : ses parents deviennent ses premiers clients…

Dans les années 90, Didier est en pleine croissance. Sa société grandit en même temps que son sourire s’élargit. Avec humour, il aime dire : « Moi, j’aime les femmes. J’aime habiller les femmes. Certains aiment les déshabiller. Moi, j’aime les habiller. » Et, ça marche de plus en plus. Ses clientes recherchent ses collections qui sont flamboyantes, joyeuses et pétillantes, colorées. Ses concurrents ? Il cite Kenzo, Lacroix. Didier Parakian est en haut de l’affiche, sa mode en tout-cas. Au-début des années 2000, avec ses cinquante salariés, il réalise un chiffre d’affaires de 15 millions d’euros. Didier Parakian habille les Chinois, les Russes…La marque devient la reine du Moyen-Orient. Le succès ne s’arrête pas.

Puis, quand il revend, en 2015, il aura multiplié par 3 son chiffre d’affaires, avec 2000 clients et 50 boutiques, dont 10 en propre. Didier résume son parcours d’entrepreneurs par ses mots qui sont ses porte-bonheurs, ses porte-valeurs : Arménie, Famille, Histoire, Identité, Passion, Racines, et, Volonté de Réussir. Didier regarde sa montre, assis dans le canapé du salon de cette célèbre maison du square Monticelli. Il se lève pour se rendre au Salon des Entrepreneurs.

L’Arménie et ses engagements politiques à Marseille

En 2002, Didier se marie avec Stéphanie. Ils auront 3 enfants, Anna, Théa et Sevan. En 2005, il se rend pour la première fois en Arménie. « Je me souviens. En sortant de l’avion, j’ai embrassé le sol. Je marchais pour la première fois sur la terre de mes ancêtres. J’étais très ému. C’est, certainement, de là que j’ai eu envie de m’engager en politique. En 2006, je deviens le président de la Chambre de Commerce Franco-Arménienne de Marseille. Deux ans après, en 2008, je rencontre Jean-Claude Gaudin. C’est un maire que j’ai, toujours, admiré. »

Il devient son adjoint, chargé de l’économie et de l’international. Par la suite, au niveau de la Métropole Aix-Marseille-Provence, dont la présidente est Martine Vassal, Didier est devenu un des vice-présidents. Il s’investit en full-time (à temps plein) dans cette nouvelle passion. Il aime les défis. Il travaille sur les questions d’attractivité. Il est fier de rappeler qu’en 2013, Marseille a été désignée Capitale européenne de la culture. Depuis, il a travaillé pour renforcer cette attractivité qui a permis à la Métropole de devenir un véritable hub d’excellence digitale. « Avec 15 câbles numériques sous-marins qui arrivent à Marseille, nous connectons plus de 3 milliards de personnes. » Marseille est devenue incontournable, notamment, avec le groupe CMA CGM, qui est le leader mondial du transport maritime et du fret, et, avec le groupe Pernod Ricard, qui est le numéro deux mondial dans le secteur des vins et des spiritueux. « Il y a de nombreuses entreprises importantes à Marseille et dans la Métropole, insiste Didier. »

Nous sortons du 588 rue Paradis et nous nous rendons dans la petite voiture de Didier au Salon des Entrepreneurs. Là, une centaine de stands de PME-PMI attirent l’attention des médias, et, des officiels, dont fait partie Didier, qui de stand en stand vont saluer les entrepreneurs. Didier est interpellé à plusieurs reprises. Il salue Alain Gargani, le président de la CPME, Marc Thépot, le président de Marseille-Tourisme, Pierre Guille, le directeur de La Marseillaise, Pierre Allary, le patron de Mapi, Il est ravi de croiser quelques députés, comme Mohamed Laqhila. L’ambiance est à la fête. Ici, au palais du Pharo, où près d’un millier d’entrepreneurs sont au rendez-vous. De l’autre côté de la grande baie vitrée, on aperçoit le fort Saint-Jean et toute la rade de Marseille. L’endroit est presque divin.

Didier repart, il a rendez-vous pour une visio à la Métropole. Avant de démarrer, il ouvre sa fenêtre et lance en rigolant : « Je préfère le Marseille-loving au Marseille-bashing. » C’est une nouvelle déclaration d’amour. Elle confirme bien que Didier Parakian est 100% Français, 100% Arménien et 100% Marseillais.

Antoine BORDIER,


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