Pour cette fiction formidablement menée et très bien reconstituée, le réalisateur s’est inspiré du livre de la journaliste et correspondante de guerre américaine Elizabeth Becker, « When The War Was Over : Cambodia and the Khmer Rouge Revolution », dans lequel elle essaie d’expliquer pourquoi les Khmers rouges imposèrent à leur peuple un régime aussi sanguinaire et destructeur.
Dans « Rendez-vous avec Pol Pot », qui se situe en 1978, le Cambodge, rebaptisé Kampuchéa démocratique, est sous la tyrannie du dictateur Pol Pot et de ses Khmers rouges. Le pays est économiquement exsangue et près de deux millions de Cambodgiens ont disparu dans un génocide qui n’a pas encore été, ni dévoilé, ni dénoncé. Trois Français (une journaliste familière du Cambodge campée par Irène Jacob, un reporter photographe joué par Cyril Gueï et un intellectuel sympathisant de l’idéologie révolutionnaire interprété par Grégoire Colin) acceptent l’invitation du régime dictatorial et espèrent décrocher un entretien exclusif avec Pol Pot.
Mais la réalité cambodgienne qu’ils découvrent à travers la propagande officielle et le traitement qu’on leur organise vont remettre en cause les certitudes de chacun et provoquer des interrogations légitimes. « Dans mon film, il s’agissait à la fois de parler des Khmers rouges mais aussi d’interroger le rôle du journaliste de terrain, qui tend à disparaître. Aujourd’hui, on est davantage dans l’immédiateté, on travaille sur les dépêches, et non sur le fond. Les rédactions sont plus réticentes à envoyer quelqu’un sur le terrain pour trois ou quatre semaines », explique Rithy Pahn qui mène avec maestria cette œuvre à la fois politique et salutaire sur l’un des plus horribles génocides du XXème siècle.
En mêlant des prises de vue réelles en couleurs, des archives en noir et blanc, mais aussi des transparences et des surimpressions, Rithy Pahn signe un film singulier. N’oubliez pas ce « rendez-vous »…
René Chiche
« Rendez-vous avec Pol Pot », sortie en salles le 5 juin mai. Durée : 1 h 52
