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L’état de droit menacé par l’individualisme et le communautarisme

Entreprendre - L’état de droit menacé par l’individualisme et le communautarisme

La chronique économique hebdomadaire de Bernard CHAUSSEGROS

Nos concitoyens, après les moments de fraternité émouvants nés dans les affres des confinements liés au COVID, sont depuis redevenus très individualistes. Certains pourraient même dire qu’ils sont de plus en plus égoïstes ! On pourrait d’ailleurs s’interroger, avec une dose d’humour caustique, sur le fait que la France et les Français, dans leur immense et silencieuse majorité, sont atteints par une infection mystérieuse qui leur fait espérer tout le contraire de tout.

Contrairement à ce que beaucoup diraient, on n’emploiera donc pas ici le terme de schizophrénie, ou de « schizo », couramment et familièrement employé, d’ailleurs de façon impropre, pour désigner des individus qui usent d’un double discours ou qui affichent plusieurs personnalités opposées, réactionnaires et libéraux en même temps, ce qui cause, au sein de la collectivité nationale, un grand désordre des idées et des actes, et ce qui induit des révoltes souvent incontrôlables.

On le répète assez souvent, au « zinc » ou devant la machine à café, la France est le prototype de l’État de droit. On pourrait même dire que c’est la France qui a inventé ce concept politique, en construisant cette puissance juridique au cours de son histoire et tout au long de son évolution organisationnelle, administrative et gouvernementale.

Un bel outil ! Certes ! À condition que le système juridique mis en place s’applique à tous les citoyens de la même façon et que, par ailleurs, chaque citoyen ne s’évertue pas à le tordre à sa convenance. Car dans ces conditions, les méfaits de l’égalitarisme viendraient remettre en question toute la construction basée sur les notions de liberté et d’égalité qui se déclinent de la théorie du Contrat social.

Des exemples

Prenons un exemple du quotidien, celui des motards sur les autoroutes quittant ou entrant dans Paris. Qu’est ce que c’est que ces irascibles qui à force de grands gestes repoussent illégalement les automobilistes sur les côtés de la voie de gauche pour leur permettre de circuler entre les voies ? Je suis motard et j’ai un droit de police administrative, et pourquoi pas de police judiciaire !

Il y a aussi l’exemple de la pratique grandissante du vélo, surtout dans les grandes agglomérations, et progressivement un peu partout dans le pays. Cet engouement, né des théories écologistes anti-voitures, est devenu un combat entre les citoyens de base et ceux qui pensent « avoir tout compris » et qui s’arrogent le pouvoir d’avoir raison sur tout et sur n’importe quoi.

Même si cela ne leur donne pas la priorité, les cyclistes « ont désormais le droit » de par la loi, de ne pas s’arrêter à un feu rouge (mais sous condition que cela ne gêne pas les autres usagers), afin de continuer tout droit ou de tourner à droite en toute sécurité. Ils peuvent même remonter en sens inverse les voies à sens unique si la vitesse est limitée à 30 km/h. Depuis que le vélo est devenu le moyen de transport dans l’air du temps, et pour certains militants, l’étendard d’un dogme politique, de plus en plus de conducteurs de véhicules à moteur se plaignent du comportement peu respectueux du Code de la route de certains cyclistes.

Entre les dépassements par la droite, la circulation en sens interdit ou encore les franchissements de feux rouges, la majeure partie des cyclistes commettent sans arrêt des contraventions de circulation routière. Certes, les cyclistes ont un régime exorbitant du droit commun (feux rouges ou sens interdits), mais ce n’est que sous certaines conditions.

Il faut la présence d’une signalisation « cédez-le-passage cycliste » au feu rouge (panonceaux triangulaires placés sous le feu tricolore et feux jaunes clignotants (ou pas) montrant une silhouette de vélo et une flèche explicative). La règle d’autorisation de franchissement du feu s’applique dans le sens indiqué par la flèche. Bien entendu, en l’absence de ces éléments de signalisation, le fait de franchir un feu rouge est une infraction réelle sanctionnée par une amende forfaitaire de 135 euros.

Il faut toutefois savoir que les piétons restent toujours prioritaires, en dépit des facilités accordées aux cyclistes pour passer les feux, et les autres usagers de la route le sont également s’ils sont déjà engagés sur le carrefour. Aussi, toutes ces autorisations sous contraintes appellent de la part des différents usagers une extrême vigilance. Car tout cela ne va pas sans excès ! En effet, désormais convaincus que la loi les autorise à appliquer ces nouvelles règles de circulation, de nombreux cyclistes urbains se sont mis à tout se permettre en la matière, surtout pour en remontrer aux automobilistes responsables à leurs yeux de toutes les pollutions, et entendent faire valoir « leur nouveau droit », quelles que soient les conditions de lieu et de temps !

On devrait d’ailleurs s’élever contre la décision politique qui a consisté à donner aux cyclistes et aux conducteurs de trottinettes, de telles autorisations exorbitantes du droit commun. Il s’agit bel et bien d’une rupture de l’égalité des citoyens devant la loi. Le Code de la route ne s’applique donc pas de façon homogène à tous les citoyens. Compte tenu de la différence de gabarit entre les véhicules concernés, la responsabilité d’un accident retombe désormais sur l’automobiliste, par application de la loi Badinter de 1985. Cette rupture du principe de l’égalité des citoyens devant la loi ouvre la porte, on ne s’en rend pas suffisamment compte, à tous les excès. Et c’est ce que pensent de nombreux citoyens, pas seulement les cyclistes : « ce qui n’est pas expressément interdit, est donc autorisé ! »

Les infractions à ces nouvelles règles sont largement constatées par ceux qui marchent ou qui se déplacent dans les rues de la capitale. Vélos ou trottinettes (même à moteur) sur les trottoirs, non-respect des règles de priorité aux intersections, utilisation du trajet autorisé à contre-sens dans des rues trop étroites pour que ce soit sans danger, et la conséquence, c’est que les règles qui sont régulièrement fragilisées par des concessions multiples ne sont plus clairement comprises. Elles cessent donc d’être correctement respectées par la collectivité, ce qui crée un désordre juridique global.

L’exemple est banal et très parisien, mais il résume clairement comment de petites libertés prises avec la règle, avec la loi, avec l’État de droit, sont révélatrices des dérives plus globales des citoyens avec la Loi de la Nation ! On peut d’ailleurs illustrer ces dérives individualistes récentes avec cet adage : « je suis dans un État de droit, j’ai tous les droits ». Les citoyens qui affirment péremptoirement de telles énormités oublient trop facilement qu’ils ont aussi des devoirs.

On peut évoquer enfin cet autre exemple assez quotidien et assez français, celui des copropriétés immobilières. Car c’est un constat que font les habitants dans les résidences modernes qui s’épanouissent dans les villes, et notamment celles du Grand Paris ! Les constructions neuves sont nombreuses à sortir de terre pour densifier l’habitat de l’Ile-de-France.

 De nouvelles copropriétés voient le jour et les relations entre les copropriétaires accédant à la propriété immobilière. Le constat est fait par les usagers comme par les syndics de gestion (pas toujours à la hauteur des attentes d’ailleurs) : les copropriétaires se comportent comme s’ils étaient propriétaires d’une maison individuelle.

Et même en pleine et entière connaissance des règlements de copropriété qui définissent leurs droits et leurs obligations vis-à-vis de la communauté, ils se considèrent comme des propriétaires à part entière, ils exigent d’exercer tous les droits liés à la propriété immobilière et n’ont cure des règlements votés par les assemblées légales. Ils sont chez eux et font ce qu’ils veulent, considérant qu’ils ont un droit personnel, vivre sans rien s’interdire. Un exemple apparemment insignifiant qui montre pourtant combien et avec quelle force égoïste un décalage s’instaure peu à peu entre l’État de droit et sa mise en application par les citoyens.

Et les pouvoirs publics !

L’exemple vient d’en haut, dit-on ! Notre État, et surtout ses représentants seraient-ils tout autant schizophrènes ? On le croirait volontiers ! Car cette schizophrénie au quotidien, on la découvre avant tout dans le comportement des élites (ou qui sont censés l’être) qui nous gouvernent. Le pouvoir semble leur être monté à la tête, c’est en tous cas ce que pensent désormais les citoyens.

Ils ont le pouvoir et ils décident qu’ils ont le droit de tout faire, y compris de ne pas respecter les lois qu’ils contribuent à faire rédiger et à promulguer.

On a souvent le sentiment que l’exécutif manque de visions stratégiques dans la conduite des affaires du pays. La théorie du « en même temps » se traduit trop souvent par des décisions très coûteuses en termes de finances publiques et qui semblent prises en contradiction avec les valeurs fondamentales de la République. On pourrait croire que ceux qui président aux décisions gouvernementales se réfèrent surtout à un nouvel adage qui ne dit pas son nom « Tout et son contraire » !

On n’aura sans doute jamais vu autant de responsables politiques ou économiques, élus ou non, poursuivre leurs missions malgré d’inacceptables conflits d’intérêts, en dépit de mises en examen par des magistrats assermentés, et dans le même temps se permettre de critiquer des décisions de justice en dehors de toute procédure légale et en dépit de l’obligation de réserve qui les oblige à se taire.

Combien de déclarations reprises par les médias font état de critiques, de procès d’intention, voire de propos injurieux proférés à l’égard des institutions de la République dont ces élus et responsables politiques devraient être les premiers garants.

L’État de droit

En France, y compris dans les conversations de « bistrot », tout le monde en parle, tout le monde s’y réfère ! Surtout pour affirmer de façon péremptoire : j’ai des droits, j’entends qu’on les respecte ! et même le plus souvent « c’est mon droit » … ou « j’y ai droit ». Peu nombreux sont ceux qui comprennent qu’il s’agit d’abord de gérer les relations entre la grande communauté des citoyens, et non de définir les seuls droits individuels des uns et des autres.

Il s’agit donc d’un concept juridique et philosophique, qui est destiné avant tout à définir un cadre politique et présuppose, dans notre État, la prééminence du droit sur le pouvoir politique. C’est un concept, et comme les concepts le sont souvent, il s’agit d’un principe parfois abstrait.

Il impose, au sein de notre groupe social, que tout le monde respecte la loi, autant les gouvernants que les gouvernés. C’est ainsi que le citoyen, autant que la puissance publique, est soumis à un même droit fondé sur le principe du respect de normes fondatrices, comme la liberté et l’égalité.

Le concept d’État de droit s’oppose à la notion de pouvoir arbitraire. Il désigne un État dans lequel la puissance publique est soumise aux règles de droit votées par le pouvoir législatif. Dans « L’esprit des lois », Montesquieu a écrit qu’il n’y avait « point de mot qui ait reçu plus de différentes significations, et qui ait frappé les esprits de tant de manières, que celui de liberté » et qu’il convient donc de parler des libertés !

On peut les classer selon ses sources entre celles qui relèvent du respect de l’autonomie individuelle (sûreté et liberté individuelle, respect de la vie privée et de la personne humaine), celles qui concernent les libertés d’agir (aller et venir, entreprendre ou passer des contrats), celles qui s’attachent à la pensée (conscience, opinion, communication, enseignement, association expression populaire ou action politique), celles, enfin, qui sous-tendent l’action économique et sociale et la liberté syndicale.

La notion de liberté se déduit de ses sources anciennes et historiques, comme la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le Préambule de la Constitution de 1946, les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, et la Constitution de 1958. La liberté est indissociable de la notion d’Ordre public, un concept fort peu défini mais qui se déduit des décisions du Conseil constitutionnel.

La notion d’Ordre public recouvre le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique, notion qui résulte d’une construction jurisprudentielle garantissant l’application effective de droits et principes constitutionnels. Les objectifs sont en fait des impératifs liés à la vie en société qui doivent guider l’action normative du gouvernement, mais doivent aussi encadrer l’attitude personnelle des citoyens dans la vie collective, respect des institutions et des textes normatifs, mais aussi tolérance vis-à-vis des autres citoyens.

L’Ordre public est donc une nécessité démocratique. Il appartient au législateur d’opérer la conciliation nécessaire entre le respect des libertés et la sauvegarde de l’ordre public sans lequel l’exercice des libertés ne saurait être assuré. C’est ainsi que la limitation des libertés individuelles peut être légitimée par la sauvegarde de l’ordre public. On assiste malheureusement ces dernières décennies au développement d’un individualisme qui s’oppose à cette conception de l’ordre public. Pire, il se confronte de plus en plus frontalement avec le wokisme, une « cancel culture » animée par une nouvelle tyrannie des minorités qui se classifient elles-mêmes selon leur hypothétique et ancestral droit à la réparation. On ne nait plus libre et égaux, mais opprimés et donc revanchard, ou alors tyranniques bien qu’innocent de crimes du passé.

L’État de droit sous-entend l’existence et le respect d’une hiérarchie des normes. Cette exigence implique que chaque norme juridique soit rédigée sur le fondement d’un droit qui lui est supérieur. En France, les lois votées par le Parlement doivent respecter le bloc de constitutionnalité (la Constitution de 1958, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ou le préambule de la Constitution de 1946). L’égalité des citoyens devant la loi constitue une autre condition essentielle d’un État de droit, ce qui implique que les personnes et les organisations reçoivent la personnalité juridique, physique ou morale, selon les cas, l’État lui-même étant considéré comme une personne morale. D’ailleurs, c’est à ce titre que l’on peut même assigner l’État en justice pour faute lourde du service public de la justice.

Pour être effectif, l’État de droit suppose la séparation des pouvoirs qui vise à éviter une concentration du pouvoir entre les mains d’un despote, et au contraire qu’il soit distribué entre des organes indépendants et spécialisés, le pouvoir de voter la loi (pouvoir législatif), le pouvoir d’exécuter les lois et donc d’édicter des règlements (pouvoir exécutif) et enfin, le pouvoir de rendre la justice (pouvoir judiciaire).

La laïcité et la tolérance

Pour être complet, il convient de rappeler que notre État de droit est fondé sur le principe de laïcité, laquelle repose sur trois piliers, la liberté absolue de conscience et celle de manifester ses convictions (mais dans les limites du respect de l’ordre public), la séparation des institutions publiques et des organisations religieuses et l’égalité de tous les citoyens devant la loi (quelles que soient leurs croyances ou leurs convictions).

La laïcité garantit aux croyants et aux non-croyants le même droit à la liberté d’expression de leurs convictions. Elle assure aussi bien le droit d’avoir ou ne de pas avoir de religion, d’en changer ou de ne plus en avoir. Elle garantit le libre exercice des cultes et la liberté de religion, mais aussi la liberté vis-à-vis de la religion, puisque personne ne peut être contraint, par le droit, au respect de dogmes ou prescriptions religieuses. La laïcité présuppose la séparation de « l’Église » et de l’État. La seule et unique souveraineté est celle du peuple et l’État ne peut régir le fonctionnement interne des organisations religieuses.

De cette séparation se déduit la neutralité de l’État, des collectivités et des services publics, non de ses usagers. La République laïque assure ainsi l’égalité des citoyens face au service public, quelles que soient leurs convictions ou croyances. La laïcité n’est pas une opinion parmi d’autres mais la liberté d’en avoir une. Elle n’est pas une conviction mais le principe qui les autorise toutes, toujours sous réserve du respect de l’ordre public ! Et malheureusement, il est de plus en plus fréquent actuellement que ce principe de séparation entre le fonctionnement laïque de notre démocratie soit bouleversé par l’ingérence inacceptable de certains communautarismes religieux ! Une avancée très forte des individualismes religieux remet régulièrement en cause désormais l’État de droit.

Ces attaques menées contre l’ordre public de notre pays sont, bien évidemment, l’œuvre de groupes religieux intégristes soutenus par des pays étrangers soi-disant amis et peuvent être assimilées à des volontés prosélytes que nous ne pouvons pas accepter plus longtemps. Le risque est important de voir notre culture s’affaiblir, voire qu’elle se voit définitivement annihilée. Le comportement de ces groupes de pressions profite de l’esprit de tolérance qui est l’un des fondements de notre démocratie, héritage des philosophes des Lumières. Mais on ne peut pas toujours tout tolérer ! Il est au moins nécessaire de ne pas tolérer les intolérances d’autrui.

Ces zones de non-droit, où même les représentants de l’Etat ne peuvent pénétrer, comme à Marseille ou Nimes pour ne citer que ces deux villes du Sud, où règne l’omerta et les bandes de voyous qui prospèrent grâce à cette peur qu’elles inspirent sur ces territoires. Nous ne pouvons plus cautionner cette situation sous couvert de différences sociales..Nous sommes dans un pays de droits..et de devoirs..Cessons de nous flageller et appliquons les lois qui régissent notre quotidien..

Mais, le problème est plus complexe qu’il n’y parait, puisque ces attaques contre notre culture et nos modes de vie ancestraux sont également orchestrées par des écoles de pensées franco-françaises. En réalité, l’État de droit doit faire autant face aux ennemis de l’intérieur qu’au ennemis de l’étranger.

Etre tolérant, malgré tout, cela pourrait-il permettre de trouver des solutions ? La tolérance suffirait-elle pour fonder un monde laïque et respectueux de l’État de droit ? La tolérance pourrait se définir comme une disposition à accepter la différence et l’étrangeté. Mais il est peut-être plus aisé de définir la tolérance par son contraire, l’intolérance ! Celle-ci se caractérise par cette irritation qui nous prend face aux intrusions que subit notre monde familier.

Le philosophe anglais déjà cité, John Locke, l’avait remarqué dans la Lettre sur la tolérance, en notant que ce qui est intolérable, ce qui exaspère et avive les haines, ce sont de petites choses sans importance, une coutume différente, la répétition d’un bruit, etc. quelque chose qui rompt avec nos habitudes et qui nous impose une sensation « désagréable ».

C’est l’exemple récent du port de l’Abaya à l’école, cette marque évidente d’une appartenance religieuse qui a été sanctionnée par une récente décision du Conseil d’État, et qui ne doit finalement concerner qu’environ une centaine de collégiennes sur des millions d’élèves. Mais cette soi-disant coutume communautaire affole pourtant les débats dans les médias.

Parallèlement, on devrait pouvoir s’étonner et pourquoi pas s’offusquer que le port du Burkini dans les piscines n’ait pas été l’objet d’une décision d’interdiction du conseil d’État (sans doute parce que l’on se trouve dans un lieu public et non dans un établissement scolaire), alors que pour de simples mesures d’hygiène, un nageur se présentant porteur d’un boxer-short de natation sera refoulé en attendant qu’il passe un simple slip de bain traditionnel. Et pourtant le Burkini est encore plus que l’Abaya un signe manifeste d’appartenance religieuse.

Tolérer l’autre, le reconnaître ou le respecter, ce n’est pas la même chose. La tolérance suppose d’être bien disposé envers ce qui est différent et étranger. Le respect suppose d’approuver, de donner une valeur à l’autre pour lui-même, à ses actes ou à ses attitudes, mais il impose une réciprocité. S’intégrer dans une communauté humaine suppose la réciprocité, et celle-ci n’est pas toujours effective. Dans le sujet évoqué de l’Abaya ou du Burkini, on comprend que la réciprocité n’est pas présente. On doit accepter les mœurs d’autres citoyens qui ne respectent ni notre ordre public, ni nos libertés fondamentales et encore moins notre culture collective. Et on comprend alors que le but est de nous imposer un mode de vie qui n’est pas le nôtre, un mode de vie marqué par une religion alors que nous sommes une nation laïque, et qui n’est pas celui dont nous avons hérité de la longue chaîne de notre histoire, et du sacrifice de nos soldats, notamment ceux de 14 dont tellement sont morts pour préserver notre liberté, celle d’être ce que nous sommes, des Français, libres, égaux et fraternels.

La tolérance simple ne suffit pas. La question oppose deux positions apparemment antithétiques qui font le socle des débats actuels en philosophie politique entre républicains et libéraux. Si pour certains, la tolérance doit être sans limites, pour d’autres, demander à chacun d’adhérer à des valeurs communes est précisément de nature à développer plus d’intolérance.

Or l’intolérance remet en question les acquis de deux cent ans de Contrat social ! Un abandon intolérable de ces principes qu’il convient de défendre ! Cela se fera par le droit et non par des querelles de plateaux de télévision, ou par les argumentations des experts auto-proclamés des « cafés du commerce », et aujourd’hui des pages Facebook et autres boucles WhatsApp !

En résumé, l’État de droit qui caractérise notre pays doit être protégé contre les attaques dont il est continuellement l’objet. Cela se traduit par un respect des institutions et des des normes juridiques qui doivent s’imposer tout autant aux dirigeants politiques  qu’aux citoyens.

Cela se caractérise aussi par une volonté affirmée de protéger la laïcité, valeur spécifique de notre démocratie.

Cela doit enfin se manifester par une tolérance mutuelle et une déférence tout aussi mutuelle des valeurs fondamentales de notre République.

Bernard Chaussegros


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