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État de la France et de son industrie

Entreprendre - État de la France et de son industrie

Tribune. En 2006, M. Maurice Allais, notre prix Nobel de sciences économiques, me dit : « Pib 2005 = 1 772 milliards d’euros », alors qu’il devrait s’élever à 2300 milliards. Il s’était appuyé sur le taux de croissance moyen des 30 glorieuses : 1950 à 1974 = 4,7 % de moyenne, 1975 à 2000 = 1,6 % ensuite la chute totale. Je reprends chaque année ce travail : 2022, Pib = 2650 milliards alors qu’il aurait dû, selon les bases de calcul de M. Allais, s’élever à 4690 milliards.

Seulement si nos recettes diminuent, nos dépenses augmentent – résultats :

  • déficit budgétaire = 4,7 % du Pib = 125 milliards
  • déficit de la balance commerciale = 164 milliards
  • dépenses publiques = 58 % du Pib, alors que nous ne supportons pas encore l’entière charge de la dette, d’intérêts négatifs Bce a fait passer ses taux à (3,25 %).

Endettement des ménages 1 360 milliards – celui des entreprises non financières = près de 4 000 milliards, plus le reste, nous dépassons actuellement les 8 000 milliards d’endettement et rappelons que la dette est remboursée par le budget de l’État, (moins de 300 milliards) et non par le Pib.

L’argent du n’ayant servi qu’à boucher des trous, nos emprunts sont désormais considérés comme risqués, (baisse de la note attribuée par Fitch).

Les raisons de cette mauvaise passe étaient désignées par M. Maurice Allais :

  1. le monde politique qui a accepté, signé et imposé, à partir de 73, la libéralisation des capitaux, des biens et des personnes. France pays centralisateur, protectionniste, colbertiste n’était pas préparé pour cette « globalisation » avec sa concurrence libre et non faussée et l’interdiction d’interdire, Nous ne cherchions pas le spéculatif, mais le productif qui devait servir l’intérêt de la nation.

La dislocation du Smi (1971) l’instauration du système des taux de changes flottants (73) et la disparition progressive de toute protection de notre marché 74 et surtout fin des années 80) nous ont entraîné dans le mûr. Le Hardi n’était plus là pour dire : « Père gardez-vous à droite, Père gardez-vous à gauche. »

La France historiquement Colbertiste, ne pouvait s’installer dans cette globalisation désordonnée qui attribuait le pouvoir aux marchés en écartant les États. Aurait-il fallu que nous nous installions dans cette direction ? Non, la politique d’un État devant rester contenue dans sa géographie et l’origine de son peuple.

Cette politique ultra libérale, voulue par quelques-uns et non des moindres a simplement, détruit nos emplois, l’industrie, l’agriculture et la croissance.

La politique mondialiste, remplie de béatitude pour l’européisme ne convenant pas à la France, il serait temps de s’en éloigner.

  • Revenir au Colbertisme, avec un État fort qui désigne la route de l’intérêt général.
  • Des entreprises libres, à condition qu’elles défendent l’intérêt national.
  • Retour du Plan à la Française, cette ardente obligation qui doit associer l’ensemble des acteurs économiques et sociaux, devant défendre les intérêts de l’entreprise et celui des hommes et pourquoi pas, les associer.
  • Le retour d’une Datar modifiée qui doit mettre l’économie au service de l’homme et surtout : revenir sur les concentrations, ces villes satellites qui posent tant de problèmes aujourd’hui, après avoir désertifié les campagnes. Nous devrions reprendre le travail des comités d’expansion qui eux, ont su, dynamiser leur zone d’action.
  • Une Coface telle qu’elle était. Celle qui analysait de façon sûre et certaine les risques que devaient prendre nos entreprises à l’extérieur.
  • Défendre l’industrie en général et les entreprises en particulier. Avant toute autre chose.
  • Réhabiliter l’entreprise aux yeux des Français, vaste programme certes, mais nécessaire. Il faut le retour de l’industrie dans le Pib. 1961 l’industrie pèse 25 % du Pib, = 662 milliards d’euros si c’était encore le cas aujourd’hui. Ses 10 % ne pèsent plus que 264 milliards. Chaque année notre Pib perd 400 milliards.

Les causes de cette désindustrialisation de la France. D’abord les délocalisations favorisées par ce droit de tout libéraliser – et ensuite la recherche du plus petit prix. Mais ce qui est le plus grave : le désintérêt du politique, de la télévision et des Français pour ce qui concerne l’industrie en général et la production en particulier.

Exemple : un Président de la République se gausse que la France soit attractive parce qu’elle attire les investissements étrangers : « Non, Monsieur le Président, avec tout le respect que nous devons à votre situation, si l’étranger achète à bas prix nos entreprises, c’est pour acquérir notre patrimoine productif. »

Un problème essentiel : celui des fonds propres. M. Loïc Le Floch Prigent écrit avec juste raison ; l’industrie, j’ajoute, si vous me le permettez l’entreprise, a besoin de fonds propres, or nous avons l’épargne nécessaire. Il a raison c’est vrai.

Chers amis, le patrimoine financier des ménages se monte à 5 000 milliards.
C’est deux fois le Pib annuel, c’est plus que les besoins actuels de l’entreprise. Oui mais, les Français préfèrent laisser dormir leur argent plutôt que de l’investir, c’est parce qu’il ne recherche pas essentiellement l’intérêt mais la préservation de son capital. Il a horreur du risque. Il faut le savoir.

Fonds propres aux USA = 123 % du Pib – France 74 %. L’

Américain achète des actions, le Français place 70 % de son épargne à la caisse d’épargne et dans l’assurance vie.

Ancien attaché de direction d’une banque sous le Général de Gaulle et Pompidou, j’ai participé aux placements énormes de l’époque : Pourquoi les gens souscrivaient-ils alors des obligations ? Parce que ces dernières étaient garanties par l’État. Or l’irréductible Gaulois, qui passe son temps à critiquer l’État, n’a confiance qu’en l’État.

Viennent aussi les problèmes de la fiscalité et surtout le problème des frais lors de la transmission des entreprises.

Ensuite, les successions : nombre d’entreprises françaises sont parties à l’étranger ou ferment leur porte à cause d’une taxation insupportable.

Reste les coûts de production : une entreprise française et ses employés, supportent seuls la charge de la protection sociale. Il suffirait de transférer le financement de ce monde du travail vers celui de la consommation pour trouver une solution. La fiscalité d’avenir, c’est la fiscalité sur la dépense. Rappelons que le producteur chinois qui vend chez nous ne participe pas à ce financement alors que ses productions ont supprimé des emplois, donc des recettes pour l’État, donc des cotisations sociales. Imposons-lui une prestation sociale (ce que nous appelions TVA sociale). Nous redevenons ainsi compétitifs.

Attention, l’entreprise c’est l’équilibre ou pas d’une société. Remettons notre pays sur ses rails.

Pour conclure, je dirais que les idées de M. Maurice Allais ne sont pas obsolètes. Au contraire, elles sont d’une actualité brûlante. L’implication de l’État dans la régulation de l’économie, la protection de notre industrie, l’encouragement à l’investissement productif sont plus que jamais nécessaires.

Il ne s’agit pas de rejeter en bloc la globalisation, mais de comprendre ses implications et de mettre en place les outils nécessaires pour que notre pays puisse en tirer le meilleur parti, tout en protégeant nos entreprises et nos travailleurs. Nous avons les ressources, nous avons les compétences, nous avons l’énergie. Il est temps de les utiliser à bon escient pour construire une France forte et prospère.

Henri Fouquereau


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1 commentaires sur « État de la France et de son industrie »

  1. Cet article semble oublier la possibilité de transférer la totalisation des cotisations sociales sur la CSG, c’est-à-dire de faire supporter la totalité de la protection sociale sur les revenus du capital et du travail, et non du seul travail.

    Répondre

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