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Après le Tiers-Etat et le Tiers-monde, voici… le Tiers-candidat !

Closeup of business crowd raising hands

Tribune. Il y a eu le Tiers-Etat, nous avons connu le Tiers-monde et Monsieur Adolphe Thiers comme Président du Conseil  du roi Louis-Philippe.

Nous avons aujourd’hui le tiers-candidat, ce personnage dont la cagnotte d’intention de votes  ne cesse de s’arrondir à mesure que la probabilité de sa présence au concours se précise. Le tiers-candidat c’est celui qu’on n’attend pas, mais qui est là et qui parfois rafle la mise comme les représentants de la bourgeoisie pendant la Révolution française  avec leurs habits en queue de pie et leurs escarpins noirs à boucle d’argent, les mollets bien enserrés dans des bas de soie.

La comparaison n’est pas fortuite, le tiers étonne parce qu’il surgit sans qu’on l’attende. Il déjoue les pronostics. Quand Mirabeau lança au Marquis de Dreux-Brézé: «  Nous sommes ici par la volonté du peuple, nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes », il n’était pas le peuple certes, mais un simple aristocrate perdu au milieu de la foule, le double symétrique du marquis en somme, mais pour la circonstance armé et renforcé du concours des députés du Tiers-Etat qui l’entouraient.  La voilà la force du tiers, le nombre, qui de mutique est devenu loquace. Sa parole effraie. Le tiers effraie, il n’est pas au programme, et quand tout bascule, il tire les marrons du feu comme l’a si bien écrit dans une pièce éponyme Alfred de Musset. « Le  sujet vous plaira seigneurs si Dieu nous aide » ainsi que soliloque l’auteur en 1863 quand de la fable de La Fontaine Le singe et le chat , il a extrait ce titre.

Le tiers, c’est évidemment Monsieur-tout-le-monde, celui qui parle pour les autres quand le silence de qui dirige est devenu le complice, sinon l’auteur de l’oppression. Je baptise oppression ce qui n’est pas normal mais qu’on veut à toute force nous faire prendre pour la règle. Et c’est intolérable ! Alors une voix s’ élève toujours pour dire le vrai. Oh, certes pas pour asséner que les avocats ont le devoir de dénoncer leur client, comme certain qui est garde de seaux après avoir porté la robe, ni que les prêtres doivent révéler les péchés confiés en confession pour satisfaire au chorus d’une plèbe anti-catholique en colère, toujours active à réclamer des têtes. Le vrai c’est que la liberté s’étiole quand la surveillance s’accroit. Surveiller et punir , le  livre de Michel Foucault nous dit bien qu’il a toujours existé des raisons de priver la société des garde-fous de l’intimité, que sont l’ombre et le silence .Ce sont même d’excellentes raisons, mais pourtant, la liberté précisément c’est de se défier de ces excellentes raisons . C’est à la tour de Nesle, prison où l’on jeta les brus du roi Philippe Le Bel, coupables d’adultère, que l’on força leur chapelain à révéler leurs confessions. Elles en moururent !

Et l’on veut voir revenir ces pratiques, abolir tout sacré afin d’affecter de  croire que l’on va faire disparaître les crimes en empêchant simplement les criminels d’en réclamer le pardon ! Ils ne se confesseront plus , un point c’est tout et il y a fort à parier que le volume des crimes ne diminuera pas pour autant. C’est donc un leurre que l’on propose au populaire, si ce n’est pas, ce qui serait un comble, une attaque de plus dédiée aux vestiges d’un monde qui s’en va, celui où l’on pouvait croire en liberté, celui où l’on pouvait défendre avec indépendance. Ajouter ces restrictions de libertés individuelles à la disparition de l’argent liquide, qui permet à celui qui surveille de pouvoir tout savoir tout le temps de ce qui se dit comme de tout ce qui se fait ! Devenu limace, le citoyen laisse désormais derrière lui la trace argentée de ses désirs comme de ses peines. Vulnérable et nu, comment pourra-t-il demain, comme le souhaitait le philosophe Alain, se dresser en « citoyen contre les pouvoirs »? Hors du circuit , les tiers,  ô Zemmour, ont eux encore le courage de dire.

Mouchardage et caviardage étant devenus les deux mamelles de la France en lieu et place des labourages et pâturages du bon ministre Sully, que dire à nos enfants sinon qu’ il leur faut revoir la congruence du premier terme du triptyque républicain .

Comme le petit Poucet de Charles Perrault (1628-1703), la liberté a été perdue dans les bois. Elle n’avait pas de petits cailloux dans la poche pour retrouver son chemin.

Pour en finir, un bon débat c’est excellent pour qui veut réfléchir. Les vociférations et les horions que provoquent l’intolérance et la bêtise de ceux que celui-ci excède ne peuvent avoir qu’une seule conséquence : ils nous font honte.

Jean-François Marchi


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