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Par Victor Douek, PDG de Sellsy
Tribune. Ne serait-il pas temps d’en finir avec l’opposition historique entre Paris et la « province » ? Aujourd’hui, plus de 80% des cadres parisiens déclarent vouloir quitter la capitale (étude Cadremploi). Mais l’offre d’emploi réelle n’est pas encore prête à les accueillir et les mentalités des talents semblent changer plus vite que celles des dirigeants. Il est pourtant bel et bien possible d’ambitionner d’être un acteur majeur de son secteur – notamment dans la tech – en s’appuyant principalement sur un ancrage régional !
La centralisation, un problème très français
En France, la concentration des talents commence dès les études : la majorité des écoles, universités et formations de prestige se trouvant à Paris. De fait, les élites dirigeantes, qu’elles soient politiques, économiques ou culturelles, ont tendance à s’installer durablement dans la capitale, et à n’avoir une perception que partielle du dynamisme du reste du territoire.
Si Londres et le Royaume-Uni connaissent une situation similaire, c’est loin d’être le cas dans nombre de nos voisins européens. L’Espagne, l’Allemagne ou l’Italie ont par exemple un fonctionnement plus fédéral : l’échelon régional y est davantage compris et valorisé. C’est le cas également de pays comme la Chine, les USA, l’Inde ou le Brésil.
Aujourd’hui, on pourrait penser que la centralisation française, héritage de décisions politiques des siècles passés, peut compliquer l’essor des entreprises en régions. Cela a longtemps été le cas, mais progressivement les barrières psychologiques s’effacent et les financements se multiplient. Poussés par le désir de toute une génération de travailleurs, les entrepreneurs osent de plus en plus développer leur organisation hors de la région parisienne. A raison, car en plus d’offrir un meilleur cadre de travail aux salariés, le statut d’entreprise régionale est tout à fait profitable.
Ne négligeons pas les atouts d’une implantation régionale
Installer son entreprise en province présente en effet de nombreux avantages, et pas seulement pour les organisations qui ont une activité tournée vers l’échelle locale. La localisation des clients n’étant pas forcément corrélée à la répartition régionale des salariés. C’est particulièrement vrai pour les entreprises de services technologiques, qui peuvent effectuer la quasi-totalité de leur activité à distance.
Commençons par l’impact social de la création d’emplois en province. Il est un plus pour bénéficier de soutiens financiers de la part de la région et de tout l’écosystème local. La concurrence entre les organisations y est aussi moindre qu’en région parisienne.
De plus, si l’argument « made in France » est atout indéniable pour toute activité internationale, il est loin d’être associé uniquement à la capitale. Quant aux clients français, une implantation locale est souvent l’occasion de booster le capital sympathie d’une entreprise.
S’installer en province est aussi un moyen de réduire ses charges. Coût de location et d’entretien des bureaux, prestations diverses… les économies peuvent être importantes, et il est ainsi plus facile d’atteindre le seuil de rentabilité.
Enfin – et c’est sans doute l’argument le plus fort pour attirer les talents – la qualité de vie (prix de l’immobilier, proximité avec la nature, stress, pollution…) proposée aux salariées en province est très souvent supérieure à celle de la vie francilienne. Tout cela, à rémunération et challenge professionnel équivalents !
Priorité aux talents
C’est la qualité d’un produit ou d’un service qui fait la force d’une organisation. Cette qualité est directement liée aux femmes et aux hommes qui constituent l’entreprise. N’oublions pas qu’une entreprise est d’abord un projet humain. Cette vision entrepreneuriale justifie à elle-seule la stratégie d’implantation de l’organisation.
Pour attirer les meilleurs profils – et donc bénéficier de leur talent dans le développement de l’activité -, il faut pouvoir leur proposer une expérience professionnelle différenciante. Cela inclut à la fois la nature même du projet d’entreprise (son ambition, ses valeurs, son impact sociétal) et le cadre de vie (offre locale, équilibre avec la vie personnelle, pouvoir d’achat…).
L’avenir n’appartient-il pas aux entreprises qui mettent la qualité de vie de leurs collaborateurs au cœur de leur projet ? Quelque chose nous dit que dans cette perspective, les dirigeants qui font le choix d’une implantation régionale sauront tirer leur épingle du jeu. Le virage est amorcé : Paris n’est plus la seule à faire rêver les talents.
