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« La France rattrape (enfin) son retard dans l’offre de produits d’assurance digitale »

"La France dispose de toutes les cartes pour rattraper son retard et réclamer sa place de nation digitalisée pour les produits d’assurance"

Tribune. Malgré l’effervescence de la fintech et de l’assurtech ces dernières années, l’on remarque que le secteur de l’assurance français a longtemps accusé sur la scène européenne, un retard palpable. En 2021, encore seul 10% des souscriptions d’assurance dans notre pays étaient opérées en ligne et plus d’un tiers des assurés se rendaient encore en agence. Un pourcentage qui contraste avec nos voisins européens qui nous dominent nettement puisqu’ils sont 49% à avoir souscrit en ligne au Royaume-Uni, suivi des Pays-Bas (37%), de l’Allemagne (14,5%) ou même de la Hongrie (11%).

Une étude Deloitte de 2021 déclare pourtant que 49% des Français considèrent le digital utile pour leur recherche d’informations, mais seuls 16% d’entre eux utilisent le digital dans le cadre de la souscription d’un contrat. Une situation très française qui s’explique par plusieurs raisons : la lenteur de la transformation digitale dans les grands groupes d’assurance, à la fois liée aux procédures internes (conformité, prises de décision et système d’informations complexes) mais aussi à la priorisation des investissements dans cette typologie de structure (utilisation des ressources financières pour des projets rentables à court-terme).

À noter qu’un autre facteur participe au ralentissement de la digitalisation : le rôle des intermédiaires (agents, courtiers) qui tirent une partie de leurs revenus de la signature d’un contrat et qui peuvent percevoir la digitalisation comme un concurrent.

Alors que la pandémie a largement accru l’usage d’interfaces digitales, les acteurs des services ont depuis, embrassé massivement la transformation digitale. Ainsi, dans l’hexagone comme en Allemagne, ce sont les banques en ligne ou néo-banques qui ont parfaitement compris le changement de paradigme en cours et qui ont su prendre le tournant du numérique. Cette digitalisation massive et visible de leurs services (citons Lydia, Revolut) contraste néanmoins particulièrement avec la lenteur du virage numérique entrepris par les acteurs traditionnels des assurances et des mutuelles.

Même les grandes banques traditionnelles qui, spécificité française à nouveau, gardent un nombre conséquent d’agences ayant pignon sur rue, emboîtent le pas aux néo-banques dans le développement de leur offre digitale. Ainsi, 54% des Français se sont rendus en agence pour ouvrir un compte bancaire en 2022 contre 48% en 2023, preuve de cette dynamique.

Le retard qui a été celui des grands assureurs dans le tournant numérique n’est donc pas seulement imputable à des clients qui seraient réfractaires aux nouvelles pratiques mais bien aux entreprises du secteur qui n’investissent pas encore assez vers une transformation efficiente de leurs services en ligne.

Cependant, une nouvelle concurrence, calquée sur les néo-banques, pousse de plus en plus les assureurs traditionnels à accélérer pour offrir une meilleure expérience à leurs utilisateurs. Ces « assurtech » qui bousculent les codes du marché français viennent contraindre les assureurs traditionnels à accélérer leurs investissements mais aussi à développer de nouveaux produits pour inciter toujours plus d’assurés de tout âge à passer le cap de la souscription.

Cependant, la construction de certains produits, notamment en assurance prévoyance où plusieurs types de garanties (décès, invalidité, incapacité…) peuvent être regroupés au sein d’un même contrat rendent difficile la digitalisation individuelle des produits. En restructurant les produits existants, les acteurs innovants proposent donc des services permettant dans la durée de créer de nouvelles parts de marché dans un secteur de l’assurance qui a pendant longtemps semblé immobile.

La France dispose de toutes les cartes en main pour rattraper son retard et réclamer sa place de nation digitalisée pour les produits d’assurance. Outre la nécessité pour les grandes entreprises d’assurance de décupler leur recherche et développement, les pouvoirs publics ont aussi un rôle central pour accompagner la croissance et le financement de projets et de structures innovantes par le biais de prêts ou d’investissements publics. Le recours de plus en plus fréquent à l’intelligence artificielle dans le secteur tertiaire promet aussi une évolution des standards de gestion des contrats et une accélération des activités numériques de l’ensemble des services. D’autre part, les intermédiaires tels que les courtiers ou les agents, doivent, pour pérenniser leur activité, embrasser la digitalisation des produits et services vendus à leur clientèle, en alliant digital et humain pour faciliter la souscription et pour garantir leur survie à long terme.


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