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Jacques de Peretti, président d’Axa France : « Passer d’un statut de payeur à celui de partenaire »

Jacques de Peretti préside AXA France, leader de l’assurance au niveau national, depuis 2016. Son ambition : transformer le rôle de l’assureur de payeur à celui de partenaire de ses clients.

Entreprendre - Jacques de Peretti, président d’Axa France : « Passer d’un statut de payeur à celui de partenaire »

Diplômé de l’École Polytechnique, de l’École Nationale Supérieure d’Aéronautique et de l’Espace et de l’Institut d’Études Politiques de Toulouse, Jacques de Peretti préside AXA France, leader de l’assurance au niveau national,  depuis 2016. Son ambition : transformer le rôle de l’assureur de payeur à celui de partenaire de ses clients.

Quels sont les impacts de la révolution numérique dans le secteur de l’assurance ?

Comme l’ensemble des secteurs, le numérique est susceptible de bouleverser l’ensemble de la chaine de valeur. Du point de vue de la distribution, on constate que la percée de la distribution directe par internet est bien moins rapide que ce que certains anticipaient il y a quelques années. Pour ce qui est du service, le constat est différent : le client attend désormais de pouvoir interagir avec son assureur en temps réel et via son canal préféré.  Le multi-accès est devenu la norme, nous tirons parti de ces nouveaux outils afin de mieux servir nos clients afin de produire mieux et pour moins cher.
Les actuaires sont depuis longtemps de grands utilisateurs de l’outil numérique. Ils ont d’ailleurs permis aux assureurs de prendre le virage de la data assez rapidement en infusant leur culture de l’ensemble des organisations.

Quelles réflexions avez-vous conduit concernant le modèle de distribution ?

Notre réseau de proximité de plus de 6000 Agents, experts de la protection et de la prévention des risques, installés partout en France, constitue un actif stratégique.  Nous travaillons pour le faire évoluer afin qu’il soit plus adapté et plus agile dans un monde numérique.

Nous sommes dans un secteur particulier où le client choisit d’acheter un service avant qu’il ne soit produit. Il est fondamental que nos assurés comprennent bien les garanties de leurs contrats dès la souscription pour qu’il ne subsiste pas de malentendu au moment où nous produisons le service auquel nous nous engageons. Dans ce contexte, j’ai la conviction que le conseil personnalisé reste aujourd’hui la meilleure solution pour satisfaire nos clients sur le long terme.

Nos réseaux accompagnent aussi les clients dans la gestion de leur patrimoine. Pour cela, il est de plus en plus nécessaire d’adopter une stratégie globale afin de prendre en compte la fiscalité, répondre aux futurs besoins, et couvrir les éventuels aléas de la vie. J’ai la conviction que rien ne remplacera le contact humain pour délivrer ce type de conseil qui peut avoir un impact substantiel sur la situation de nos assurés.

Une refonte des produits d’assurance est-elle inévitable ? Comment AXA France répond-il aux changements sociétaux ?

Les assureurs ont toujours su s’adapter aux évolutions sociétales, économiques, réglementaires, et technologiques. Je n’ai pas de crainte sur le fait que nous arriverons collectivement à relever les futurs défis qui s’annoncent.

Les évolutions des usages et les réflexes des consommateurs liés à l’usage du numérique, créent  de nouvelles attentes. Nous avons ainsi fait évoluer nos contrats auto et multirisques habitation afin de les rendre plus simples, plus lisibles, plus innovants, et proposer des tarifs plus  compétitifs.

D’offres packagées, nous sommes passés à des  offres modulables en fonction des besoins : le client bénéficie d’un socle de garanties solides auxquelles il peut choisir de rajouter de nombreuses options à la carte, et ce en toute transparence puisque le tarif associé à chacune de ces options est clairement indiqué. Nous avons donc lancé, il y a un an et demi, « Ma Maison », et il y a 6 mois, « Mon Auto ».

Les évolutions technologiques nous permettent de mieux connaître nos risques et limiter l’impact des sinistres. La diffusion de message de prévention par exemple avant une tempête annoncée nous permet déjà de mieux accompagner nos assurés dans la prévention des risques et donc de réduire les dégâts, avec un bénéfice partagé. Nous avons ainsi envoyé 6 millions d’alertes météo par SMS cette année à nos clients. Pour aller plus loin, les objets connectés pourraient nous permettre, à l’avenir, de détecter les sinistres de façon plus précoce, et donc d’agir plus rapidement.

Concernant les changements sociétaux, nous avons réinventé notre métier d’assureur en développant des partenariats clés pour couvrir les besoins des travailleurs et des usagers de la nouvelle économie. Nous avons ainsi des partenariats avec des entreprises leaders du secteur de la trottinette électrique et nous proposons des garanties responsabilité civile qui couvrent les accidents matériels et corporels qui pourraient être causés par les utilisateurs d’une trottinette électrique.

Nous proposons également aux plateformes de l’économie numérique, des assurances prévoyance adaptées aux besoins des travailleurs de cette nouvelle économie qui couvrent les arrêts de travail, les invalidités permanentes et les décès.


Comment avez-vous repensé le dispositif relationnel et l’expérience client ?

A la fois par une extrême vigilance sur la qualité de service et par la modernisation, la simplification, et la digitalisation des processus et des parcours client pour créer plus de points de contact avec nos clients et faire en sorte que chaque interaction soit simple, rapide et que les dossiers soient traités de façon optimale de bout-en-bout.

Nous avons également développé plus services à valeur ajoutée à destination des entreprises et des particuliers : ces services, qui doivent nous permettre de passer d’un statut de « payeur » à celui de « partenaire », touchent à de nombreux domaines tels que la santé, je pense notamment à la téléconsultation médicale, mais aussi aux services de prévention ; ou les risques d’entreprise par exemple avec  le service « crise majeure ».

Considérez-vous les géants mondiaux du numérique (GAFA, BAXT) comme des concurrents ? Des partenariats sont-ils souhaitables ?

Nous sommes un secteur très régulé et nous souscrivons à des engagements souvent pour plusieurs décennies. Ces deux raisons me conduisent à penser que notre domaine d’activité se distingue assez fortement de ceux des géants du numérique.

Les géants du numérique disposent d’un accès direct aux clients et peuvent y associer une gigantesque quantité de données. A l’avenir, ce positionnement pourrait faire de ces acteurs des distributeurs d’assurance auxquels nous pourrions nous associer si c’est opportun. 

Les Assurtechs et les InsurTechs françaises constituent-elles une menace ?

Les Assurtechs n’ont pas encore permis d’apporter de service réellement différenciant qui mettrait en danger notre activité. Certains acteurs proposent cependant des briques innovantes dans la chaine de valeur. Nous sommes en partenariat avec certains de ces acteurs et je vois de façon très positive les évolutions qu’ils pourraient apporter au secteur.

Les Assurtechs sont une opportunité pour le secteur car elles nous obligent à nous recentrer sur l’efficacité avec laquelle nous répondons aux besoins des clients. Nous améliorons ainsi, de façon continue, la simplicité de nos parcours et nous nous engageons résolument dans la transformation digitale pour rendre nos produits, nos conseils et notre assistance accessibles depuis n’importe quel canal. Au-delà des défis techniques, il s’agit pour AXA de devenir non plus un organisme payeur qu’on sollicite dans l’urgence, mais un véritable partenaire présent à tous les moments-clés de la vie de ses assurés… en les rendant confiants, tout simplement.

Comment résister à une concurrence de plus en plus protéiforme ?

Du fait de ses spécificités, le secteur de l’assurance est fortement régulé. Les acteurs doivent donc se conformer au cadre existant. La concurrence porte donc essentiellement sur les produits distribués et les modalités de contacts avec les clients.

En complément de réseaux traditionnels de distribution, la distribution d’assurance couplée à des services ou à des biens pourrait se développer. Nous croyons à ce modèle qui permet de renforcer la proposition de valeur de ces biens et services.  Nous sommes déjà partenaires de beaucoup d’acteurs de ces marchés. Je pense que ces acteurs resteront adossés aux assureurs traditionnels sur le long terme.

Comment réagissez-vous face aux changements réglementaires qui touchent votre profession ?

En tant qu’assureurs, nous avons un rôle à jouer pour faire avancer les réflexions en matière réglementaire : c’est pour cela que nous prenons une part active aux réflexions en participant à des groupes d’experts, des tests de terrain et à des consultations au niveau européen comme au niveau international.

Notre implication doit nous permettre de sensibiliser les régulateurs aux enjeux de convergence mais aussi de faire en sorte que les changements règlementaires ne créent pas de distorsion au sein de l’environnement concurrentiel, en imposant des contraintes sur certains acteurs et pas sur d’autres.

Que pensez-vous de la loi Pacte et de ses conséquences ?

J’ai la conviction que toutes les évolutions qui permettent d’inciter les Français à anticiper leur retraite et à la préparer, sont positives. Nous sommes aujourd’hui les premiers sur le marché de la retraite grâce à nos réseaux experts avec lesquels nous continuerons à conseiller et à accompagner nos clients dans tous leurs moments de vie, et notamment la retraite pour qu’ils la préparent, et la vivent, avec la plus grande sérénité. Nous pensons que la clé sera dans le conseil : ce sont les réseaux de distribution les plus experts et les mieux formés qui seront les plus à même de conseiller les clients et de répondre véritablement à leurs besoins dans un domaine aussi complexe et aussi changeant.

La loi PACTE vise à rendre l’épargne retraite plus attractive et à mobiliser les ménages français sur la nécessité d’épargner pour leur retraite. Ils doivent anticiper une chute de leur revenu à la retraite du fait de la dégradation des régimes obligatoires. Ils seront également confrontés à l’augmentation de l’espérance de vie et donc du nombre d’années vécues à la retraite et à financer. La sortie en capital à la retraite rend le PER attrayant, mails il nous faut continuer à sensibiliser nos clients sur les vertus de la rente et sur les nombreuses modalités de rente que nous offrons pour épouser les projets de vie de nos clients. La rente reste en effet la solution la plus adaptée face au risque de l’allongement de la durée de vie.

Propos recueillis par Isabelle Jouanneau


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