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« Deux ans de télétravail contraint, et après ? »

Entreprendre - « Deux ans de télétravail contraint, et après ? »

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Par David Mahé, président-fondateur de Human & Work

Tribune. Le défi des entreprises n’est plus la réactivité face à la crise sanitaire mais la fidélisation et la remobilisation des collaborateurs. Pour répondre à ces enjeux, le futur du travail est à inventer dès à présent.

Après deux ans de crise sanitaire et de télétravail généralisé et contraint, le sentiment qui prédomine dans les entreprises est la lassitude. Alors que l’on entrevoit la fin de l’épidémie, que va-t-on garder de ces deux ans ?

D’abord, le souvenir d’une expérience inédite, que chacun d’entre nous aura vécue à la fois collectivement mais aussi intimement, violemment et intensément. Ensuite, une accélération des tendances déjà à l’œuvre dans le monde du travail : la place croissante du digital, un virage de plus en plus sensible vers l’individualisation, l’entrée dans les mœurs du travail à distance et l’émergence de nouvelles attentes sociales vis-à-vis du travail et de l’entreprise. Et puis enfin, une page blanche, sur laquelle il convient d’imaginer le futur du travail : nouvelles pratiques managériales bien sûr, mais aussi nouveaux outils, nouvelles organisations, lieux et rythmes repensés. Avec un impératif que nous devons collectivement nous fixer : ce futur du travail sera forcément plus inclusif, plus responsable et plus serein.

Le spectre de la Grande Démission ?

En 2022, l’enjeu prioritaire des entreprises est de fédérer, fidéliser et remobiliser leurs équipes.

Aux États-Unis, et l’on observe peu à peu le même mouvement en Europe, les entreprises sont confrontées depuis quelques mois à un phénomène d’ampleur, qualifié par les médias de « Grande Démission ». Concrètement, des millions de salariés décident chaque semaine de quitter leurs emplois, faute de sens, de management de qualité, de projet excitant, ou encore de rémunération attractive.

Or, dans le contexte de rebond de croissance que nous connaissons, les entreprises ont justement besoin de toutes leurs ressources pour produire, s’adapter et se développer. La nécessité de prendre soin des salariés, de renforcer la culture d’entreprise et de veiller à la cohésion des équipes prend alors tout son sens.

Retrouver la cohésion d’équipe

Il est vain de croire, après deux ans de crise sanitaire, que les salariés vont se contenter de reprendre leur vie d’avant. L’expérience des confinements et du recentrage forcé sur l’intime, la vie de famille et l’individu a déplacé le centre de gravité des attentes. Les salariés veulent plus que jamais savoir pourquoi ils se lèvent le matin et trouver du sens à leur travail. Ils veulent aussi exercer leur emploi dans de bonnes conditions, indispensables pour y trouver du plaisir, et enfin, participer à une œuvre collective, en cohésion avec une équipe.

En réponse à ces nouvelles attentes, la vision et le projet collectif proposés par l’entreprise sont clés. Il s’agit pour les équipes dirigeantes de sortir enfin de la réactivité dont elles ont dû faire preuve depuis deux ans pour projeter l’ensemble des salariés dans le long terme, en réaffirmant la mission et l’utilité de l’entreprise, ses valeurs et partis-pris en termes de stratégie et de management.

Une culture d’entreprise ne se résume pas à des mots, elle doit se matérialiser par des expériences. Et c’est maintenant que nous pouvons – que nous devons – recréer des moments de cohésion collective, réapprendre à travailler ensemble, redéfinir des process et des organisations.

Les nouvelles organisations du travail

Le télétravail a apporté un certain nombre de bénéfices aux salariés : gain de temps habituellement dévolu aux transports, meilleur équilibre vie professionnelle / vie personnelle, voire même meilleure productivité individuelle. Mais il a également engendré des conséquences délétères : management à distance trop contrôlant, perte de lien social, faiblesse du collectif. Globalement, le télétravail est un format qui convient pour faire ce que l’on sait déjà faire. En revanche, il n’est pas adapté pour inventer le futur du travail et transformer la réalité d’hier et aujourd’hui.

Il est ainsi plus difficile à distance d’intégrer de nouvelles recrues, d’inventer de nouvelles choses, de piloter des projets en dehors des clous ou de créer du lien avec ses collègues. Puisque le télétravail est amené à se pérenniser, il convient de l’assumer clairement et de l’intégrer au fonctionnement régulier de l’équipe. L’enjeu consiste donc désormais à définir les tâches que l’on peut réaliser efficacement en télétravail et celles qui devront être faites en présentiel. A reconnaître, en somme, qu’à chaque mode de travail correspondent des missions spécifiques.

Faire évoluer les pratiques et les compétences managériales

Pour mettre en place ces nouvelles organisations de manière efficace, il convient en priorité de faire évoluer les pratiques managériales. Dans le futur du travail, manager c’est déléguer davantage, démontrer plus de confiance à ses équipes et accepter de lâcher prise. C’est aussi être capable de mieux écouter et d’identifier – souvent à distance – des situations de fragilité ou de démotivation. C’est prendre le temps de prendre soin des gens, de s’intéresser à eux, de voir où ils en sont dans leur carrière et de leur montrer de l’attention.

Au niveau collectif, manager demain, c’est animer les équipes et obtenir la participation de toutes et tous aux moments et routines de la vie de l’entreprise. Cela passera nécessairement par une évolution de la sélection des managers autour de nouvelles qualités et compétences, de celles que l’on qualifie de « soft skills », au premier rang desquelles les compétences émotionnelles et relationnelles.

Le bien-être des salariés, nouvelle préoccupation clé des DRH

Ce futur du travail passera également par une amélioration des conditions de travail, y compris matérielles. L’hygiène de vie des collaborateurs a des conséquences directes sur leur productivité et peut être mise à mal en situation de télétravail (mal de dos, sédentarité, alimentation).

Enfin, cela devra passer par des services destinés à améliorer le bien-être global des salariés : la crise du Covid a permis de souligner le rôle essentiel que peut jouer l’entreprise dans la santé de ses collaborateurs, en leur proposant notamment un soutien psychologique et/ou social en cas de mal-être, qu’il s’agisse de dépression, de burn-out ou même d’anxiété.

Disposer de bonnes conditions de travail permet de bien faire son travail ; la fierté du travail bien fait est une condition indispensable pour éprouver du plaisir, voire du bonheur au travail. Au final, ce que révèlent la période que nous vivons et les évolutions en cours dans l’organisation du travail, c’est que ce n’est pas le nombre de jours de télétravail par semaine qui importe, mais bien le sens que nous souhaitons donner à notre travail dans les années à venir.


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