Alors que les petites entreprises subissent de plein fouet ce second confinement et que les grands assureurs se cantonnent à défendre leurs positions contre l’État et les risques d’indemnisation, la mutuelle Garance a annoncé renforcer sa plate-forme gratuite de conseils et de services aux professionnels et TPE-PME. Au-delà de l’information, l’entreprise compte prendre en main la pérennité économique de son marché.
Ce second confinement s’annonce particulièrement difficile pour les petites entreprises. Non seulement elles sont nombreuses à avoir épuisé leurs réserves, quitte à s’endetter, entre mars et juin, mais en outre les pouvoirs publics, qui ont pris la mesure de la vitesse à laquelle l’épidémie pouvait repartir, comptent sur un déconfinement beaucoup plus progressif que le premier. Les restaurants, par exemple, ne rouvriront que le 20 janvier dans les meilleures conditions d’évolution de l’épidémie.
Quand bien même de nombreux dispositifs d’aide ont été mis en place par les pouvoirs publics, ils permettent souvent à peine d’aider les entreprises fermées administrativement à faire face à leurs coûts, et sont trop épars et complexes d’accès pour ne pas peser sur le rythme d’activité de celles restées ouvertes.
Face au désemparement des petites entreprises, il est certains acteurs dont le silence détonne avec leur engagement habituellement affiché. Les assureurs, acteurs complémentaires majeurs du système de protection sociale, ont largement subi l’épidémie et ses conséquences plutôt qu’ils ne les ont affrontées. En assurance de biens, leur image a été ternie par les contentieux à répétition en matière d’application des garanties de pertes d’exploitation (qui compensent les manques à gagner en cas d’inactivité de l’entreprise), particulièrement avec le secteur de la restauration.
De leur côté, les assureurs santé (qui indemnisent beaucoup de soins de ville et une partie des frais d’hospitalisation) ont été pris de cours par les pouvoirs publics. Accusés d’avoir réalisés des économies à la faveur du confinement (du fait de la privation des soins courants et du report des soins hospitaliers), ils se sont vu imposer une taxe exceptionnelle d’un milliard d’euros en 2020, et d’autant l’an prochain. Les fédérations d’assureurs ont objecté, en vain, le caractère hâtif de cette taxe, qui ne prend notamment pas en compte la possibilité de voir les impayés se multiplier du fait d’une crise économique consécutive à la crise sanitaire.
Toujours est-il que leur réaction s’est bornée à subir les conséquences de cette crise plutôt qu’à les devancer. Sur la plupart des sites des grands assureurs, les plus récentes des publications destinées à accompagner leurs entreprises assurées contre l’épidémie datent de juin.
Ce silence des grands assureurs permet cependant à des acteurs moins exposés de faire entendre leur voix. C’est le cas de Garance, mutuelle historiquement positionnée sur le segment des indépendants, qui a annoncé par communiqué de presse le renforcement de sa plate-forme « garance-a-vos-cotes.fr ». La mutuelle entend proposer gratuitement aux indépendants et chefs d’entreprise un point d’accès unique à de l’information sous forme de guides, de rubriques thématiques et de conférences en ligne, à du conseil et à des services. Pour ce faire, elle a fait appel à un cabinet d’avocats et à un cabinet d’experts-comptables, dont elle a provisionné des honoraires pour aider les visiteurs de la plate-forme à bénéficier de consultations gratuites ou à prix réduit. Elle a également noué un partenariat avec une agence web pour offrir à ses clients de figurer gratuitement dans un annuaire en ligne, ou de faire concevoir leur site internet à prix préférentiel.
Plus que le contenu de l’initiative de Garance, c’est la prise de position de sa directrice générale, Virginie Hauswald, qui fait son originalité par comparaison au mutisme des grands assureurs : « […] il était inconcevable que nous nous bornions à notre rôle historique d’assureur et de gestionnaire d’épargne. […] C’est aussi une question de responsabilité sociale pour nous. Beaucoup de grandes entreprises se contentent de compter les emplois directs et indirects qu’elles alimentent par leur existence dans leur rapport intégré. Chez GARANCE, parce que nous sommes nos clients, nous savons que nos destins sont liés : assurer leur avenir, c’est assurer le nôtre. »
S’il est trop tôt pour dire si, contrairement à nombre d’assureurs avant elle, Garance parviendra à développer une politique de services rentables (et utilisés), le point de vue de la responsabilité économique des assureurs renouvelle l’idée des champs affinitaires. C’est particulièrement le cas au regard des assureurs mutualistes et paritaires. Historiquement liés à des professions ou à des zones géographiques, beaucoup ont perdu la lisibilité de leur lien aux métiers et territoires dans le mouvement de concentration des acteurs qui a lieu depuis plus d’une décennie sur le marché.
À l’ère des réseaux et du travail à distance, l’avenir de l’identité des assureurs est-il de se lier au devenir économique de leurs assurés ? Cette stratégie devra faire ses preuves, mais l’on peut d’emblée supposer qu’elle sera plus porteuse que la posture de retranchement qu’adoptent les grands acteurs du marché. Dernier exemple en date, les assureurs de perte d’exploitation qui profitent de la période annuelle de renégociation des contrats d’assurance pour en exclure le risque épidémique…