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Loïc Féry, responsable de l’échec du FC Lorient ?

Il a conquis la City de Londres avant de se faire un nom dans le monde du football en reprenant le FC Lorient. Portrait du fondateur du fonds Chenavari (5 milliards d’encours), 50 ans, qui a toujours rêvé d’être entrepreneur et patron d’un club.

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« Le gars qui se retrouve tout seul face à ses doutes, à la difficulté, j’aime ça. » Contrairement à ce qu’on pourrait croire, cette phrase de Loïc Féry ne parle pas de son rapport à l’entrepreneuriat. Elle fait allusion à l’une des passions de l’homme d’affaires français : le tennis. Pour Loïc Féry, du joueur de tennis à l’entrepreneur, il n’y a qu’un pas. Un pas qu’il a franchi il y a plus de deux décennies.

Car c’était écrit, ce grand fan de tennis allait devenir entrepreneur. Nancéien d’origine, aujourd’hui expatrié à Londres avec sa femme — Olivia Gravereaux, une ancienne joueuse de tennis qui occupa la 200ème place mondiale — et ses trois enfants — l’un d’entre eux, Arthur est 253ème joueur mondial —, Loïc a grandi en Ardèche aux côtés d’un père prof de maths et d’une mère prof de sport. Élève brillant, son parcours est limpide : baccalauréat scientifique avec mention très bien, classe préparatoire au prestigieux lycée du Parc, à Lyon, diplômé d’HEC en 1997 (majeure HEC Entrepreneurs).

UNE FIGURE MONTANTE DE LA FINANCE

Celui qui a remboursé le coût de la scolarité à HEC avec ses premiers bonus et en travaillant dans les champs de la vallée du Rhône est aujourd’hui la 398ème fortune française, selon Challenges. Son patrimoine est passé de 170 millions en 2021 à 320 millions en 2023. Mais contrairement à d’autres qui ont tout reçu en héritage, le « self-made-man » lorrain s’est fait tout seul.

À sa sortie d’HEC, il est parti à l’autre bout du monde, à Hongkong, où il découvre le monde feutré des banques d’affaires. Loïc Féry restera cinq années en Asie du Sud-Est en tant que responsable des produits dérivés de crédit à la Société Générale. À Hongkong, sa soif d’entreprendre le rattrape : il fonde un incubateur dont l’objectif est d’aider les jeunes pousses européennes à se développer en Asie. C’est un échec cuisant, mais un échec qui le fait avancer. En 2001, il revient en Europe. Il atterrit à la City de Londres chez Calyon, la banque d’investissement du Crédit Agricole. Spécialisé sur les marchés de crédit, ses résultats sont tels qu’il grimpe rapidement les échelons.

Loïc Féry est alors l’une des figures montantes de la finance européenne. Tout du moins jusqu’au mois de septembre 2007 où l’un des traders de son équipe perd près de 200 millions d’euros… Quelques mois avant l’affaire Kerviel, cette perte colossale scellera son aventure avec Calyon. « J’ai alors appris le cynisme des organisations, passant du statut de « star » à celui de « paria », explique-t-il au Monde en 2011. Cela m’a donné encore plus envie de devenir mon propre chef. » L’entrepreneur qui sommeille en lui se réveille.

CHENAVARI, LE GROS COUP

En 2008, en pleine crise des subprimes aux États-Unis, il lance sa propre structure de gestion d’actifs. Son nom : Chenavari Investment Managers, en référence au Pic de Chenavari, une montagne située en Ardèche. Il a 33 ans lorsqu’il lance cette société spécialisée sur le marché de la dette d’entreprises. Une idée, un financement initial de 40 millions d’euros et le tour est joué. La réussite est au rendez-vous. Les clients — des investisseurs institutionnels (fonds de pension, fonds souverains) — affluent. Chenavari (81 salariés) déclare aujourd’hui 4,7 milliards d’euros d’actifs sous gestion et plus de 300 entreprises européennes financées.

Le siège social du hedge fund de Loïc Féry est implanté à Londres, à dix minutes à pied de Buckingham Palace. La société possède des antennes au Luxembourg, New York et à Paris. Au cours des années 2010, Chenavari a même intégré le top 100 des plus grands hedge funds mondiaux. Mais malgré cette réussite au cœur même de la Mecque de la finance mondiale, Loïc Féry a su garder les pieds sur terre. Un exemple parmi d’autres : il aurait, selon le JDD, recruté son livreur de journaux d’origine pakistanaise au sein du service informatique de Chenavari.

IL AIME LES LICORNES

En parallèle de Chenavari, Loïc Féry a pris des participations dans des jeunes pousses françaises, notamment les licornes Mirakl (e-commerce), Younited Credit (fintech) et Sorare (sportech). La réussite de Chenavari a ouvert des portes à Loïc Féry. L’homme d’affaires a pu réaliser l’un de ses rêves : s’impliquer dans le sport de haut niveau. Après s’être intéressé à plusieurs clubs — Nice en tandem avec un entrepreneur coréen, Nîmes, Grenoble et Sheffield Wednesday (Angleterre) — celui qui a joué pour un club amateur à hongkongaise a finalement jeté son dévolu sur le FC Lorient en 2009 contre un chèque de 15 millions d’euros.

Lui dont le lien avec la Bretagne se résume à quelques souvenirs de vacances à Douarnenez (Finistère) et une amitié avec l’ancien ministre de la Défense et maire de Lorient Jean-Yves Le Drian est devenu le patron d’un club breton historique qui s’apprête à fêter son centenaire. En coulisse, certains lui reprochent une « financiarisation » du club. Le président aux 21 900 abonnés sur X (ex Twitter) et 25 700 sur Instagram s’en défend. Ce qui est certain, c’est qu’il a introduit au sein du club breton une politique salariale propre au secteur de la finance : réduction de la part fixe et importante part variable indexée sur les résultats.

LE FC LORIENT BIENTÔT VENDU À UN MILLIARDAIRE AMÉRICAIN ?

Depuis sa prise de pouvoir, Lorient a navigué entre le bas de tableau et la 7ème place de Ligue 1 et a connu une relégation… avant de descendre à nouveau en Ligue 2 cette année.

Pour pérenniser le club breton dans l’élite, Loïc Féry s’était pourtant mis en quête d’investisseurs susceptibles de l’accompagner. L’année dernière, il s’était en partie désengagé en cédant 40 % des actions du club (10 millions d’euros) au milliardaire texan Bill Foley (77 ans), propriétaire du club anglais de Bournemouth et de l’équipe de hockey de Las Vegas. Un choix qui a suscité quelques interrogations et beaucoup d’inquiétude dans l’entourage du club. Le FC Lorient de Loïc Féry avait-il vendu son âme ?

« Le partenariat avec notre nouvel actionnaire venu des États-Unis semble diabolisé, a résumé Loïc Féry. Son arrivée nous ouvre des portes sans toutefois fermer celles de notre autonomie de gestion et sans compromettre nos valeurs ou notre identité. Le FC Lorient ne deviendra pas une succursale. » Si certains journalistes anglais assurent que Foley se dirige vers une prise de contrôle à moyen terme, le président des Merlus semble parti pour rester l’actionnaire principal jusqu’en 2026.

Victor Cazale


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