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Les franchiseurs doivent protéger les actifs de propriété intellectuelle de leur réseau

La protection efficace de la marque et des éléments d’identité visuels du concept (marque, slogan, charte graphique et architecturale) sont essentiels au développement et au succès d’une franchise. En effet, c’est la marque et l’identité visuelle qui permet à la franchise de se distinguer de la concurrence et de rallier la clientèle.

Vanessa Bouchara, fondatrice du cabinet d’avocats Bouchara & Avocats, Spécialiste de la propriété intellectuelle.

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Par Vanessa Bouchara, fondatrice du cabinet d’avocats Bouchara & Avocats, Spécialiste de la propriété intellectuelle.

Au-delà de l’importance pour les franchiseurs de protéger de tels actifs essentiels, le contrat de franchise devra encadrer l’usage par les franchisés des droits de propriété intellectuelle du franchiseur.

La protection de l’identite visuelle de la franchise par les droits de propriete intellectuelle

Ce qui marque l’identité visuelle d’un concept commercial peut être protégé, selon les cas, par le droit des marques, le droit des dessins et modèles et le droit d’auteur, mais aussi opposé sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire si nécessaire.

La protection par le droit des marques

La marque est une composante essentielle du réseau qu’elle identifie. Elle peut être verbale, figurative, peut s’appliquer au réseau en tant que tel ou à certains produits ou services qu’il propose.

Pour être protégée, la marque devra d’abord être disponible, donc ne pas porter atteinte aux droits de tiers. Pour s’en assurer il convient de réaliser une étude de disponibilité de la marque envisagée avec analyse des droits antérieurs. Cette analyse doit être réalisée par un professionnel, qui donnera un avis circonstancié sur les éventuels risques relevés.

La marque devra également être distinctive, ce qui signifie qu’elle devra être en mesure de distinguer les produits ou services proposés par le titulaire de ceux de ses concurrents. C’est un élément central puisqu’une marque non distinctive n’est pas protégeable. C’est ainsi qu’un franchiseur n’a pas pu interdire à son ancien franchisé d’exploiter HOME SITTING alors que ce terme était proche de celui qu’il exploitait dans le cadre du contrat de franchise (CA Dijon, 5 mai 2022, 20/01502).

Enfin, la marque devra, pour sécuriser le réseau, appartenir au franchiseur. Il y a régulièrement des contentieux à ce sujet. Très récemment, le fondateur du réseau de boulangeries « Le moulin de la vierge » resté titulaire des marques, a obtenu en justice, contre le fonds d’investissement ayant pris le contrôle de ses sociétés d’exploitation, l’interdiction d’exploiter la marque « Le moulin de la vierge » et des dommages et intérêts sur le fondement de la contrefaçon (CA Paris, 19 avril 2023, 21/06272).

La protection par le droit des dessins et modèles

Le droit des dessins et modèles protège l’apparence d’un produit ou d’une partie d’un produit. Il convient de réaliser des dépôts spécifiques de droits auprès des offices de marques.

Un franchiseur pourra ainsi déposer des modèles ou créations spécifiques, mais également la charte architecturale de ses magasins. Ainsi, APPLE protège par le biais des dessins et modèles la charte architecturale de ses magasins.

La protection par le droit d’auteur

De nombreux éléments du concept commercial d’un franchiseur peuvent être protégés par des droits d’auteur, tels que son slogan, sa charte graphique et architecturale, son logo etc…

La protection par le droit d’auteur ne suppose aucune formalité de dépôt. Ne sont protégeables que les créations originales, c’est-à-dire celles qui portent l’empreinte de la personnalité de leur auteur et ont fait l’objet de choix libres et créatifs.

Il est essentiel pour la tête du réseau de se faire céder les droits d’auteur des prestataires (designer, architectes etc…) ayant réalisé par exemple le logo, le mobilier et/ou l’agencement des points de vente de façon à pouvoir par la suite répliquer ces éléments en tant que de besoin. Il en va de même s’ils ont été créés par un salarié du franchiseur. Il devra veiller à se faire céder les droits. A défaut, il ne sera pas titulaire de droits.

L’action en concurrence déloyale et parasitaire

Il est parfois possible de faire sanctionner l’atteinte à ses droits par le biais d’une action en concurrence déloyale (qui sanctionne les agissements contraires aux usages loyaux du commerce, notamment lorsqu’un risque de confusion est créé avec le produit d’un concurrent) et/ou parasitaire (qui sanctionne le fait de se placer dans le sillage d’un opérateur économique, sans bourse déliée en profitant indument de sa notoriété ou de ses investissements).

C’est ce qu’a récemment décidé la Cour d’appel d’Aix-en-Provence à propos d’un ancien candidat-franchisé de l’enseigne « Les 3 Brasseurs » qui a été condamné sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire pour avoir notamment ouvert sous l’enseigne « Chez le Brasseur » un restaurant qui reprenait l’emplacement du local, et les codes esthétiques et conceptuels du franchiseur, avec la complicité d’autres franchisés (CA d’Aix-en-Provence, 9 février 2023, 19/12866).

La protection de l’identité visuelle de la franchise par le contrat de franchise

Le contrat de franchise permet au franchiseur de définir précisément les usages autorisés de ses éléments d’identité visuelle par le franchisé pendant l’exécution du contrat, mais aussi de mettre à la charge du franchisé certaines obligations si celui-ci quitte le réseau.

Il est essentiel que le contrat de franchise encadre les usages des droits de propriété intellectuelle du franchiseur par le franchisé.

Ces différentes clauses garantiront au franchiseur un usage uniforme de ses codes esthétiques par l’ensemble des franchisés du réseau et respectueux de son identité visuelle.

Par ailleurs, il convient d’anticiper dans le contrat de franchise la période suivant la rupture de la relation commerciale entre le franchiseur et son ancien franchisé.

Le contrat devra, notamment, comprendre une clause détaillant les éléments d’identités du concept devant être modifiés ou supprimés pour prévenir le risque de confusion entre le point de vente sorti du réseau et le concept du franchiseur.

Par exemple, un ancien-franchisé de l’enseigne ELEPHANT BLEU avait souscrit à l’obligation de ne plus utiliser les signes distinctifs du réseau et de repeindre sa station de lavage automobile avec d’autres couleurs que le bleu et blanc, faisant référence à l’enseigne. Il a été condamné à 50.000 euros de dommages et intérêts pour ne pas avoir respecté cette obligation contractuelle (CA Colmar, 3 juin 2015, n°14/03031).

Protéger les actifs de propriété intellectuelle et l’usage de ceux-ci par leurs franchisés pendant la durée du contrat et à son terme est incontournable. Il en va de l’identité du réseau qui doit être une considération centrale du franchiseur.

Vanessa Bouchara
Fondatrice du cabinet d’avocats Bouchara & Avocats, Spécialiste de la propriété intellectuelle.


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