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L’Afrique, un continent aux déséquilibres paradoxaux

Entreprendre - L’Afrique, un continent aux déséquilibres paradoxaux

Par Cédric Leboussi, fondateur du Cercle des Libéraux

Tribune. Malgré la dégradation du contexte politique et le déséquilibre social marqués sur le continent, les investissements étrangers en Afrique sont restés bien orientés en 2022. Les investissements directs étrangers vers les pays africains ont atteint un niveau record de 83 milliards de dollars, soit un rebond de 113 %, selon le rapport 2022 sur les investissements de la Cnuced publié le 9 juin 2022. Après une chute en 2020 avec le choc de la crise sanitaire, les investissements directs étrangers semblent donc avoir retrouvé le niveau d’avant la pandémie.

Et pourtant, de nombreux pays africains sont classés parmi les mauvais élèves de l’indice de perception de la corruption publié par Transparency International. Ce diagnostic heurte la conception communément admise sur l’impartialité que devrait manifester un État efficace et légitime ; une situation qui choque les bonnes consciences scandalisées par les « biens mal acquis » ou les charitables « mallettes » des despotes.

Les coûts additionnels dus à la corruption sont évalués en Afrique à un montant situé entre 10 et 30 % de la valeur des transactions. À l’évidence, ces coûts sont difficiles à calculer précisément en raison du secret qui entoure ces opérations et aussi parce que les distorsions induites ne sont guère mesurables.

Le bilan des tentatives de lutte contre la corruption en Afrique est mitigé. La panoplie des mesures que l’on retrouve dans les programmes de lutte tourne autour des mêmes thèmes : contrôler la dépense publique, refondre la législation, resserrer la gestion des entreprises publiques, assainir le climat des affaires et la mauvaise gouvernance.

Comment peut-on organiser de grands forums et rencontres dans des pays où les dirigeants politiques ne respectent pas les constitutions ? À l’échelle mondiale, le continent concentre plus de la moitié de l’extrême misère. Le bilan dressé à longueur de rapports sur la situation du continent reste bloqué sur les retards qu’il ne parvient pas à résorber. Un chiffre suffit souvent à les résumer : 40 % de la population africaine, soit plus de 400 millions de personnes, vit encore en dessous du seuil de l’extrême pauvreté, fixé à 1,90 dollar par jour (1,70 euro) selon les critères internationaux. Pourquoi certains pays semblent-ils condamnés à l’échec ? Dans un ouvrage paru en 2007 et qui avait fait grand bruit, « The Bottom Billion » (« le milliard des laissés-pour-compte »), Paul Collier, professeur d’économie à l’université d’Oxford, avançait quatre raisons : la répétition des conflits, la fameuse malédiction des matières premières, l’enclavement au milieu de voisins nuisibles et la mauvaise gouvernance.

De nos jours, ces raisons sont encore plus visibles avec les réseaux sociaux. De nombreux lanceurs d’alerte dans les pays africains n’hésitent plus à montrer l’opulence dans laquelle certains dirigeants africains vivent ou simplement le non-respect des normes environnementales de certains industriels sur le continent. Je sais que des progrès ont été réalisés, mais à un rythme bien plus lent que dans les autres régions en développement, en particulier l’Asie. Et ce rythme lent est caractérisé par une « mauvaise gouvernance » qui ne se résume pas à un phénomène de surface, elle n’est pas une pathologie mais une composante d’un système global. Les pays africains ne sont pas des pays qui seraient « riches s’ils n’étaient pas malades ». Ils sont structurellement différents quant au mode de fonctionnement de leurs systèmes de régulation sociale. Leurs singularités de fonctionnement font que les réformes préconisées impliquent nécessairement des ruptures dont l’issue est incertaine, tant les résistances sont puissantes.

Cependant, on peut croire que le rapport de forces pourrait évoluer dans les prochaines décennies dans le sens de l’assainissement des pratiques immorales.

Cédric Leboussi


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