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La France en 2030 : pourquoi elle pourrait dépasser l’Allemagne

Les forces de la France, souvent rappelées, sont et demeurent, même au lendemain de la pandémie, nombreuses. Surtout pour des citoyens qui, comme moi, fréquemment en déplacement, découvrent et gardent en mémoire l'image très favorable dont bénéficie la France à l'étranger, et qui finissent par s'interroger pourquoi, avec autant d'atouts, elle ne réussit pas davantage.

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La France affiche tout d’abord la démographie la plus favorable parmi les grands pays européens. Avec toujours presque 2 enfants par femme, les actuellement 67 millions de Français devraient atteindre les 71 millions en 2050 et dépasser, peu après, l’Allemagne, en baisse significative par rapport aux 82,8 millions d’habitants d’aujourd’hui. Et même si, en France comme dans le reste de l’Europe, la pyramide des âges se déplacera également davantage vers les seniors, le nombre des Français « en âge de travailler » et de consommer restera bien plus favorable que dans d’autres pays.

Capacité d’attraction et de séduction

Ensuite la France jouit mondialement d’une forte capacité d’attraction et de séduction. Avec 27 millions de touristes étrangers en 2017, elle occupe la position de leader mondial, et l’organisation des Jeux Olympiques en 2024 va amener de nombreux visiteurs supplémentaires.

Tout en visitant ses sites touristiques mondialement connus (tels que la Tour Eiffel, le musée du Louvre, mais également le château de Versailles, les châteaux de la Loire, les Parcs Eurodisney, d’Astérix et du Futuroscope, les plages du débarquement, et tous ces paysages extraordinaires, filmés sur le passage du Tour de France, etc.), ils apprécieront le « style de vie à la française » avec son côté amical et convivial, ses atouts gastronomiques et viticoles.

Attrait de la France

Et, certes contrepartie d’une taxation et surtout de charges sociales (trop ?) élevées, et malgré des inefficacités administratives manifestes et coûteuses, on a tendance à oublier un peu vite les systèmes de santé, scolaire et universitaire français de grande qualité et presque gratuits, à tel point qu’ils attirent de très (trop ?) nombreux bénéficiaires étrangers.

Et puis, au début du quinquennat, grâce à une série de réformes d’Emmanuel Macron, surtout en matière de droit du travail et de formation, et les initiatives du Président pour promouvoir la France et ses atouts (cumulant dans le projet « choose France » et la réception répétée des patrons des grandes entreprises mondiales au Château de Versailles), l’attrait de la France pour les investissements étrangers est reparti à la hausse.

Par contre, le tableau industriel français est plus contrasté, et des forces y côtoient des faiblesses évidentes. Côté positif, le nombre important de grands groupes dans le peloton des leaders européens et même mondiaux (Airbus, Arianeespace, l’Oréal, LVMH, Kering, Hermès, Chanel, Danone, Pernod Ricard, Renault, Peugeot, Michelin, Air Liquide, Sanofi, Véolia, Publicis etc.) ; un système d’institutions bancaires et financières plutôt solides (Crédit Agricole, BNP, Société Générale, Banque Populaire, CIC, AXA, etc.), clairement supérieur à celui de l’Allemagne. Et aussi l’excellence artisanale à la française pour des produits traditionnels (porcelaine, verrerie, cuir, tapisserie, dentelle, mode, etc.) avec un savoir-faire à perpétuer de génération en génération. Puis les 996 000 entreprises créées en 2021 témoignant d’un fort élan pour l’entrepreneuriat. Et, comme le montre la participation française au CES, le salon annuel de référence des nouvelles technologies à Las Vegas aux Etats-Unis, de très nombreuses start-ups et entrepreneurs, dont pas moins de 25 sont devenues des « licornes » et parties à la conquête de Wall Street.

Tout ceci appuyé par des infrastructures (internet 5G, TGV, tunnels, réseau routier…) bien développées et un coût de l’énergie, certes basé sur la forte proportion du nucléaire (70%) et avant la contrainte de vouloir se libérer du gaz russe, parmi les plus bas de l’Europe.
Côté négatif, l’incapacité de la France à éviter, contrairement à l’Allemagne et même la Grande Bretagne, une importante désindustrialisation liée aux nombreuses fermetures d’usines en France et aux délocalisations de sites de production vers les pays à bas coût/salaires.

Et surtout l’incapacité à développer une tranche importante d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) et d’origine familiale (comme le Mittelstand, la vraie force industrielle de l’Allemagne), compétitive, solidement financée et fortement exportatrice.

Côté main-d’œuvre, une productivité horaire parmi les meilleures du monde…et un coût dont l’écart, surtout par rapport à l’Allemagne, redevient positif. Mais un temps de travail et une période d’activité plus courte que celle de la plupart de nos voisins, surtout par rapport aux pays ayant reculé l’âge du départ à la retraite à 65, voire progressivement à 68 ans. Un taux de chômage, quoiqu’en baisse à moins de 8%, déjà en baisse avant le COVID puis, après une remontée temporaire, en chute encore plus forte depuis la reprise économique, mais toujours au double de l’Allemagne. Avec, surtout, un très grand nombre de jeunes sans emploi, décrocheurs et sans aucune formation (là où l’Allemagne réussit grâce à son système d’apprentissage) et une plus faible proportion d’actifs parmi les seniors.

Mais d’où vient donc cette incapacité de la France à profiter pleinement de ses atouts et d’afficher de meilleures performances économiques, en matière de croissance, de balance commerciale, de chômage et d’endettement ? Je déplorerais au moins trois freins importants.

Premièrement l’absence d’un programme économique cohérent d’ensemble avec, en plus, une vision à moyen et long terme. La France avance et recule par à-coups et par mesures ponctuelles, souvent dans l’urgence sous la pression. Les responsables politiques français, avec des changements politiques fréquents, réagissent plus souvent qu’ils n’agissent. Comme, par exemple, en matière fiscale, là où les investisseurs ont besoin d’une visibilité à long terme, la politique française multiplie les changements permanents et imprévisibles.

Deuxièmement, l’absence d’un consensus national, surtout en matière d’équilibre social. La fréquence des conflits sociaux, au sein des entreprises mais également au sein de la société française en général, empêchent un développement serein et focalisé sur des objectifs partagés.
D’un côté, des progrès en matière de loi du travail (plans de sauvegarde de l’emploi, ruptures conventionnelles, compte de formation, assouplissements, etc.) ont incontestablement apporté des voies facilitant, en cas de besoin, des adaptations de structures. De l’autre côté, le nombre de grèves, où la France continue à détenir des records internationaux et où des minorités à la plus grande capacité de nuisance, prennent souvent la majorité des Français, désespérés, en otage (écoles, SNCF, transports routiers, éboueurs, etc.), continuant ainsi à alimenter la perception d’un pays perturbé non réformable.

Enfin et troisièmement, toujours très présent dans la mentalité française, une relation très ambiguë avec la réussite et l’argent qui, pour beaucoup de Français, à tort ou à raison, n’est pas un vrai objectif dans la vie et donc un moteur de comportement au quotidien. Gagner beaucoup d’argent est, pour un footballeur ou une star du show business, normal, mais il est forcément « suspect » de devenir riche ou, encore pire, de naître et de rester riche par héritage.

Soyons clair : pour faire réussir la France, sur un plan national, européen et mondial ( car la mondialisation perdurera…), à court, moyen et long terme, pour la faire profiter davantage de ses très nombreux atouts, pour retrouver une meilleure cohésion sociale au sein d’un pays apaisé, et pour rendre les Français moins déprimés, moins montés les uns contre les autres et susceptibles de retrouver la capacité d’être heureux, des changements importants, parfois très radicaux et novateurs, seront souhaitables, voire indispensables. La suite de cet ouvrage en propose un grand nombre, et leur mise en œuvre, idéalement dès les 100 premiers jours de la prochaine législature, est indispensable.

Axel Ruckert


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