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Face à Savencia, Bel ou Lactalis, des PME françaises tentent d’exister

Le monde laitier français est à la fois concentré et diversifié. Face aux géants Lactalis et Savencia, certains produits parviennent à sortir leur épingle du jeu, y compris en grande distribution. Voici qui demande un vrai savoir- faire, tant en termes de produit qu’en termes d’innovation commerciale.

La gamme de fromages de la PME familiale Milleret.

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Le monde laitier français est à la fois concentré et diversifié. Face aux géants Lactalis et Savencia, certains produits parviennent à sortir leur épingle du jeu, y compris en grande distribution. Voici qui demande un vrai savoir-faire, tant en termes de produit qu’en termes d’innovation commerciale.

Le marché du fromage en France est concentré. 46% du marché est occupé par les marques de distribution. Pour ce qui est des autres marques, Lactalis, Savencia, Bel, Entremont et Eurial, elles comptent globalement pour 41% du marché. La part des « petits » est donc au niveau France de 13%, il est de plus constitué d’une multitude d’offres.

De solides assises régionales

Ces « petites » fromageries disposent d’une belle assise dans leur région, ce qui a permis aux plus solides de grandir en France, mais aussi pour certaines à l’étranger. C’est le travail de plusieurs générations, les investissements constants et une farouche volonté de garder leur indépendance qui font leur succès actuel. Ils ne se reposent pourtant pas sur leurs lauriers même si le marché du fromage est en croissance. L’année dernière a d’ailleurs été une bonne année globalement. Si l’on excepte les fromages allégés et les gâteaux fromagers, le marché national connaît une excellente dynamique, d’autant que les Français prennent aussi l’habitude de cuisiner avec du fromage.

Milleret : 100 ans et toujours à la pointe

La dernière innovation de cette fromagerie familiale a de quoi surprendre. Le nouveau fromage Ortolan Grand Pâturage dispose d’un cahier des charges haut de gamme : des vaches nourries à l’herbe, sans OGM, et un lait collecté au plus loin à 12 kms de la fromagerie. De plus, pour aider à la transparence vis-à-vis du client, la direction a décidé d’expérimenter des colliers de vaches connectés qui permettent de collecter des données et d’améliorer la traçabilité du temps passé par les vaches en pâturage. Le changement est bel et bien là, une évolution parmi d’autres pour cette entreprise familiale qui fête son centenaire cette année.

Bien connue pour ses marques Ortolan et Roucoulons, la fromagerie franc-comtoise a su passer du régional au national, un exploit pour ce marché. Après Henri, ses fils Jacques et Pierre, le dirigeant est aujourd’hui le petit-fils du fondateur, Denis Milleret. La fromagerie est toujours installée en pleine nature, à Charcenne, et emploie 185 personnes. Elle traite quelques 85 millions de litres de lait chaque année et exporte 12% de sa production. Mais elle n’oublie pas le local. Pendant les confinements, deux camionnettes ont sillonné sur les routes de la région pour ravitailler des clients à domicile. L’entreprise est aussi PME+, un label RSE pour les entreprises indépendantes fournisseurs de la distribution. La croissance est là, de ce fait le dirigeant poursuit ses investissements : une deuxième usine est envisagée. Mais pas question pour lui de quitter son petit village de 300 âmes.

Famille Dischamp, leader du Saint-Nectaire AOP

110 ans qui dit mieux ? Les générations se succèdent depuis lors en cette belle région d’Auvergne. Jean Dischamp est le fondateur, Paul le fils la développe en l’associant à la laiterie de son beau-père. Mais l’objectif reste clair : produire et affiner des fromages de grande qualité, dont le formidable Saint Nectaire. L’activité se poursuit avec ses succès et ses échecs. Ce sont ensuite Philippe, puis Jean-Luc Dischamp qui arrivent à la direction, et vont accélérer la croissance de la fromagerie. Ils procèdent à de nouveaux rachats, celui de la Laiterie de la Montagne, située à Saint-Nectaire même et qui produit des AOP, Saint Nectaire, Bleu d’Auvergne, Fourme d’Ambert et Salers, suivi de celui de la Coopérative de Chambernon et de son Cantal AOP.

Les spécialistes se plaignent du fait qu’il y a relativement peu de produits bio dans le rayon, mais les petites fromageries sont à la pointe. Ainsi Dischamp a lancé son Saint-Nectaire bio l’an dernier et a annoncé la modernisation de son outil de production, en passant de Chambernon à Saint-Flour. 8 millions d’euros pour le Cantal AOP avec une multiplication par trois du tonnage produit. Avec ses 200 salariés et son chiffre d’affaires de près de 80 millions d’euros, la fromagerie assure son avenir jour après jour. Le leader du Saint-Nectaire AOP va aussi agrandir le site de production dédié à ce produit de 2200 m2. Avis aux amateurs, il est aussi prévu que des boutiques de vente directe soient créées auprès des deux sites.

Fromagerie Delin, le roi de l’export

Installée à Gilly-les-Citeaux (21), elle est l’une des dernières fromageries indépendantes de Côte d’Or. Philippe Delin a repris l’entreprise de ses parents Jacques et Jacqueline, et a toujours baigné dans le fromage. Dès la fin de ses études, il intègre la société familiale et y occupe tous les postes. Début des années 2000, la fromagerie fonctionne bien et réalise 3 millions d’euros. Aujourd’hui, elle flirte avec les 20 millions. En moins de vingt ans, des investissements constants ont été réalisés sur le site d’origine avec une nouvelle usine, et des opérations de croissance externe vont permettre d’aller plus loin.

Des premiers rachats sont effectués en Haute-Marne, en Seine-et-Marne, puis c’est le tour de la Laitière de Bourgogne-Franche-Comté et de la fromagerie de Montbeliard de rejoindre le groupe. En parallèle, l’offre s’étoffe. La gamme de fromages enrichis à la crème, comme le Brillat-Savarin, s’élargit avec une création qui connaîtra un vrai succès, le Régal de Bourgogne aux raisins. En 2020, deux nouveautés sont lancées, le « Côte d’or, le fromage » et le « Truffignon », raclette aromatisée à la truffe.

Si l’expansion a été bien menée dans le temps, c’est grâce à ces innovations en matière de production, mais aussi à des efforts commerciaux qui ont accompagné l’essor de l’entreprise. Ainsi l’export a été l’une des voies d’expansion, en particulier les Etats-Unis et le Canada, avec dernièrement le lancement d’une cloche à fromage individuelle pour le Brillat-Savarin permettant un affinage pendant le trajet maritime. La Fromagerie Delin exporte en effet la moitié de sa production en Amérique du Nord et en Australie.

Si les grands groupes ont pris le dessus et sont devenus des champions qui portent haut les couleurs françaises au niveau international, les fromageries indépendantes poursuivent leur développement sans faillir, avec patience et régularité.

A.F.


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