Si l’édition se porte plutôt bien en France, force est de constater que les Français peuvent encore faire des progrès en matière de lecture. Un adulte qui ne lit pas est souvent un enfant à qui l’on n’a pas su transmettre le plaisir de lire ou que l’on a au contraire dégoûté en le forçant à des lectures ennuyeuses.
Le psychanalyste Bruno Bettelheim fait observer que « La télévision bride l’imagination au lieu de la libérer. Un bon livre stimule l’esprit, mais le libère en même temps ». En tant que parents, nous sommes presque tous d’accord avec lui, mais nos actes sont-ils en accord avec nos paroles quand nous laissons nos enfants des heures devant des écrans de toute sorte, sans les encourager à lire pendant leur temps libre ?
Des signaux d’alerte à l’école
Les symptômes qui alertent en priorité les enseignants, de l’école primaire au lycée, concernent la lecture à haute voix : déchiffrement incertain, lent ou hésitant, confusions récurrentes, ânonnement syllabique qui rompent la fluidité indispensable à la compréhension.
Pour ces déchiffreurs laborieux, les difficultés instrumentales sont telles qu’elles occultent complètement la question du sens. Mais ces signaux particulièrement visibles ne pointent qu’un type de difficultés, de nombreux enfants restent en fait complètement extérieurs à tout écrit, même si, en apparence, ils semblent mieux armés parce qu’ils sont capables d’une lecture à voix haute fluide.
Des causes profondes à prendre en compte
De façon récurrente, c’est l’absence totale d’appétence pour l’écrit et sa culture qui est pointée comme explication majeure à la difficulté pour apprendre à lire.
Dès la maternelle, des enseignants constatent une forme « d’imperméabilité à l’écrit » chez certains enfants dont les pratiques langagières se sont construites sans aucune référence à des pratiques écrites – qu’il s’agisse de lecture ou d’écriture – totalement absentes de leurs foyers et de leur environnement social. C’est alors à l’école que revient entièrement la mission de faire découvrir et comprendre l’enjeu social de l’écrit sans lequel l’apprentissage de la lecture ne peut prendre sens.
Les Français et la lecture
Selon une enquête TNS-Sofres réalisée en 2008, quelque 69 % des Français interrogés déclaraient avoir lu au moins un livre au cours des douze derniers mois, contre 66 % en 1981.
Dans cet ensemble, on distingue plusieurs catégories. Il y a d’abord les « petits lecteurs » qui lisent de un à cinq livres par an. Leur importance est passée de 24 % à 35 % de 1991 à 2008. A l’opposé, se trouvent les « grands lecteurs ». Ils lisent 20 livres ou plus dans l’année. Leur proportion n’est cependant plus que de 9 % des personnes interrogées, contre 14 % en 1981.
Quant aux « lecteurs moyens », qui lisent six à vingt livres par an, on observe un véritable recul sur une même période, de 28 % à 25 %. Les « grands lecteurs » appartiennent pour la majorité aux catégories socioprofessionnelles élevées et / ou de niveau de diplôme important.
Développer le goût de lire
Lire peut sembler, pour la plupart d’entre nous, une opération simple et facile. Pourtant, avant de pouvoir lire sans difficulté, il a fallu apprendre. Et cet apprentissage, plus ou moins agréable selon les contextes, prend un temps relativement long, plusieurs années si on parle de maîtrise.
La lecture n’est donc pas un processus inné mais bien le résultat d’une éducation, d’une formation et de la pratique. A tel point que bon nombre de personnes qui ont appris à lire ne deviendront jamais de bons lecteurs parce qu’ils ne lisent pas suffisamment.
Pour développer le goût de la lecture, il faut créer un environnement physique et psychologique propice. Cela commence parfois par ôter ce qui fait obstacle à la lecture. C’est le cas, entre autres, de la télévision. La lecture est une habitude qu’il convient de prendre très tôt. Les parents jouent donc un rôle important pour ce qui est d’amener leurs enfants à être de bons lecteurs réguliers.
La place du savoir en France
Les Français ont cependant un bon niveau de culture générale avec une note globale de 14,1 sur 20, révélait en juillet 2012 une étude TNS Sofres sur « les Français et le savoir ». L’étude, centrée sur le rôle et la place du savoir dans la vie des Français, était accompagnée d’un test de culture générale avec 20 questions sur divers domaines comme la science, la littérature mais aussi l’économie, l’histoire ou la géographie.
L’étude met aussi en lumière la frustration de ces Français sondés puisque 54% des actifs déplorent ne pas consacrer assez de temps à acquérir des connaissances. Le savoir est perçu plus comme un vecteur intellectuel que matériel. Pour 42% des sondés, il a pour but d’aider à comprendre dans sa globalité le monde qui les entoure.
Les jeunes, quant à eux, ont une perception plutôt moyenne voire mauvaise de leur niveau de culture générale (près de 50% d’entre eux se donnent une note de 5 à 6 sur 10): les jeunes filles s’évaluant encore moins bien que les garçons. Une étude menée par la Fondation Total en juillet 2012 (regards croisés sur la jeunesse en France) montrait à quel point les jeunes ont une perception négative d’eux-mêmes lorsqu’ils se comparent aux autres générations, et combien ils ont des difficultés à identifier leurs atouts.
Pour les aider dans leur future vie d’adulte, il en va donc de notre responsabilité de parent de mettre le plus tôt possible nos enfants sur le chemin du plaisir de lire.