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Air Algérie – Royal Air Maroc : qui remportera la bataille du ciel africain ?

Entre les deux compagnies, la bataille du ciel est engagée. Plus qu’une place de leader régional, ce sont deux modèles d’organisations qui s’opposent.

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Entre les deux compagnies, la bataille du ciel est engagée. Plus qu’une place de leader régional, ce sont deux modèles d’organisations qui s’opposent. D’un côté, Air Algérie peut compter sur un gouvernement qui considère sa compagnie nationale comme une extension de l’État. De l’autre, Royal Air Maroc fonctionne comme un partenaire qui vient répondre à un besoin de service public.

Une nouvelle vision stratégique pour Royal Air Maroc

Conscients des défis qui se présentent à la compagnie nationale marocaine, ses dirigeants viennent de dévoiler les contours de leur plan de développement à moyen et long terme. Une révision stratégique de fond en comble, courant jusqu’en 2025, qui balaie l’ensemble des problématiques auxquelles doit faire face la « Royal ». En d’autres termes, il s’agit pour l’entreprise de « passer d’une dimension de compagnie régionale (…) au rang de transporteur global ». L’année dernière, la compagnie a réalisé un chiffre d’affaires de 16,3 milliards de dirhams, en hausse de 23% sur la période 2015-2018. Elle a transporté 7,3 millions de passagers en 2018, contre 6,7 millions en 2017. De bons résultats, dégageant une rentabilité néanmoins trop faible pour lui permettre de se développer à la hauteur de ses ambitions. Et ce alors que le secteur aérien, en pleine consolidation, traverse un contexte extrêmement concurrentiel et ultra-compétitif, lui-même entretenu par les offres très agressives des compagnies low cost.

Pour Royal Air Maroc, la solution passe donc par le doublement de sa flotte, aujourd’hui composée de 61 appareils, le renforcement des destinations couvertes, qui devraient passer de 103 à 120, le développement de bases touristiques et domestiques et, enfin, la conclusion d’alliances. Pour obtenir les fonds nécessaires à ce vaste programme, Royal Air Maroc doit donc, selon son mode d’organisation, négocier avec l’État un partenariat permettant le déblocage des fonds nécessaires. « Aujourd’hui, les compagnies souveraines qui survivent dans un domaine concurrentiel sont celles qui bénéficient d’abord d’un fort soutien de l’État », déclarait dans les pages de Jeune Afrique un haut dirigeant marocain. Ce qu’ont bien compris les autorités algériennes qui, elles, portent leur propre fleuron national : Air Algérie (AA). 

Air Algérie, ou le succès d’une compagnie soutenue par l’État

2,5 milliards de dollars : c’est en effet le montant, impressionnant, qu’en début d’année Alger a alloué à sa compagnie nationale. Une subvention monstre, qui doit servir les ambitions d’un pays cherchant à s’imposer comme « la » plateforme entre l’Afrique et le reste du monde. Dont acte : grâce aux subsides publics dont elle bénéficie, Air Algérie a annoncé, en septembre 2016, son intention de porter sa flotte de 60 à 100 appareils à l’horizon 2025. Une quarantaine d’avions long-courriers qui viennent s’ajouter aux seize appareils flambant neufs acquis à partir de 2012 pour 550 millions d’euros, eux aussi financés en partie par des fonds publics. De quoi permettre à la compagnie d’augmenter significativement ses fréquences de vol, AA ayant annoncé, à la faveur de la faillite d’Aigle Azur en septembre dernier, lancer quelque 51 nouvelles dessertes entre la France et l’Algérie.

Et pour soutenir cette croissance, AA peut désormais compter sur une toute nouvelle aérogare, entrée en service le 1er mai dernier lors d’un vol inaugural opéré par la compagnie entre Paris et Alger. Le nouveau terminal, d’une superficie de 200 000 mètres carrés, dispose de 120 comptoirs d’enregistrement, 12 tapis à bagages et même de deux postes de stationnement pour les Airbus A380. Il permettra d’accueillir 10 millions de passagers supplémentaires par an, portant la capacité totale de l’aéroport Houari-Boumediene à 22 millions de voyageurs. « Cette infrastructure va nous permettre de gagner plus de parts de marché », s’est à cette occasion félicité le porte-parole d’Air Algérie, promettant de « tout faire pour que cet endroit devienne un hub et fasse profiter l’économie algérienne ». Une promesse réitérée, à l’occasion d’un premier vol Alger-Budapest opéré en septembre dernier, par le ministre algérien des Transports, qui a souligné que l’ouverture de cette nouvelle ligne et les investissements consentis par l’État algérien traduisaient l’ambition du pays de devenir un « hub régional ».

Subventions publiques / contrat programme : deux modèles qui s’opposent

La bonne santé d’Air Algérie ne doit, pourtant, pas faire passer sous silence que la compagnie a rencontré, cette année, de graves soucis financiers, frôlant même la faillite. Une fois de plus, l’État algérien est venu au secours de sa pépite, autorisant le Trésor public à apurer la dette d’AA, d’un montant de 3,8 milliards de dinars. Une aide précisément destinée à régler les acomptes exigés d’AA par les constructeurs Airbus et Boeing, à défaut de laquelle la compagnie serait restée « confrontée à une situation des plus délicates », selon son propre PDG, et à « un lourd endettement (ayant) pour conséquence directe une sérieuse dégradation de la trésorerie et de (sa) capacité à investir ». Le modèle de financement adopté par l’Algérie permet donc à l’État de participer directement à l’effort budgétaire nécessaire au développement de toute compagnie aérienne. Il présente néanmoins un inconvénient : la dépendance d’Air Algérie aux subventions publiques.

Royal Air Maroc, elle, doit faire face au problème inverse. Bien que largement indépendante financièrement, RAM fait aujourd’hui face à un dilemme. « Doubler (de) taille ou disparaître » : voici l’enjeu, aussi limpide que radical. De grandes ambitions, qui nécessitent évidemment de considérables investissements. Investissements dont l’origine ne peut venir que d’une privatisation – hypothèse pour l’heure écartée par M. Addou – ou de la signature d’un « contrat-programme » avec l’État marocain : « pièce maîtresse pour les entreprises publiques (…), le contrat-programme reste un document vital pour l’évolution de la compagnie nationale marocaine, surtout que plusieurs pays africains visent la première place en Afrique ».

L’opposition des deux modèles présentés correspond finalement au duel entre une vision court terme-long terme. Reste à savoir si RAM survivra assez longtemps pour voir aboutir sa stratégie au long cours.


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