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Lisa Marie Presley, de Graceland à Neverland

Lisa Marie Presley et Michael Jackson (Goff/Globe Photos/Zuma/ABACAPRESS.COM )

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Par Catherine Muller, Docteur en psychologie

Tribune. Le 25 août 1994, Paris Match fait sa Une avec un couple aussi étonnant que détonnant,  Lisa Marie Presley et Michael Jackson. La fille du King épousant le Roi de la Pop’,  c’est  » le mariage de l’année « , comme le titre ce journal! De quoi déchaîner passions et commentaires, et diviser l’opinion entre prosaïques et romantiques. Pour les uns, ce « coup de foudre » n’est qu’un vulgaire coup de com’, entre une star voulant se dédouaner d’accusations de pédophilie, et une chanteuse sans grand talent cherchant à faire décoller sa carrière. Pour les autres, cette histoire est une véritable romance, et ils repèrent  dans le passé des deux tourtereaux les preuves de leur sincérité.

Et d’indice, il y en a un, et plutôt probant. Lisa Marie et Michael s’étaient en effet rencontrés à Las Vegas, des années avant, et plus précisément le 26 mai 1974, et cette date aura son importance dans la suite de leur histoire. Mais pour lors,  Lisa Marie a six ans et, déjà très admirative du chanteur des Jackson Five, elle demande à Jerry Shilling, un des très proches amis de son père, de lui présenter cet ado de seize ans qui ressemble, à ses yeux, au Prince Charmant. La rencontre aura lieu au Casino Sahara Taohe où Elvis se produit alors. Le lendemain, Lisa Marie est venue assister au show de son papa chéri! Sur l’enregistrement du concert de ce soir-là, on entend distinctement Elvis, très ému, faire applaudir par son public les « fantastics » Jackson Five et sa « merveilleuse petite fille »! Cette spectaculaire déclaration aura-t-elle durablement marqué son imaginaire d’enfant? Toujours est-il qu’elle épousera Michael vingt ans plus tard,  et jour pour jour, le 26 mai 1994.

La physiologie du bonheur

Si nous pouvons nous sentir heureux, c’est parce qu’il y a dans notre cerveau un « circuit du bonheur » qui est activé par la production de quatre hormones, la dopamine, la sérotonine, l’endorphine et l’ocytocine. La dopamine, c’est l’hormone  du plaisir, cet état d’enthousiasme et d’optimisme qu’on reconnaît chaque fois qu’il se manifeste, et qu’on va chercher à retrouver en reproduisant encore et encore les situations qui le favorisent. La sérotonine agit sur notre motivation, c’est elle qui va nous permettre d’atteindre nos buts et de réaliser nos rêves; c’est aussi le « baromètre » de nos humeurs, et, parce qu’elle les gère le plus calmement possible, elle contribue grandement à  notre équilibre et à notre bien-être. L’endorphine, elle, c’est un euphorisant naturel qui  nous fait voir la vie en rose et nous met des étoiles dans les yeux. Quant à l’ocytocine, elle est à l’origine l’hormone de la lactation, et, parce qu’ elle est libérée par la maman et son bébé pendant la tétée, quand l’une donne et que l’autre reçoit du lait chaud et sucré , c’est aussi l’hormone  de l’empathie, présente quand nous avons des preuves d’affection et de reconnaissance et que nous nous sentons entourés et protégés.

Le sentiment d’être heureux, c’est ce que nous désirons profondément tous, et quand nous l’éprouvons, nous faisons tout pour le garder le plus longtemps possible, ou, si nous l’avons perdu, pour le retrouver le plus vite possible! Alors, nous allons mettre précieusement en mémoire chaque élément de notre scène personnelle du bonheur, et nous aurons ainsi une « vidéo mentale » de ce qu’est, pour nous, ce bonheur parfait! Par la suite, lorsque nous verrons ou entendrons des passages de cette « vidéo » que nous avons gardée bien en tête, nous revivrons ce même sentiment de bonheur, et nous aimerons irrésistiblement les personnes ou les lieux qui l’évoquent. Voilà qui donne la clé pour comprendre ce couple improbable qu’ont formé Lisa Marie et Michael!

« Un peu d’Elvis en Michael »

Après l’échec de son mariage avec Danny Keough, un musicien qu’elle avait épousé à vingt ans, « beaucoup trop jeune » dira-t-elle,  la jeune femme se sent très seule, d’autant plus seule que son présent la désespère et que son avenir l’angoisse. Elle fait alors ce que les êtres humains font dans ces cas-là,  elle va chercher dans son passé les souvenirs heureux qui l’aideront à surmonter cette mauvaise passe. Et les moments les plus radieux de toute sa vie, ce sont ceux qu’elle a  partagés, enfant, avec son père, les jeux dans le parc de la maison de Graceland, transformé rien que pour elle en fête foraine, et surtout les séjours dans la suite du trentième étage du Las Vegas Hilton, d’où l’on pouvait se croire habiter dans le ciel. De tout ce bonheur, la soirée du 26 mai 1974 au Casino Sahara Tatoe en est comme l’image iconique. Son cerveau de petite fille est alors en plein Nirvana, il a tout ce qu’il faut pour vibrer: de la sérotonine quand son père braque les projecteurs sur elle, de la dopamine quand il l’a fait ovationnée par tout le public, de l’endorphine tant la situation est excitante, et de l’ocytocine quand il lui déclare son amour. Mais en 1994,  que lui restait-il de cette soirée magique? Son père était mort, et avec lui, la féerie de son enfance s’en était allée elle aussi. Disparus aussi les décors des premières années de sa vie, Graceland avait été ouvert aux touristes, et le Casino Sahara avait été racheté et transformé par un groupe hôtelier.  Elle cherchait en vain où et comment retrouver l’âme de son passé flamboyant! Désormais, pour se souvenir des jours heureux, il n’y avait plus que celui qui n’avait pas quitté la scène … Michael!

Dans l’entourage du King, d’ailleurs, on croyait à la sincérité de leurs sentiments, et on en voyait des marques. Ainsi,  Patsy Andersen, manager d’Elvis Presley Enterprises, qui avait  rencontré  le couple à Graceland, en garde un joli souvenir: « Je pense que Lisa aimait vraiment Michael », dira-t-elle, « il est venu et il était très agréable. Je les ai vus une fois devant la tombe d’Elvis, juste tous les deux. Il serrait Lisa dans ses bras. Ils sont restés au moins quarante-cinq minutes comme ça, sans rien dire « . Cette version d’un couple tendrement uni est aussi rapportée  par le Star Magazine du 10 octobre 1995. « Lisa Marie », a écrit le journal,  » a fait faire à Michael le tour privé de sa maison d’enfance. Le couple a passé des heures marchant main dans la main à travers la maison, parlant de l’enfance de Lisa et de son célèbre père pendant que ses enfants jouaient sur la pelouse, là même où leur mère avait joué si souvent étant petite. Ils avaient l’air heureux ». Quant à Priscilla Presley, elle ne fut nullement étonnée du choix de sa fille, parce qu’elle avait été la première à comprendre que celle-ci avait trouvé « un peu d’Elvis en Michael », et qu’elle savait à quel point  toute sa vie était rythmée par la musique son père.

« … jusqu’à la tombe… »

Après avoir enregistré un premier duo virtuel avec son père, trente ans après sa mort, elle récidive dix ans plus tard avec « Where no one stands alone », un gospel qui sied à merveille aux voix rauques du père et de sa fille. Interviewée à la sortie du titre, elle confiera, à propos de son père: « C’est quand il chantait du gospel qu’il avait l’air d’être le plus passionné et en paix », ajoutant qu’elle s’était sentie très émue. « Ce n’est jamais très agréable de pleurer et de chanter en même temps. Je devais garder mon sang-froid mais je me sentais très connectée à lui et à la chanson, j’ai eu l’impression qu’une main descendait vers moi… »

Une impression prémonitoire? Dans la version chantée par Elvis en 1967, puis reprise quarante ans plus tard par sa fille en duo avec lui, les paroles du refrain demandent, « tiens ma main jusqu’au bout, chaque heure chaque jour, viens ici vers le grand inconnu ». Mais dans la version originale,  il ne s’agit pas d’un « grand inconnu » , terme poétique susceptible de plusieurs interprétations, pas forcément tragiques, mais, bien plus brutalement,  de… la tombe! Or, le 12 janvier de cette année, Lisa Marie a été retrouvée inanimée chez elle, et elle n’a pas pu être réanimée. La même mort que son père!

 « Prends ma main jusqu’à la tombe », on dirait bien qu’il l’a fait…

Catherine Muller, Docteur en psychologie


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