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Après le e-commerce, Zoomalia veut ouvrir 100 boutiques

Jusque-là spécialisé dans la vente sur internet, la jeune enseigne de nutrition animale de qualité fondée en 2010 par Pierre-Adrien Thollet à Saint-Geours-de-Maremne dans les Landes, veut développer son réseau de magasins pour passer de 100 millions d’euros de CA à 130 d’ici trois ans. Cela promet !

Pierre-Adrien Thollet, PDG de Zoomalia © Zoomalia

Qu’est-ce qui vous a incité à devenir entrepreneur ?

Pierre-Adrien Thollet : Les traits de caractère se dessinent tôt dans l’enfance. Il y a trois piliers qui ont influencé mon parcours. D’abord, la curiosité, ce fut le premier moteur. Ensuite, la créativité, le rêve, enfant, je passais énormément de temps à inventer des histoires avec des personnages, je suis de la génération Playmobil. Finalement, c’est un peu ce que je fais encore aujourd’hui, je pars d’un écosystème pour créer une histoire de vie pour l’entreprise. Enfin, le besoin de liberté, l’envie de prendre certains risques ont été des motivations essentielles pour me lancer. Je suis un impatient, je n’ai pas supporté d’être salarié, et il y a quinze ans, je me suis lancé dans mes projets après la négociation d’une rupture conventionnelle.

En dehors de cela, j’ai plusieurs passions : l’informatique, les animaux et le sport, en particulier les sports de montagne. Mes études informatiques m’ont permis de lancer une place de marché de mise à disposition de matériel de montagne, puis en parallèle, une autre, il s’agissait de Zoomalia.

Zoomalia a pris le dessus ?

A un moment donné, il faut choisir ses combats. La problématique marketplace est que le principal travail consiste à chercher des professionnels ou des particuliers afin de remplir une plateforme vide. L’amorçage est donc long, au moins deux ans pour développer le logiciel et lancer le site correctement. Vers 2012, j’arrivais à la fin du dispositif Accre dont je bénéficiais, il fallait trouver le moyen d’accélérer. J’ai donc opté pour changer le modèle de Zoomalia. Plutôt que de vivre de commissions sur les ventes, il fallait créer notre offre, propre à Zoomalia. Cela a si bien fonctionné que je me suis concentré sur les animaux de compagnie.

Votre politique de marque ?

Nous étions distributeur multi-marques les premières années sur un secteur hyper concurrentiel. À partir de 2015, nous avons adopté une stratégie de marque de distributeur type Décathlon ou Ikea, avec la création de marques différentes (Daily’s, Watpond, Optimus, Reptilus, Iako, Zolia, Quality Sens, etc.) en fonction des segments de marché. Nous développons aussi des produits innovants comme Dogwash, la « salle de bains » pour laver son chien.

Où sont fabriqués vos produits ?

Étant donné la largeur de l’assortiment, un peu partout dans le monde. L’alimentaire vient principalement d’Europe (France, Espagne, Allemagne) à l’exception de quelques produits pour chats où tous les intervenants s’approvisionnent en Thaïlande. L’accessoire est rarement fabriqué en France, plutôt en Asie, sauf pour l’injection plastique où les principaux acteurs sont pour nous en Italie et en Belgique. Suite à la demande de notre clientèle, le projet a été lancé de développer une croquette made in France.

Notre benchmarking nous a fait découvrir que les croquettes dites Made in France sont faites à partir d’ingrédients issus d’autres pays européens. Nous avons donc travaillé à sourcer le maximum d’ingrédients en France, si possible près de notre usine, même les emballages sont faits à Mimizan. Après deux ans de R&D, nous avons élaboré une croquette basée à 85% de produits français, pour le reste, nous n’avons pas trouvé d’usine en France. Le démarrage de ces croquettes est excellent. Pour le prix, la philosophie de nos marques propres est de viser un prix très agressif, d’être les meilleurs. Y compris sur cette croquette, pour un paquet de 10 à 12 kilos, nous sommes environ 10 euros moins chers que la concurrence.

Pourquoi avoir internalisé la logistique ?

C’est un choix assez rare sur ce marché très compétitif. En arrivant dix ans après les premiers pure players, il nous fallait absolument proposer une offre différenciante en « suroptimisant » tous les coûts. L’efficacité opérationnelle est dans notre ADN, il s’agissait d’une priorité vitale et la logistique est un point clé. Nous avons eu également une expérience malheureuse avec un logisticien en 2012 ce qui nous a conduit à internaliser. Sauf qu’avec un catalogue 4 fois plus large que le meilleur de nos concurrents, cela était un vrai défi. Nous avons dû utiliser nos compétences informatiques pour développer notre propre système de « stockage chaotique » (plusieurs références sur un même emplacement), un ERP sur-mesure. La logistique est donc un avantage concurrentiel fort en termes d’efficacité et de coût.

Parlez-nous du moment où vous avez décidé de passer du digital aux boutiques.

J’avais déjà cela en tête dès 2014, avec la conviction que ces deux canaux ne s’opposent pas, mais se complètent. J’ai réussi à convaincre nos actionnaires de créer un magasin pilote à Pau en 2016. Ce fut une expérience assez rude, nous ne connaissions pas le retail, avons commis des erreurs, beaucoup appris, et mis en place une correction après l’autre jusqu’à atteindre la rentabilité après trois ans. Un second magasin pilote a ouvert en 2018, sur une surface réduite, avec un assortiment plus rationnel et nous avons poursuivi le déploiement depuis lors à partir du Sud-Ouest, vers l’Est et à présent, nous montons plus haut. Notre ambition est d’atteindre plus de 120 magasins en 2028.

L’étranger représente entre 15 à 20% du chiffre d’affaires, mais nous nous concentrons surtout sur la partie française, le marché le plus bataillé d’Europe. L’étranger reste pour l’instant un complément, nous revoyons tous nos systèmes de traduction pour intégrer l’IA et proposer à la vente tous nos catalogues, ce qui boostera quand même le chiffre sur ces zones.

Comment évolue votre chiffre d’affaires ?

Notre chiffre d’affaires était de 93 millions d’euros HT l’an dernier. Il a quasiment doublé, puisque nous sommes à +86% en trois ans. Le développement s’est fait sur fonds propres comme toujours. En 2024, nous pensons parvenir à dépasser les 100 millions d’euros.

Quid du financement ?

Nous avons effectué deux levées de fonds pour un total de 2 millions d’euros, mais depuis lors, 100% du capital est dans mes mains et celui du comité de direction. Nous n’avons connu qu’une seule année de déficit en 15 ans. La rentabilité est aussi dans notre ADN, sinon c’était la clé sous la porte. D’ailleurs, tous les concurrents qui étaient sur le marché à nos débuts ont fini par fermer, le dernier cette année. À présent, il va nous falloir ouvrir tous nos nouveaux magasins en fonds propres, c’est notre objectif, avec le recrutement de 2 à 4 personnes par magasin. Nous n’avons pas eu d’autre choix que d’être rentable et de réinvestir dans notre croissance.

Quel type de manager êtes-vous ?

Je suis très à l’aise dans la création, les projets, la construction, mais je ne suis pas un très bon manager avec mes collaborateurs, car je suis très rapide, avec dix idées à la minute et il n’est pas toujours facile de me suivre. Mais j’ai une qualité, celle de m’entourer de collaborateurs aux personnalités complémentaires. Au niveau RH, je suis convaincu que la diversité est essentielle pour l’émergence de nouvelles idées, chez Zoomalia, il y a des jeunes, des seniors et nous avons plus de femmes que d’hommes. J’ai 38 ans à présent, et mon management a connu plusieurs phases. Les jeunes entrepreneurs doivent savoir que l’âge impacte directement la perception que les autres ont de vous. On ne peut pas manager à 20 ans ou à 40 de façon identique, car on acquiert dans le temps une légitimité qui facilite les échanges.

Propos recueillis par Anne Florin


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