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A Notre-Dame du Laus, le recteur est un véritable entrepreneur

Entreprendre - A Notre-Dame du Laus, le recteur est un véritable entrepreneur

Notre-Dame du Laus (05130). A l’heure où pèlerins et touristes se rendent dans les cathédrales et les églises, vacances obligent, les sanctuaires où la Vierge Marie serait apparue ne font pas exception.

Près de Gap, dans les Alpes, se situe Notre-Dame du Laus. Pour mieux les accueillir, son recteur s’est transformé, il y a quelques semaines en véritable entrepreneur. Il a lancé de nouveaux projets et le site est en plein travaux. Reportage à 900 mètres d’altitude.

« Nous avons fait en sorte, que les travaux ne perturbent pas la vie du sanctuaire, ni la venue des pèlerins et des touristes », prévient d’emblée le recteur du sanctuaire, le père Ludovic Frère. En arrivant dans le sanctuaire, qui se situe à quelques kilomètres de Gap, dans le département des Hautes-Alpes, l’univers majestueux des montagnes qui enchâssent le site ne peut laisser indifférent. Dans les prairies verdoyantes alentours, les coquelicots sont encore debout, au milieu des vaches qui broutent l’herbe de bon matin. L’endroit n’est pas encaissé, il est très aéré. Il ressemble à un grand amphithéâtre naturel, à ciel ouvert, avec une vue imprenable sur la chaîne des Alpes. Dans son bureau au plafond voûté, le recteur explique que nous sommes « dans un diocèse (NDLR : celui de Gap et Embrun) qui a un peu plus de 140 000 habitants. Et, en dehors du Covid, il vient ici près de 180 000 personnes. Les travaux que nous avons lancés ne visent pas à agrandir, mais à mieux accueillir. Je ne suis pas un prêtre-entrepreneur, mais je suis au service de la Vierge Marie qui est entrepreneuse. » Notre-Dame du Laus, pour les chrétiens, est un des rares lieux, voir le lieu, où la Vierge Marie est apparue à une voyante aussi longtemps. Selon le décret officiel de reconnaissance par l’Eglise, signé en 2008, les apparitions se sont déroulées entre 1664 et 1718, année du décès de Benoîte Rencurel. La Vierge lui est apparue pendant 54 ans. Son message tient en un mot : miséricorde. « C’est, d’abord, en famille que nous devons la vivre », ajoute le recteur.

Au cœur de l’armée et de l’église

Né en Allemagne, en 1974, le jeune Ludovic est le second d’une fratrie de 3 garçons. Son père, Gérard, a embrassé une carrière militaire dans l’armée de terre. Sa maman, Marie-Agnès, est institutrice. « Tous les deux ans nous déménagions, explique-t-il. Mon père a terminé sa carrière il y a une dizaine d’années en devenant général de corps d’armée. L’appartenance à cette grande famille qu’est l’armée, et, nos nombreux déménagements, ont développé en moi une grande capacité d’adaptation. En plus, mon père a quelque chose d’unique en son genre, puisque son père était artisan. Et, aucun de ses enfants n’a suivi une carrière militaire. L’armée est toujours composée de vieilles familles traditionnelles, où les enfants embrassent la carrière militaire, de père en fils. Nous avons eu une vie très équilibrée. Il ne mettait pas son uniforme à la maison. Finalement, cette marque d’attention nous a permis de grandir en toute liberté. » C’est dans ce contexte militaire que Ludovic grandit. Il n’a pas d’appel particulier, jusqu’à ses 18 ans, où il entame sa classe préparatoire HEC. Lors d’un week-end à Paris, nous sommes à la mi-octobre 1992, « il m’est venu comme une évidence que le Seigneur m’appelait à la prêtrise ». 10 ans plus tard, il est ordonné prêtre le 9 mai 2002, à Genève. Ses dix années de formation et de discernement ont été marquées par de grands évènements ecclésiaux, comme le Frat, les JMJ à Czestochowa, en Pologne, à Denver, aux Etats-Unis, à Rome, ou encore à Cologne. Puis, il devient curé d’une paroisse en Suisse, à Genève. Il va y passer 5 ans.  Il rentre en France en 2007. Il est nommé à Gap, dans une paroisse du sud de la ville, moribonde. Il la dynamise en lançant une pastorale familiale. Puis, le 12 juillet 2010, Mgr di Falco, le nomme comme recteur de Notre-Dame du Laus.

Les apparitions et les témoins

En arrivant au cœur de cette région montagneuse, pour la première fois, le nouveau recteur se familiarise avec l’histoire des apparitions. « Elles sont étonnantes ces apparitions, confie-t-il. Ce sont les plus longues reconnues par l’Eglise. Benoite avait 17 ans lors de la première, en 1664. Et, 71 ans lors de la dernière. La Vierge Marie vient à elle simplement. Puis, elle lui demande de construire une église, ensuite une maison pour les prêtres et une maison d’accueil. Au début, les apparitions ont lieu dans une petite chapelle qui existe toujours, et, qui a été enchâssée dans le chœur de la basilique actuelle. » Les nombreux témoignages, les nombreuses enquêtes menées par l’Eglise et par les autorités civiles laïques, les nombreuses guérisons, les grâces des parfums qui se diffusent autour de certains pèlerins qui se rendent au Laus, attestent de ces apparitions. Benoîte aurait, ainsi, été en compagnie des centaines de fois avec la Vierge Marie. Pourtant, ici, il n’y avait pratiquement rien. Il y a 3 siècles, le Laus est un simple hameau. Au fil des ans, le hameau devient village et se développe. De nombreux témoins se chargent de diffuser l’information dans tout le royaume de France. Parmi les témoins, François Grimaud est le premier. Procureur du roi à Gap, et, juge de la baronnie d’Avançon, il atteste lui-même des conversions et des guérisons, dont il est témoin en enquêtant sur place. Un autre d’importance est l’ermite François Aubin. Avec 4 autres personnes, il recueille près de 2000 pages de témoignages. Selon le recteur, « les grâces continuent encore, aujourd’hui. Il y a, toujours, des conversions et des guérisons. Et, la grâce des parfums entoure parfois des pèlerins en grande souffrance. Ici, ils reçoivent la miséricorde et la paix. » Dehors, le bruit sourd d’une pelleteuse parvient jusqu’à nous. « Sortons, je vous fais visiter les lieux ».

Un sanctuaire en chantier

Dehors, le recteur salue des touristes qui viennent chaque année au Laus. Ils se connaissent. « Bonjour, comment allez-vous ? De retour parmi nous ? » Nous nous arrêtons un instant, la dame lui répond : « Oui, nous retrouvons des amis. Nous restons trois jours pour recharger les batteries, marcher, prier, et, nous ressourcer. » Une pente douce nous emmène à l’entrée du sanctuaire qui est desservie par une seule route départementale. « La plupart des véhicules doivent se garer dans le parking, à l’entrée », indique le recteur. Nous passons devant la petite maison où Benoîte Rencurel a vécu à la fin de sa vie. Un panneau à la signalétique épurée nous présente l’ensemble du sanctuaire et de ses sites : la basilique, les chapelles, les oratoires. Nous nous arrêtons devant le chantier, sécurisé. « Là, nous nous trouvons devant le futur pôle central qui permettra aux pèlerins et aux touristes d’avoir un seul point d’accueil. Car, depuis 350 ans, le sanctuaire s’est construit au fur-et-à-mesure. Et, il manquait un point central. On y trouvera un bar, un espace lounge, un snack, la réception de l’hôtellerie et l’accueil des pèlerins et des touristes. » Cette première phase de travaux a démarré il y a deux mois, en mai. Elle devrait se terminer en juin 2022. Ce chantier, entièrement financé par des dons, a été budgété pour un montant de près de 3 millions d’euros. Nous remontons vers l’hôtellerie, qui se situe sur la gauche de la basilique. « Nous pouvons y accueillir plus de 450 personnes, soit dans des chambres, soit dans des studios, soit dans des dortoirs. Nous avons, aussi, des appartements pour les familles. »

Une chaudière à bois et une basilique plus grande

Afin de participer à la préservation de l’environnement, le recteur et toute son équipe ont pensé à réinventer le système de chauffage. « Nous allons équiper tout le sanctuaire avec un système de chauffage central à bois. Il sera couplé avec du biofuel. » Pour cette tranche de travaux, le budget prévu est de 1 million d’euros. Nous repassons devant la Basilique où se tient un office liturgique. Le recteur officie avec 7 chapelains, une quarantaine de salariés, et, une vingtaine de bénévoles. « Nous avons dû embaucher un professionnel de l’accueil et de l’hôtellerie, explique-t-il. Il s’appelle Frédéric Lévêque. Son aide a été cruciale pour valider ce nouveau projet. » Il faut dire que le sanctuaire et le diocèse ont dû revoir à plusieurs reprises leur projet d’aménagement et de construction, à la baisse. Mgr di Falco, évêque de 2003 à 2017, avait rêvé de transformer le sanctuaire actuel en « petit Lourdes ». A la suite d’un concours d’architectes, le président du jury, l’ancien ministre Jean-Jacques Aillagon avait sélectionné le projet « Un pas de côté », des architectes Madec, Jourda et Barani. Ce projet de 10 millions d’euros, jugé « pharaonique » par ces détracteurs, avait dû être abandonné. Mgr Xavier Malle, son successeur, a préféré un projet plus humble, moins coûteux. « Nous nous projetons vers l’avenir », avait-il dit à ses paroissiens en lançant officiellement le projet. Devant la basilique, le recteur, explique que « l’agrandissement par le transept droit, permettra d’accueillir dans de bonne conditions 200 fidèles supplémentaires. » Le bruit de la pelleteuse couvre son dernier mot. « Ils attaquent les fondations », s’amuse-t-il à dire. L’ensemble des chantiers devraient se terminer en 2025. Le coût total est de 5 millions d’euros. En repartant, il me glisse « n’oubliez pas de parler du parfum, et, de la chapelle des anges. Le parfum continue à se répandre par moment ici. Et Benoîte Rencurel a été souvent en compagnie des anges. »

Reportage réalisé par Antoine BORDIER, Consultant et Journaliste Indépendant


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