André Perrissel, le président du groupe Agence Étoile Fnaim, à Marseille
André Perrissel signe ici un vibrant plaidoyer contre ces seniors qui partent trop tôt en retraite : un véritable gâchis pour l’ensemble de notre économie.
Travailler après l’âge de la retraite : une incompréhension générationnelle La génération des baby-boomers (1946-1964) est celle qui devrait “dégager” à la retraite. Du dégagisme, comme on dit en politique.
Pourtant en pleine possession de ses moyens, elle s’accroche aux manettes. Et surtout elle dispose d’une expérience précieuse, avec une forte volonté de toujours apprendre et de trans-mettre son savoir. La génération suivante, les X (1965-1979), connait le syndrome dit du « Prince Charles ». “Quand serai-je calife à la place du calife ?” Ils ont l’impression de ne pas pouvoir prendre leurs marques dès lors qu’un ancien est au-dessus d’eux.
La génération Y (1980-1994), quant à elle, s’étonne que ces vieux chnoques ne soient pas tous internés en Ehpad, ou puissent avoir ne serait-ce qu’une adresse mail. Cette génération pense déjà tout savoir et bien sûr pas question pour elle de travailler un jour de plus que l’âge légal de la retraite. Travailler après 65 ans, l’exemple vient d’en haut.
Des personnages célèbres nous donnent l’exemple de leur vitalité dans un âge avancé. Elisabeth II règne jusqu’à l’âge de 96 ans, Charles III commence à régner à 73 ans. Le général de Gaulle est réélu à la présidence de la République à l’âge de 75 ans. Bernard Arnault dirige toujours son groupe à l’âge de 74 ans. Michel Polnareff repart en tournée à l’âge de 78 ans. Philippe Geluck pince sans rire à 68 ans. J’en passe. Évidemment, il est plus facile de poursuivre une activité professionnelle lorsque l’on est chef d’entreprise, commerçant, profession libérale ou artiste que cariste ou chauffeur poids lourds.
Combien de retraités travaillent après 65 ans ?
L’âge officiel de la retraite en France est de 62 ans. La France compte néanmoins 1 500 000 salariés de plus de 60 ans. Plus de 350.000 de nos compatriotes âgés de 67 à 70 ans travaillent encore. Et 250.000 cumulent un emploi avec une retraite. Ce phénomène n’est donc pas marginal.
La réduction du pouvoir d’achat : première cause du cumul emploi-retraite La pension de retraite représente en moyenne la moitié du salaire de la période active. Et le montant moyen mensuel des pensions est de 1.390 €. Hommes et femmes ne sont pas égaux devant la retraite. La retraite moyenne pour une femme est environ de 10% inférieure à celle d’un homme. Sans compter que beaucoup de femmes ont peu ou pas de retraite du fait qu’elles ont élevé leurs enfants, moins travaillé ou exercé des métiers moins payés, moins qualifiés. Chez les anciens cadres, enseignants ou commerçants, l’arrivée à la retraite n’est pas toujours facile à vivre avec la réduction du pouvoir d’achat. Beaucoup ont placé leur épargne dans un investissement immobilier.
Travailler plutôt qu’être inactif
Bien des retraités sont hyper actifs, entre la gestion des petits enfants, la vie associative ou les voyages. D’autres restent oisifs et sans aucun centre d’intérêt, su-bissant la retraite plus que la vivant. Enfin chez certains, la perspective de poursuivre une expérience accumulée, maintenir son commerce, actualiser ses connaissances, conserver une vie sociale en entreprise, faire travailler sa mémoire et son cerveau, sont autant de motifs de poursuivre dans un métier.
Le cumul emploi retraite est assoupli
Le dispositif de cumul emploi-retraite est désormais simplifié. Il est possible de cumuler une retraite à taux plein avec un revenu brut non plafonné. Il est aussi possible, dans des fonctions de conseil ou d’intervenant extérieur, de créer une structure sous forme de SASU, se rémunérer en dividendes avec l’avantage du bouclier fiscal.
De l’utilité des anciens
Dans les années 1990, la mode était à la mise en pré-retraite dès l’âge de 55 ans. Les pouvoirs publics ont vite compris le coût économique très élevé de cette mesure. Et les entreprises ont aussi ressenti le poids du départ de ces pré-retraités en termes de perte d’expérience pour l’entreprise. Ce temps est révolu, il n’y a plus d’avantage social pour partir en pré-retraite.
Allongement de l’âge de départ à la retraite : le grand débat
En ce moment politique du débat sur la réforme des retraites, mon propos n’est pas de soutenir le travail jusqu’à 65, 75 ou 80 ans. Voyageant beaucoup, je constate dans de nombreux pays que des personnes âgées travaillent encore, y compris dans des métiers « physiques ». Dans l’hôtellerie et la restauration par exemple. Tout simplement parce que les systèmes de retraite à l’étranger sont moins généreux que le régime français.
L’allongement de la durée de vie et l’entrée de plus en plus tardive dans la vie active imposent en France une réforme des retraites pour une raison purement financière. Le régime des retraites, dans sa version actuelle, pourrait atteindre en 2027 un déficit de quelque 12,5 milliards d’euros (et environ 20 milliards en 2032), selon le Conseil d’orientation des retraites.
Au-delà de ce débat, la réponse est oui, nous pouvons encore avoir envie de travailler après l’âge de la retraite pour maintenir notre activité intelectuelle, du boulot et des responsabilités, du lien social et rester performants dans un domaine où nous excellons.
Je conclus en citant Marion Prigent : « Nous ne serons jamais trop vieux pour nous réinventer. » Il n’y a pas d’âge pour rêver, pour inventer, pour travailler ou pour se retrouver à parler boulot avec de vieilles canailles.
André Perrissel