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Hausse des taux directeurs sur les assureurs vie : menace ou opportunité ?

Entreprendre - Hausse des taux directeurs sur les assureurs vie : menace ou opportunité ?

Par Loay Dhanon Senior Consultant Asigma – Groupe Rainbow Partners

Dans l’objectif de soutenir la croissance, la Banque Centrale Européenne mène depuis 2010 une politique monétaire accommodante. Ainsi, pour stimuler le crédit et accroître la quantité de monnaie circulant dans l’économie, les taux directeurs n’ont cessé de baisser.

Si, en offrant un financement à moindre coût aux entreprises et aux individus, la BCE a souhaité relancer la consommation, le fonds en euros, support d’investissement historique des contrats d’assurance vie, a vu quant à lui son rendement baisser pendant de nombreuses années.

Les supports en unité de compte : une stratégie payante en période de taux bas

Des taux bas, voire négatifs, ne permettant pas aux contrats d’assurances vie de dégager un rendement financier suffisant avec les fonds en Euro ; les assureurs ont porté leurs efforts sur la promotion des supports en unité de compte (UC).

Plus attractifs en période de taux bas, ces supports ont non seulement l’avantage d’afficher une performance supérieure aux fonds en Euros mais également de faire porter le risque financier sur les épargnants et non sur l’assureur car le capital investi n’est pas garanti.

Ainsi, le constat est qu’il y a une réelle volonté des acteurs de diversifier leur portefeuille et un renforcement des efforts commerciaux pour augmenter la part de contrats multisupports. Que ce soit par la transformation des anciens contrats mono-support en contrats multisupports (transformation Fourgous) ou bien par l’augmentation de la part d’UC dans les encaissements, toutes ces actions ont été entreprises pour détourner les épargnants des fonds en Euros, quitte à voir la collecte nette ralentir.

La remontée des taux, une opportunité contrainte par la liquidité

Cependant, la remontée des taux (en témoigne l’OAT 10 ans* à 0,46% en 2016 versus 3% début 2023) et les faibles performances du CAC 40 remettent en question cette stratégie et poussent les assureurs vie à reconsidérer leur position vis-à-vis des fonds euros (composés en moyenne à 80% d’obligations dont 40% émises par des Etats et 60% par des entreprises). Ce changement de cap n’est pas aussi simple à amorcer puisque les assureurs vie font aujourd’hui face à une décollecte grandissante. De nombreux clients souhaitent faire fructifier leur épargne et se tournent vers des placements sécurisés à plus haut rendement tel que le livret A qui, après avoir longtemps été resté sous la barre des 1%, est passé récemment à 3%.

La décollette Euro autrefois plébiscitée fait dorénavant peser un risque de liquidité voire même de moins-value latente. Car pour honorer les rachats des fonds euros, les assureurs vie sont contraints de vendre leurs actifs liquides détenus en portefeuille dont notamment des obligations. Or ces dernières ont vu leur valeur diminuer en raison de l’émission sur le marché de nouvelles obligations ayant un taux de coupon plus élevé. La vente de ces obligations se fait donc à des prix bas et entraîne des moins-values qui se font ressentir au niveau de l’adossement actif passif des compagnies d’assurance.

Le manque de liquidité se fait également ressentir côté direction des investissements car pour rester compétitif et attractif sur le marché, les assureurs doivent investir au plus tôt sur ces nouveaux placements obligataires ; sans quoi le stock d’encours ne sera pas assez rémunérateur pour les clients.

Plus que la hausse des taux, c’est surtout la rapidité à laquelle s’est opérée cette remontée qui a exposé les assureurs à un risque de liquidité et à une possible mise en application de la loi Sapin 2 ; loi qui permet de restreindre temporairement la libre disposition des actifs aux clients des contrats d’assurance vie.

Bien que ce point critique n’ait pas encore été atteint, tous ces changements ne ménagent pas les directions Financières qui, en plus de la mise en œuvre des nouvelles règlementations telles que IFRS17 et IFRS9, doivent redoubler d’effort pour avoir un coup d’avance, mettre sous contrôle leurs risques et assurer un équilibre financier.


*OAT 10 ans = Obligations Assimilables au Trésor ; en France, l’OAT 10 ans fait figure d’indice de référence pour la plupart des taux fixes.


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