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Qu’est-ce que la chance de l’entrepreneur ?

Entreprendre - Qu’est-ce que la chance de l’entrepreneur ?

Par Yoann Laurent-Rouault, directeur littéraire et artistique de JDH EDITIONS, co-auteur du livre « Bourse de Paris : 10 grands patrons, 10 grandes histoires » (JDH EDITIONS)

Reconnaître sa chance, c’est en première instance, et avant toute autre chose, faire preuve de discernement envers soi-même. En seconde instance, c’est analyser la situation. Le « à quoi ça tient  tout de même ! » ou le « coup de bol » sont à bannir du raisonnement. Comprendre le faisceau des possibles qui a amené « votre chance » demande une pensée et une réflexion  introspective et réaliste. Et neutre. 

Certains peuvent  s’en remettre aussi à plusieurs autres notions  et s’en contenter. Des notions hautement philosophiques comme « le hasard », la « conjoncture » et le fameux « être là au bon moment et au bon endroit » peuvent intervenir dans le raisonnement. Pour ces poètes de l’entrepreneuriat, l’abonnement à la newsletter de madame soleil ou la carte de fidélité chez un des descendants de Nostradamus, avec l’option « marabout » en sus, le fer à cheval, la patte de lapin et le gri-gri  sont les bienvenus.

Mais qu’est-ce que la chance en affaires ?

Comment pourrait-on la cerner ?

Je serais tenté de donner cette définition personnelle de « la chance » :  l’opportunisme avant tout et une vision réaliste du marché comme de son secteur d’activité, avec une pointe d’originalité et un soupçon d’avant-gardisme. Et qui ne serait pas nécessairement axé uniquement sur le produit d’ailleurs, mais aussi sur ce qui entoure le produit. De son packaging à sa diffusion. Du service en tant que tel à l’application du service. Certains patrons y ajouteront le fameux ratio « 10 % de chance  et 90 % de travail ». Normalement, pour moi, c’est là la recette  de la potion magique. Mais peut-être suis-je né trop tôt dans un monde trop antique ? Vaste débat. Prenez un ticket.  

Mais, tentons,  essayons maintenant de qualifier  et de différencier la chance. Sans passer par les rapports des grandes études universitaires faites sur le sujet, ni par les coachs à succès en tous genres qui pullulent sur le web et dans nos boîtes aux lettres. La question est la suivante : « en tant que chef d’entreprise, comment classifierais-je  la chance ? ». Essayons de le faire sur la méthode  du nuancier de Munsell pour peindre un portrait réaliste de l’arc-en-ciel. Je distingue 4 couleurs principales dans mon spectre coloré.

Commençons par le  bleu ou la chance du débutant. Le ticket de loterie gagnant. Cette chance est accidentelle et se produit sans effort pour le bénéficiaire. Elle défie toutes les données et toutes les statistiques. Mais elle reste rare et fantasmagorique. Cela revient à attendre que le téléphone sonne. Qu’on vienne vous chercher là où personne ne vous attend. Partant de  ce principe de chance reconnu comme vérité par le citoyen moyen, il y aurait alors un nombre incalculable d’entrepreneurs dans les PMU et autres casinos. Ces lieux seraient peuplés d’entrepreneurs qui attendraient ad vitam aeternam « le bon coup ». Un ticket de loterie gagnant, c’est la cerise sur le gâteau, non une finalité. La loterie est l’ennemi « du récurrent », et le récurrent est l’ami de la pérennité d’une entreprise.

Prenons maintenant la couleur verte  pour symboliser la chance du visionnaire. Le visionnaire  identifie parfaitement qu’il y a quelque chose à prendre et donc qu’il y  a une action à mener dans un contexte particulier. Il traduit  l’opportunité par la chance d’avoir été conscient du potentiel de sa vision sur une situation donnée et sur un besoin humain qui n’est pas encore exploité dans sa nature commerciale. Pour nombres de nos contemporains, être visionnaire est une chance. C’est presque déifiant. Quel que soit le domaine. Se placer le premier et faire naître un marché, c’est un gage de réussite si les affaires sont rondement menées. L’histoire commerciale en est saturée d’exemples. D’ailleurs, on associe souvent les mots « brevets » et  « inventeurs » à ce type de chance. De l’abribus de Jean-Claude Decaux, systématisé sur l’ensemble du territoire, au produit informatique grand public de Bill Gates, en passant par le petit plastique au bout du lacet qui a fait la fortune de son inventeur.

Essayons le rouge pour la  chance de l’opportuniste. Elle est, puisque vous la cherchez. Elle existe forcément. Vous la provoquez. Vous tissez la toile. Vous êtes un chasseur-cueilleur-piégeur. Un vrai chien truffier. Et surtout, vous osez ce que les autres ne tentent pas tout en faisant preuve d’une réactivité remarquable. Risque tout ? Pas nécessairement. L’opportunité est partout. J’ai même récemment entendu dire par un président de la République que « des fois il suffisait de traverser la rue… »  Plus sérieusement, l’opportunité c’est une orientation viable. Le commerce de l’immobilier ou de la finance  transforme à qui mieux mieux les opportunités en niches.

En jaune maintenant, la chance « biblique ». Vous y croyez et vous créez  et matérialisez votre idée comme dieu le père pendant sa semaine de vacances terrestres. D’une cote prélevée au couturier, vous faites un mannequin, et du mannequin vous enfantez une ligne de produits. Père ou mère Nature, vous jardinez des Eden financiers, vous cultivez l’arborescence. Nos deux grands milliardaires français sont de cette nature. Vous inventez. Vous connaissez votre secteur et vous prospectez dans les laboratoires d’idées. Vous êtes créatifs. Vous aimez l’eau vive, les cascades et vous n’êtes pas client de l’aviron sur un étang. La descente des rapides c’est votre truc. Vous aimez l’innovation. Et vous êtes observateurs. Le jaune vous va bien, c’est la couleur de la lumière et rien ne va plus vite que la lumière.

Alors, la chance de l’entrepreneur, c’est quoi exactement ? Et bien, à mon sens, c’est  tout ça. Quatre couleurs et leurs nuances selon les cas et les contextes. Mais tout ceci, est-ce de la chance ou du talent ? Ou les deux ? Apprendre, évoluer, observer, tenter, décider, travailler sont nos vraies chances. Les aléas, la conjoncture, le hasard, ce sont des phénomènes météorologiques. Ni plus ni moins. Ne dit-on pas depuis des siècles, et après fine observation qu’après la pluie vient le beau temps ? Mais dans l’autre sens, la phrase fonctionne aussi. Et c’est important. On l’oublie trop souvent. Après le beau temps vient la pluie. Plus que tout autre chose, pour ma part, je crois que la véritable chance d’un entrepreneur, à tout niveau, c’est sa capacité d’encaissement, comme pour un boxeur qui veut décrocher le titre. Avec les quatre couleurs primaires, et les deux non-couleurs, le blanc et le noir, vous pouvez produire plus de 500.000 couleurs que l’œil humain peut distinguer. Alors, n’hésitez pas  à faire votre mélange et à créer votre palette. Une toile c’est un certain nombre de couleurs dans un certain ordre assemblé, même pour un tableau de maitre.

Yoann Laurent-Rouault.
Directeur littéraire et artistique des éditions JDH.


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