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Loïc Pochet, l’entrepreneur qui révolutionne les hydravions ne parvient pas à trouver ses financements

Loïc Pochet et Robert Lafont, PDG d'Entreprendre

Pour ses hydravions amphibies innovants aérospace, Loïc Pochet veut lancer une usine de 100 salariés dans l’Hérault. Reste à trouver les financements.

Loïc Pochet, avec vos sept traversées en solitaire, vous définiriez-vous comme un marin, un pilote, un patron de jeune pousse ?
Loïc Pochet :
Je ne me définis pas vraiment comme patron de startup, mais patron d’un projet. C’est vraiment ainsi que je me ressens, responsable d’un projet que j’ai initié. J’ai eu l’idée il y a longtemps, et j’ai créé l’entreprise en 2016. Je ne m’attendais pas à ce que le processus soit si long, je n’étais pas parti sur exactement la même idée, elle a mûri et évolué au fil des ans, suite à des phases de réflexion et des partages avec d’autres personnes.

En quoi votre hydravion, le Morgann représente-t-il une innovation ?
Notre hydravion est en rupture technologique par rapport à ce qui existe. Mais il est conçu avec des briques technologiques existantes et déjà validées. Nous allons déposer un ou deux brevets sur les nouveautés, mais dans l’ensemble, il s’agit d’utiliser des briques fiables depuis de nombreuses années qui n’ont jamais assemblées ensemble. Ceci concerne les foils, grâce auxquels nous pouvons sortir de l’eau (pas décoller) après 40 mètres seulement, au lieu de 800 mètres pour un hydravion classique, ce qui permet une consommation d’énergie bien moindre. Il y a également la bipoutre (la queue de l’avion), l’avant en forme de monocoque qui se termine en catamaran, les ailes repliables (cela n’a été utilisé que chez Boeing pour l’extrémité des ailes et les avions de guerre).

Et même si le pilote fait un malaise dans l’avion, il suffit de tirer sur une poignée et l’hydravion est suspendu à un parachute, un procédé déjà testé. À cela nous avons ajouté des idées, comme le fait de pouvoir retirer le donc un projet de pile à combustible pour le prototype, mais il ne faut pas oublier qu’en aéronautique, tous les éléments doivent obtenir une certification avant de pouvoir être utilisés. Personnellement, je suis assez séduit par le système de propulsion thermique à injection hydrogène qui est déjà en cours de lancement chez plusieurs marques, c’est une voie qui tient la route.

Quelle est votre cible de clientèle ?
Nous ciblons deux types de clientèles : les particuliers qui ont envie de faire de l’hydravion, souvent en aéroclub et la clientèle d’affaires. Par exemple, un hôtel peut acquérir un hydravion pour aller chercher ses clients et les ramener. Ici, à Sète, si mon hydravion se trouve au port, je décolle au-delà des 300 m, et je vais me poser à destination en toute liberté. Cela permet notamment de désengorger les aéroports. Nous avons des marques d’intérêt en provenance de pays très différents, mais à court terme, nous voulons pénétrer le marché américain et canadien (il existe des équivalences au niveau des certifications), car ce sont des marchés très importants qui n’ont jamais laissé tomber les hydravions.

Parlez-nous de votre prototype à échelle 1/3, un drone à usage de surveillance environnementale ?
Il s’agit d’un modèle réduit, qui va voler avant Noël sur le bassin de Thau. Ce prototype à échelle 1/3, de 5 mètres d’envergure va nous permettre de valider un point hydrodynamique. Nous travaillons sur un flyboat comme on dit en anglais, un bateau qui s’envole. Le côté aérien est parfaitement maitrisé grâce à notre bureau d’études, en revanche, nous voulons des données supplémentaires sur la réaction des foils dans l’eau à haute vitesse en fonction de l’état de la mer. Au moment où le foil quitte l’eau, cela crée des tourbillons, des « cavitations », c’est ce point que nous allons contrôler via notre mini modèle. Une fois la validation effectuée, nous lançons à l’échelle 1. Ce prototype sera également fabriqué pour en faire un drone qui sera commercialisé suite à la demande de certains clients. Il s’agit d’une opportunité qui n’était pas prévue au tout début du projet, il s’agit de l’activité « Sea Meerkat », l’activité Morgann étant menée sous le nom de « Calamalo Aviation ».

Avez-vous des précommandes ?
Nous avons enregistré deux pré-ventes d’hydravions suite à la présentation de notre maquette statique du meeting de Biscarosse en juin 2022. Il y a eu un bel engouement pour le projet. Les acomptes sont versés sur un compte séquestre afin que tout soit clair. Nous espérons avoir une centaine de salariés sous cinq ans.

Vous venez d’intégrer la nouvelle pépinière Flex ?
Oui, cela est tout récent, la pépinière est à Sète où nous allons fabriquer, assembler et faire nos essais. Nous sommes aussi membre du Pôle véhicule du futur, à Belfort, un des leaders hydrogène en France. J’ai été sélectionné dès les débuts.

Vous avez besoin de 30 millions d’euros sur 7 ans ? Où en êtes-vous ?
Nous avons effectué une petite levée de fonds initiale. La seconde de 1,5 mil-lion avant le 30 juin doit nous permettre de fabriquer le prototype et le faire voler avant fin 2023. Le gros souci en France est qu’il y a un véritable engouement pour les développements tech, mais pas pour le monde de l’industrie, car les retours sur investissements sont à plus modèle. Une fois la validation effectuée, nous lançons à l’échelle 1. Ce prototype sera également fabriqué pour en faire un drone qui sera commercialisé suite à la demande de certains clients. Il s’agit d’une opportunité qui n’était pas prévue au tout début du projet, il s’agit de l’activité « Sea Meerkat », l’activité Morgann étant menée sous le nom de « Calamalo Aviation ».

Vous venez d’intégrer la nouvelle pépinière Flex ?
Oui, cela est tout récent, la pépinière est à Sète où nous allons fabriquer, assembler et faire nos essais. Nous sommes aussi membre du Pôle véhicule du futur, à Belfort, un des leaders hydrogène en France. J’ai été sélectionné dès les débuts.

Vous avez besoin de 30 millions d’euros sur 7 ans ? Où en êtes-vous ?
Nous avons effectué une petite levée de fonds initiale. La seconde de 1,5 million avant le 30 juin doit nous permettre de fabriquer le prototype et le faire voler avant fin 2023. Le gros souci en France est qu’il y a un véritable engouement pour les développements tech, mais pas pour le monde de l’industrie, car les retours sur investissements sont à plus long terme. Il est important qu’il y ait une véritable remise en question sur ce sujet, le décalage est flagrant avec les États-Unis, où ces étapes de financement sont rapides. La marine américaine était intéressée par notre Morgann, mais par manque de moyens, nous n’avons pas pu avancer assez vite, or les Américains sont à fond sur les hydravions, ils sont à présent repartis.

Nous pensions obtenir un financement de la région, mais au bout de deux ans, cela n’a pas été possible, car nous ne rentrions dans aucune case de subventions. Le problème est aussi de rester maitre de son idée et de son capital. Bâtir un projet comme celui-ci, c’est ne pas se verser de salaire, ne pas partir en vacances, il faut faire des sacrifices, et la famille également.

Un bateau ou une société c’est la même chose, c’est un navire avec lequel on fait un parcours. Je me vois comme un chef d’orchestre qui doit parvenir à rassembler les fonds étape par étape. Je suis totalement autodidacte, j’ai quitté l’école au BEP pour m’engager dans la marine. Je n’ai pas le niveau de certains de mes interlocuteurs, mais je négocie pourtant avec eux d’égal à égal. À l’âge que j’ai, je n’ai pas oublié que j’ai été formé par Olivier de Kersauson qui disait « l’avantage en bateau, c’est que les cons, on les laisse à quai ». Un bateau ou une société c’est la même chose, c’est un navire avec lequel on fait un parcours. À 59 ans, pour faire décoller ce projet et trouver les financements, je veux aussi m’entourer de personnes qui ont les mêmes valeurs que moi. Cela permettra de tirer un joli bord.

Propos recueillis par Anne Florin



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