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Les Pins de Rome

À Pâques et avec le printemps, les regards se tournent encore plus vers Rome, qui reste à jamais un centre du monde, comme l’omphalos, la pierre sacrée du temple de Delphes en grec.

I Pini di Roma © Patrick Pascal

Par Patrick Pascal, ancien ambassadeur et président du Groupe ALSTOM à Moscou pour la Russie, l’Ukraine et la Biélorussie. Il est également le fondateur et le président de « Perspectives Europe-Monde ». 

Le latiniste Pierre Grimal a écrit dans Rome, Les Siècles et Les jours : « …l’un des secrets de Rome…sa piété, son sens du divin, et une sorte d’humilité qui lui fait ressentir la grandeur, les triomphes, la puissance, aussi bien que les menues réussites de la vie quotidienne comme des présents venus des dieux… »

L’un des secrets de Rome, ce sont aussi ses pins majestueux. Dans le poème symphonique Pini di Roma d’Ottorino Respighi, les pins de la Villa Borghese, autour d’une catacombe, ceux du Janicule et le long de la Villa Appia, où résonnent encore les pas des légions romaines, révèlent tout un univers mental et ils sont source d’inspiration. Les pins de Rome se caractérisent par leur permanence et leur endurance, mais sans rigidité, car ils captent le moindre souffle de vent et les sentiments de l’âme humaine. Ils sont comme des colonnes naturelles, à l’image de celles du Bernin sur la place Saint-Pierre, et se campent aussi en témoins de l’histoire.

Au milieu et à proximité des pins de Rome, un souffle puissant se fait parfois ressentir. Les arbres à forme humaine nous restituent ainsi, si nous y sommes attentifs, une douce musique. Ce n’est pas seulement la résonance sourde des pas de la Légion sur le pavé désormais poli par les ans, mais surtout l’Andante du Concerto n° 23 de Mozart, avec ses zéphyrs des Champs-Élysées, ou le touchant Soave sia il vento de Cosi fan Tutte. « Que la brise nous soit douce... », pour les siècles et les jours…

Soave sia il vento, tranquilla sia l’onda,
ed ogni elemento benigno risponda ai nostri desideri” (Mozart, Così fan Tutte)

Vent d’Est

Mao Tsé-toung disait que « les vents dEst lemportaient sur les vents dOuest ». Cela n’est pas exact d’un point de vue climatologique et il suffit de traverser l’Atlantique en direction des Amériques pour constater que l’on y rencontre de forts vents contraires (headwinds). Mais, il est vrai, au figuré, que de puissants vents soufflent de l’Est.

L’Est est une notion géographique qui ne saurait se confondre tout à fait avec l’Orient, son histoire, sa culture ou plus largement ses civilisations. L’Orient rejoint toutefois  l’Est au sens géographique de « Levant » (Morgenland ou le pays du matin à la différence des pays du crépuscule ou Abendlicht) qui a toujours exercé un attrait irrésistible. De là vient tout d’abord la lumière et il faut avoir vécu l’aurore au-delà de l’Extrême-Orient russe en abordant l’Océan Pacifique pour éprouver un éblouissement comparable.

De l’Est a surgi aujourd’hui la guerre. L’on peut en effet parfois parler de vents mauvais : « l’Afghanka » – ainsi qualifié par les populations locales – soufflant en direction de la mer Caspienne, à partir de l’Afghanistan au changement de saison, et charriant comme un sirocco des particules en suspension qui obscurcissent la vue et empêchent même de respirer; les vents venus d’Irak à travers le désert de Palmyre.

Mais l’on y assiste également à l’épanouissement de nations anciennes et de puissances nouvelles. Celles-ci nous offrent des identités différentes et remarquables qui font la richesse du monde. Elles annoncent un monde plus multipolaire qui ne saurait être perçu a priori comme menaçant et peut bien au contraire contribuer à rétablir des équilibres, dans le cadre d’un système international régénéré.

Pin par vent d’Est, aquarelle, collection particulière ©️ Jean Pascal

Les pins nous racontent de grandes histoires du passé et nous annoncent aussi un avenir qu’il est dans notre liberté de façonner.

« Una notte di giugno caddi come una lucciola
Sotto un gran pino solitario
In una campagna d’olivi saraceni
Affacciata agli orli d’un altipiano
Di argille azzurre sul mare africano »  (Luigi Pirandello)

(Une nuit de juin, je suis tombé comme une luciole sous un grand pin solitaire
Dans une campagne d’olivier sarrasins
Sur les bords d’un plateau d’argiles bleues donnant sur la mer africaine

   Pin par vent d’Est, aquarelle, collection particulière ©️ Jean Pascal

Patrick Pascal


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