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InVivo devient le numéro 1 mondial du malt


Avec son acquisition australienne, Malteries Soufflet (In Vivo) devient numéro un mondial du malt. Entretien exclusif avec Thierry Blandinières, directeur général du groupe InVivo.

Thierry Blandinières, directeur général du groupe InVivo.

Pourquoi avoir racheté l’australien UMG (United Malt Group) ?

Thierry Blandinières : Coté à la Bourse de Sydney, UMG était l’un des acteurs les plus en vue du marché du malt. Nous avons engagé des négociations de gré à gré afin d’acquérir cette société avec l’ambition de devenir le premier acteur mondial du secteur. Une ambition que nous avions affichée dès le rapprochement avec Soufflet, en décembre 2021. Le 15 novembre dernier, UMG a été délisté de la Bourse de Sydney pour devenir une filiale du groupe Malteries Soufflet, symbolisant ainsi une victoire française d’envergure.

Quels sont les enjeux associés à l’acquisition d’UMG ?

Thierry Blandinières : L’acquisition du groupe UMG s’avère parfaitement complémentaire à notre existant. Déjà solidement établi en Australie, aux États-Unis et au Canada, UMG nous offre l’opportunité de prendre pied dans des zones géographiques et sur des marchés que nous ne couvrions pas. Ce rapprochement nous permet de constituer un nouvel ensemble élargi, opérant dans une grande partie des territoires et adressant tous les segments du malt.

Nous envisageons une croissance d’au moins 30 % du chiffre d’affaires de ce nouvel ensemble d’ici cinq ans. L’enjeu consiste maintenant à créer une plateforme globale à même d’approvisionner les brasseurs, tant artisanaux qu’industriels, et les distillateurs du monde entier et ainsi à soutenir la croissance du marché mondial de la bière. En effet, malgré quelques ralentissements dus à des facteurs conjoncturels tels que l’inflation, ce marché connaît une dynamique extrêmement positive.

À quand remonte votre intérêt pour le secteur du malt ?

Thierry Blandinières : En 2021, InVivo avait franchi une nouvelle étape de son développement en rachetant le groupe agroalimentaire français Soufflet, positionné sur les filières de l’orge et du blé notamment. Ce rapprochement nous a permis de consolider notre rôle en tant que catalyseur de la transition agricole. Soufflet détenait une filiale (Malteries Soufflet, ndlr) spécialisée dans la fabrication du malt, dotée de 29 malteries pour une capacité annuelle de production de 2,4 Mt, ce qui représente 11 % du marché mondial. En faisant l’acquisition de UMG, de ses 12 usines pour une capacité de 1,3 Mt, nous augmentons notre capacité totale de 50 % et devenons leader mondial du malt.

Quel sens y a-t-il à produire du malt pour InVivo ?

Thierry Blandinières : Le malt est issu de la transformation de l’orge brassicole (orge destinée à la production de bière, ndlr). Une fois transformée, on obtient l’ingrédient clé commercialisé auprès des brasseurs pour être intégré dans leur processus de brassage et de production de bière. Nous approvisionnons ainsi à la fois de grands brasseurs iconiques, à l’instar d’Heineken ou de Carlsberg, mais aussi des brasseurs spécialisés dans la fabrication de bières artisanales, dites craft. La fabrication de cet ingrédient est bien sûr un moyen de valoriser la filière de l’amont à l’aval et de démontrer le savoir-faire français à l’échelle mondiale.

Quel est le potentiel de développement du marché mondial de la bière ?

Thierry Blandinières : Le potentiel est considérable. Ce marché est structurellement en pleine expansion. Rares sont les pays qui ne consomment pas de bière. Nos clients, dont beaucoup sont des acteurs majeurs à l’échelle internationale, recherchent des partenaires capables de les accompagner dans cette croissance mondiale du marché de la bière et dans la diversification des attentes des consommateurs, en termes de goût, de qualité, de traçabilité, de durabilité, etc.

Nous nous positionnons donc en tant qu’interlocuteur privilégié pour soutenir le développement de nos clients dans le monde entier en les aidant, notamment, à augmenter leur capacité de production de bière et à répondre aux cahiers des charges les plus exigeants. Le taux de croissance moyen se situe autour de 2 à 3 % par an, mais il existe une importante disparité en fonction des pays. L’Inde, par exemple, consomme de plus en plus de bière et affiche une croissance à deux chiffres.

Quelle est la tendance actuelle de ce marché ?

Thierry Blandinières : Nous observons une tendance à la montée en gamme, notamment au Brésil. À terme, de plus en plus de bières seront qualifiées « Pure Malt ». Par ailleurs, l’amélioration de la qualité des bières sans alcool, où l’ajout de malt est essentiel pour obtenir un goût prononcé, constitue un levier important pour l’avenir. Toutes ces évolutions et tendances de fond participent activement à augmenter la pression qui s’exerce sur le marché de la bière. De notre côté, nous devons être en capacité d’accompagner et de soutenir cette croissance à l’échelle mondiale.

Comment accompagnez-vous vos clients internationaux ?

Thierry Blandinières : Nous apportons notre expertise dans les plantations d’orge brassicole à travers le monde, que ce soit en Afrique, en Australie ou aux États-Unis. En pilotant la partie agricole en amont de la transformation du malt, nous mettons à disposition notre expertise dans ces régions et nous accompagnons nos partenaires sur l’ensemble de la supply-chain. Cette intégration et cette complémentarité de nos activités agricoles participent au renforcement de notre position en tant que groupe international leader dans le domaine des céréales.

Pouvez-vous citer un exemple d’accompagnement ?

Thierry Blandinières : Le groupe brassicole d’origine néerlandaise Heineken souhaitait ouvrir une brasserie en Éthiopie fondée sur un sourcing local. Nous avons su répondre à leur demande et les accompagner dans un contexte de marché en très forte tension. En investissant dans une malterie à proximité directe des cultures d’orge brassicole, nous contribuons aussi à la création d’emplois pour les agriculteurs éthiopiens, marque d’un engagement sociétal qui se traduit sur le terrain.

Cette malterie est par ailleurs la première au monde à être zéro émission de carbone, notamment grâce à l’utilisation d’énergie produite par des barrages hydro-électriques. Nous avons un autre projet en cours pour Heineken en Afrique du Sud, ainsi qu’en Australie et en Chine, deux pays dont les marchés présentent également un très fort potentiel.

Propos recueillis par Isabelle Jouanneau

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