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Covid-19 : le débarquement de Provence n’aura pas lieu

Entreprendre - Covid-19 : le débarquement de Provence n’aura pas lieu

Par Catherine Muller

Tribune. L’affrontement entre l’humanité et les légions de la Covid-19 n’aura pas lieu cette fin de semaine, ni la prochaine, sur les plages de la Côte d’Azur, ainsi en a décidé le Préfet des Alpes-Maritimes : la zone du littoral sera confinée les deux prochains week-ends pour freiner la circulation du virus. Cette mesure couvre une zone allant de Menton à Théoule-sur-Mer, en passant par Cannes et Nice, et ce n’est pas la première fois que les plages de la Côte d’Azur entrent dans l’Histoire.

Nom de code : Anvil Dragoon

En effet, le 15 août 1944, les troupes alliées débarquent en Méditerranée, d’abord entre Toulon et Cannes, puis le 28 à Nice. Cette opération militaire marqua un tournant dans la guerre, parce qu’en contraignant  Hitler à donner l’ordre à ses troupes de se replier, elle  permit une libération de la France plus rapide et moins coûteuse en vies humaines. Ainsi, qu’ils aient été des succès, comme ceux de France,  ou des échecs, comme le projet allemand d’envahir l’Angleterre à partir de Portsmouth, les débarquements ont joué un rôle décisif dans la résolution de ces conflits majeurs du XXe siècle que furent les deux guerres mondiales. Dans les deux cas, du débarquement du corps expéditionnaire US dans le port de Saint-Nazaire le 26 juin 1917, à  celui des 156 177 soldats américains, britanniques, canadiens et français sur les plages de Normandie le 6 juin 1944, la victoire définitive sera, après ça, très vite remportée sur l’ennemi.

Après Cannes et Nice, c’est au tour de Dunkerque de se voir confinée le week-end. Or Dunkerque fut aussi, au printemps 1940, le lieu d’une bataille célèbre : celle qui permit à l’armée britannique de se rapatrier chez elle. On pourrait presque croire que le coronavirus prend plaisir  à se balader sur les plages emblématiques de la Seconde Guerre Mondiale !

Freud s’en va-t-en  guerre

Les conséquences de la pandémie actuelle sur la population ne semblent pas très différentes de celles observées après 1918 ou 1945. Ce sont des problèmes économiques et des traumatismes psychologiques, que Sigmund Freud, lui aussi, connut et eut à assumer autant dans sa vie privée que dans son activité de médecin. En tant qu’Autrichien, il est dans le camp des vaincus, et la  Première Guerre Mondiale va le ruiner, beaucoup parce que  la fermeture des frontières le prive d’une grande partie de sa patientèle. Ses difficultés matérielles sont telles qu’il ira jusqu’à se faire payer en pommes de terre pour pouvoir nourrir sa famille ! Malgré tout ça, il s’efforce de pratiquer un « pessimisme joyeux » en y mettant du « witz », une forme d’humour  très typiquement yiddish ; ainsi, à Ernst Jones, son biographe, il écrit : « la Révolution aura lieu demain à 2h30 ; en cas de mauvais temps, elle se tiendra à l’intérieur ».

Le chercheur qu’il est ne peut s’empêcher de trouver cette période « passionnante », et de se mettre à examiner de près les nouvelles maladies mentales qui apparaissent, qu’il va appeler des « névroses de guerre » , et que nous connaissons maintenant sous le terme de « syndrome de stress post-traumatique ».En septembre 1918, il organise, à Budapest, un congrès qui leur est consacré ; il y dira ne pas vouloir « laisser passer l’occasion d’étudier minutieusement ces affections ». Ce risque, à l’évidence, n’existe pas  pour la crise sanitaire que nous traversons actuellement ; des dizaines d’ouvrages, écrits par des médecins, des anthropologues, des sociologues et des psychologues analysent, sous la loupe de leur microscope,  tous nos symptômes et tous nos comportements ! Freud eut, quant à lui, l’humanisme d’ajouter : «  Espérons que cette occasion ne reviendra pas de sitôt . »

Alors, si Freud, âgé, désargenté, souffrant déjà du cancer qui va l’emporter vingt ans plus tard, trouvait encore la force de se projeter dans un avenir prometteur et un monde en paix, pourquoi ne pourrions-nous pas, nous, le faire ? D’autant plus que Nice inaugure de nouvelles mesures et une nouvelle recette : un zeste de confinement et beaucoup, beaucoup de doses de vaccins ! Ce nouveau cocktail va-il-prendre ? On peut vouloir y croire,  après tout, le sens étymologique de « Nice » n’est-il pas : « celle par qui la victoire arrive » ?

Dr Catherine Muller
Membre du comité scientifique de SOS Addictions
Docteur en psychologie
Member of the World Council of Psychotherapy
Member of the American Psychological Association


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