200 boutiques ouvertes en 10 ans. On n’arrête plus Jott, le phénomène marseillais de doudounes, créé par la famille Gourdikian, et qui accélère de plus belle avec le fonds d’investissement franco-américain L Catterton. Avec 150 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022, Jott a déjà 120 boutiques dans le monde, dont 23 en Chine.
Les doudounes avec ou sans manches, avec ou sans capuches, ajustées ou droites, sont devenues des incontournables du marché du textile et de la mode.
Autrefois réservées aux sportifs, voire aux montagnards ou au temps de froid rigoureux, elles sont devenues des vêtements que l’on porte au quotidien sans vraiment se poser de questions. Il faut dire qu’elles ne sont plus simplement noires ou bleu marine ; bien au contraire, elles sont jaune, rouge, orange, saumon, toutes les couleurs de l’arc-en-ciel sont réunies pour convenir à tous les sexes et tous les âges.
Mais pas seulement, car l’entreprise a également développé des vêtements pour des températures différentes, avec 4 degrés de protection, du plus léger au plus chaud avec une bonne qualité de duvet.
TRANSGÉNÉRATIONNEL, INTEMPOREL ET COLORÉ
Ces trois qualificatifs sont emblématiques de la marque qui cherche à convenir à chacun. Cela passe notamment par la couleur, chaque saison, 12 nouvelles teintes viennent enrichir les 8 teintes permanentes de base. Ce sont Mathieu et Nicolas Gourdikian qui ont créé la marque de toutes pièces en 2010. Les idées simples étant les meilleures, le concept mis en place par ces jeunes professionnels du textile était la suivante : faire de la doudoune un vêtement urbain au quotidien, avec des couleurs gaies, facile à plier dans un tout petit pochon facile à glisser dans un sac à dos ou un gros sac à main. Du style et de la praticité, la recette d’un succès.
UN POSITIONNEMENT MÛREMENT ÉTUDIÉ
Dernier élément essentiel pour transformer l’essai, un prix acceptable par rapport à l’offre proposée. Les cofondateurs ont choisi de profiter d’un trou dans la concurrence. On dit souvent qu’il n’y a point de solution en dehors du premier prix et du luxe, les deux extrêmes des marchés servant d’aimants à la clientèle. Jott a pourtant réussi en se positionnant différemment.
Nettement plus cher que le premier prix afin de développer une véritable marque, mais bien en deçà du segment du luxe occupé par les grandes marques du luxe telles Moncler ou Canada Goose. Le prix fut donc fixé entre 130 et 180 euros pour les doudounes, puis au-delà, aux alentours des 350 euros pour les manteaux.
UN DÉVELOPPEMENT ÉCLAIR
Au départ, la distribution s’est faite en tant que grossiste, un métier maitrisé par la famille, puis via un nouveau concept de magasin. Les Gourdikian ont été à la racine de cette success-story qui les a menés à devenir l’une des marques françaises reconnues en matière de textile sur une niche bien maitrisée.
Face à cette réussite, il fallait cependant prendre une décision, notamment trouver un partenaire afin de passer à la vitesse supérieure, que ce soit en matière de vente en ligne, d’ouvertures de magasins, sans oublier la programmation d’une véritable attaque du marché hors de France. Ou faute de partenaire, un acheteur.
CHANGEMENT DE MODÈLE
C’est le fonds L Catterton qui est aujourd’hui propriétaire de la marque marseillaise depuis début 2021. Le fonds est déjà implanté sur ce secteur avec d’autres marques telles que Birkenstock ou Ba&sh. Il a nommé à la direction Didier Lalance qui mène à fond de train la transformation de l’entreprise. Le chiffre d’affaires a plus que doublé depuis la reprise pour
atteindre 150 millions d’euros et les projets se multiplient pour transformer cette réussite française en réussite internationale. Les 80 magasins d’il y a deux ans sont devenus 200 (dont 126 en France), le tout grâce à des investissements importants de la part du fonds, de l’ordre de 15 à 20 millions d’euros, ce qui met en lumière la confiance des investisseurs pour le futur.
Quant aux collaborateurs, ils sont une centaine dans le nouveau siège et nouvel entrepôt situé à Marseille. Il faut dire que le PDG sait de quoi il parle pour avoir déjà exercé ses talents chez Asics, Lacoste ou le groupe Kering. Si tout se déroule conformément aux plans, Jott va bénéficier d’une puissance marketing qui permettra d’en faire une marque de plus en plus reconnaissable.
Autre chantier d’importance, élargir l’offre afin de permettre un rééquilibrage du chiffre d’affaires pendant les douze mois de l’année, là où l’hiver reste prééminent à l’heure actuelle. Il faut s’y attendre, de nouveaux produits vont voir le jour et être présentés en magasin, à partir de molleton et de coton.
À QUAND LE MADE IN FRANCE ?
Les produits sont de fabrication chinoise, mais le fonds actuel a décidé de diversifier ses approvisionnements dans d’autres pays, tels que le Vietnam et le Portugal, annonçant 30% des nouvelles fabrications dans ces deux pays pour les nouvelles collections. On aimerait que Jott s’essaye à produire aussi dans l’hexagone, à l’instar de l’émérite fabricant de jeans 1083.
Anne Florin