Par Bertrand Laurioz, Président du Groupe ADLPerformance
Tribune. La crise du Covid-19 a lancé dans les entreprises, et dans la société, un vif débat sur le télétravail. Suite au confinement forcé, les lignes ont bougé, et ce sujet est maintenant en cours de discussion dans presque toutes les entreprises de « bureaux ».
Comme pour tout mouvement rapide, les prises de position de chacun face au télétravail massif ne sont pas stabilisées et peuvent parfois être surprenantes : les syndicats sont souvent réticents, sentant que cela nuit au collectif (donc à la solidarité et à la lutte), les salariés sont majoritairement pour (pour économiser du temps de transport et faciliter leur vie, à condition que les enfants, eux, ne télé-étudient pas et soient bien à l’école !), les patrons sont partagés, les plus motivés ayant probablement une arrière-pensée d’économie sur les loyers voire de réduction des effectifs à court ou moyen terme.
Il est probable qu’une solution stable finisse par émerger, qui deviendra une sorte de « norme » dans le monde post-covid. Il est trop tôt pour prendre une décision définitive.
Il est difficile de prévoir ce que sera ce modèle d’équilibre. Il contiendra certainement une plus forte part de télétravail, et c’est une bonne chose, pour les salariés et pour la planète ; mais pour le bien commun, il semble que les éléments suivants doivent également être pris en compte avant d’opter de façon définitive pour du télétravail massif.
Au final, la question du télétravail en période de confinement ne se pose évidemment pas. C’est la seule solution, et elle fonctionne bien dans la très grande majorité des cas. Mais c’est là une forme de télétravail totalement exceptionnelle et radicale qui ne peut pas vraiment servir de modèle pour notre vie sociale et économique future. Pour le monde d’après (que l’on peut espérer post-covid), les enjeux doivent être considérés de façon large et probablement avec prudence.
Le télétravail va devenir une des modalités conventionnelles du travail. Mais il doit être pensé de manière pragmatique et non dogmatique, en prenant en compte les impacts sur la société, les entreprises et sur les personnes. L’entreprise est une source majeure de lien social et de solidarité : il ne faudrait pas fragiliser ce lien dans notre société qui n’a pas besoin de fracturation supplémentaire.
Alors faut-il figer les choses dans le marbre dès-à-présent, alors même que la crise sanitaire et la crise économique ne sont pas achevées ? La meilleure méthode parait être celle du test and learn car le recul que nous avons à ce jour sur le télétravail massif est bien faible. Et avant de choisir un modèle pour demain, il serait utile d’expérimenter et de mesurer plus finement les impacts qualitatifs et quantitatifs. Alors prenons le temps de la réflexion, de l’expérimentation et de l’adaptation du travail au télétravail avant de fixer un modèle sans savoir où cela nous mène.