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La France doit-elle accepter une immigration sélective et contrôlée ?

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Avant la vague des immigrés aux frontières de l’Europe en 2015, la France, l’Allemagne et l’Angleterre accueillaient déjà, année après année, entre 300 000 et 400 000 immigrés légaux : la France surtout en provenance du Maghreb et de l’Afrique Noire, l’Allemagne de la Turquie et des pays de l’ex-Yougoslavie et l’Angleterre de la Pologne et de l’Inde et du Pakistan.

A noter que seulement 20 à 30% des immigrés arrivent en tant que véritables demandeurs d’asile, menacés dans leur pays de départ, les autres étant davantage attirés par les meilleures conditions économiques en Europe et dans le pays d’accueil choisi et espèrent, pour eux-mêmes ainsi que leurs enfants, un avenir meilleur.

 C’est surtout la guerre en Syrie qui a entraîné des arrivées massives de réfugiés aux portes de l’Europe. Là où l’Allemagne, avec la déclaration de la chancelière allemande , Angela Merkel, du « wir schaffen das » (« nous y arriverons ») a accueilli plus de 1 200 000 réfugiés, mais, par exemple, également la Suède (avec la proportion la plus élevée d’immigrés par rapport à sa propre population) ont certainement ouvert trop les frontières ou n’étaient pas suffisamment préparées pour un accueil en masse…Là où la Hongrie, la Pologne et également l’Autriche, ont refusé catégoriquement toute participation à un effort d’accueil pan-européen, demandé par Angela Merkel.

 Or une solution n’est possible qu’au niveau des 27 pays de l’Union: en commençant par la mise en place d’un nouveau droit d’asile commun, limité aux ressortissants en danger, voire poursuivis dans des pays ou zones en état de guerre ; la révision des accords de Dublin, portant sur les personnes s’étant vu refuser le droit d’asile dans un premier pays des 27 ; l ‘entraide dans la reconduction aux frontières des immigrants illégaux ; enfin un financement partagé et solidaire qui soulage les pays de premier accueil du Sud de l’Europe, entre la Grèce (économiquement toujours fragile), l’Italie ( momentanément hostile à la récupération d’immigrés) et la Turquie, qui héberge actuellement sur son sol environ 4 000 000 réfugiés suite à un accord entre Angela Merkel, au nom de l’Europe, et le Président Erdogan, qui propose de les fixer définitivement dans une zone frontalière et démilitarisée de 40km de large et de 300km de long.

 Quant à la France, elle s’est limitée jusqu’à présent à des engagements à minima.

 En effet, son engagement réel, confirmé par Manuel Valls à la fin de son mandat et par le candidat à la Présidence, François Fillon, était d’accueillir    « 30 000 réfugiés et pas un de plus ». D’où la critique, par l’Italie, exposée à des arrivages clandestins quotidiens en nombre et aux critiques de les « rejeter à la mer », de l’hypocrisie de la France. Et le regret du voisin allemand d’avoir été abandonné au sein du « couple » franco-allemand.

 Or, même si, avant la crise ukrainienne et son exode massif, la vague d’immigration avait  perdu de sa force et que les chiffres étaient revenus au niveau d’avant, en partie à cause d’un contrôle plus rigoureux aux frontières extérieures de l’Union (où une nouvelle réglementation européenne permet désormais de venir secourir un pays, qui s’avérerait incapable de maîtriser les arrivages de migrants à sa frontière), en partie à cause d’une position plus restrictive de l’Allemagne et franchement hostile de l’Italie, de la Hongrie, de la Pologne et de l’Autriche. Cette situation risque d’être seulement passagère.

 Tant que l’Europe restera un îlot de paix et de prospérité avec une population en stagnation, voire en baisse relative, et plus le monde connaîtra de conflits, de catastrophes naturelles et de croissance de sa population, plus elle subira inexorablement la pression des flux migratoires, surtout en provenance de l’Afrique. Et cela, comme c’est la tendance, même si l’aide humanitaire de l’Europe augmentera de façon considérable et qu’elle sera orientée essentiellement vers les pays qui, par convention, accepteront en contrepartie un contrôle des candidats à l’émigration dans le pays d’origine avant le départ ainsi que le retour des immigrés expulsés.

 Il vaut donc mieux se préparer à une immigration régulière et continue et la contrôler… idéalement au niveau européen, mais également au niveau français. Pour l’Europe, même si les effectifs de Frontex, en charge de nos frontières extérieures, ont fait l’objet d’un vote des 27 en faveur d’un renforcement important, et que l’ accord conclu par Angela Merkel « au nom de l’Europe » avec la Turquie (mais suspendu à des contreparties en termes d’aides financières et de facilités de voyage pour les ressortissants turcs, jusqu’ici non intégralement concédées, donc fragile) ont permis d’éviter, au moins pour l’instant, une nouvelle vague de réfugiés, nous sommes loin d’un accord entre les états membres, même sur la partie, à priori la plus simple, d’une nouvelle loi commune du droit d’asile.

 Au niveau français, les déclarations de l’ancien Premier Ministre, Edouard Philippe, sur la future politique d’immigration de la France vont dans la bonne direction : « Reprendre le contrôle de notre politique migratoire » au travers de quotas, de professionnels qualifiés ou d’employés susceptibles de travailler dans des branches d’activité « sous tension », une période d’attente de 3 mois avant l’accès à la CMU, une lutte antifraude renforcée…Mais également la construction de nouveaux centres d’accueil pour 20 000 places de réfugiés, l’accueil facilité et élargi d’étudiants étrangers et le regroupement familial préservé.

 Le point faible de la politique migratoire reste la reconduction aux frontières des migrants illégaux ou dont la demande de séjour a été refusée. Les services de l’Etat sont confrontés à environ 100 000 demandes d’asile par an. Un tiers relève de la procédure de Dublin, qui désigne un autre pays européen, celui de la première entrée, comme responsable de la procédure. Mais seulement 3000 demandeurs sont effectivement retransférés à ce voisin européen.

 Puis une expulsion vers le pays d’origine nécessite un préalable : l’accord consulaire de pays du clandestin de le reprendre. Or, surtout l’Algérie et le Maroc sont très réticents à la délivrance de ce type d’autorisation. Le résultat est que le nombre de reconductions à la frontière est en forte baisse – d’environ 30 000 en 2019, elles sont tombes à 15 000 en 2020 et 13 000 en 2021- et constitue un des échecs de la politique d’immigration d’Emmanuel Macron.

 Dans ce débat, la proportion des musulmans et des personnes issues de l’immigration maghrébine et africaine au sein de la proportion locale totale est certainement le sujet le plus controversé. Représentant actuellement un taux de 6% à 7% de la population, voire 8% selon le Power Research Center américain, il connaît des records locaux très importants et dépasse les 40% en Seine Saint Denis, les 35% en Val d’Oise, les 25% en Val de Marne et les 15% en Bouches du Rhône. Dans tous ces départements, l’équilibre démographique au sein des jeunes générations s’en trouve considérablement modifié et son évolution donne lieu à des spéculations concernant « le grand remplacement » et l’avenir de notre identité française.[1]

 En contrepartie d’une ouverture plus forte et inévitable de la France aux migrants, je rajouterais volontiers deux autres exigences : semblable au service national universel civique pour les jeunes, la participation obligatoire à un « service d’accueil et d’intégration », comprenant, en plus de cours de langue française et d’histoire, une éducation civique permettant d’affirmer les valeurs de la République et de se familiariser avec les grands enjeux sociaux et sociétaires. Puis au minimum de la part de chaque arrivant, un engagement volontaire, écrit et solennel, de respecter l’identité française et nos us et coutumes ainsi que l’obligation de s’y conformer. Et surtout des renvois au pays d’origine nettement plus fréquents et systématiques, donc avec moins de recours possibles et une obligation de reprise, contrepartie des visas accordés aux ressortissants des pays d’origine…et définitivement pour tout condamné à une peine de prison ferme devant un tribunal français.

 La guerre en Ukraine, le déplacement de plus de 5 millions de civils et le déferlement d’une vague, à date, de presque 3 millions de réfugiés, risque de modifier au moins temporairement l’attitude des Français à ce nouveau type d’immigration. Comme le montrent les initiatives spontanées de familles partout en France pour l’accueil des Ukrainiens, les mesures en matière de scolarisation des enfants, etc. Surtout que dans ce scenario, le danger pour les demandeurs d’asile ne permet aucun doute, qu’il s’agit, dans la majorité, d’européens, de chrétiens et peut- être, par rapport à une Russie très totalitaire, des défenseurs géographiquement les plus avancés des valeurs démocratiques.


[1]Chiffres avancés dans Jérôme Fourquet, « l’Archipel français », Seuil 2019, p.139

Axel Rückert

Extraits du livre Faire réussir la France que j’aime, propositions du plus Français des Allemands, disponible sur www.fairereussirlafrancequejaime.com ou sur Amazon


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