Cette startup bretonne qui transforme l’eau de mer en électricité

La jeune pousse rennaise Sweetch Energy a visiblement visé juste. Sa solution brevetée pour produire de l’électricité à partir de l’écart de salinité entre eau douce des rivières et eau de mer s’avère très prometteuse. Un premier site pilote est déjà programmé près de Marseille, pour assurer les besoins totaux de la ville. Une vraie révolution.

La solution 100% propre de Sweetch Energy , agréée par le CNRS, consiste en une production d’électricité à échelle industrielle grâce à une formule magique : eau + sel + INOD. On parle ici d’énergie osmotique, déjà bien connue, basée sur la différence de salinité que l’on retrouve entre eau douce de rivière et eau de mer. Un processus naturel, présent à l’état naturel un peu partout sur la planète, dans les deltas et estuaires, une énergie renouvelable et propre par essence.

Le seul souci était que si la conversion en électricité était assez simple à mettre en place, la rentabilité n’était jusque-là pas au rendez-vous, le coût des membranes nécessaires au processus étant très élevé. Les travaux de Lydéric Boquet au CNRS ont ouvert une nouvelle voie, le travail de l’équipe de Sweetch Energy a été de travailler longuement pour parvenir à industrialiser ce processus afin de passer en dessous des 50 euros le MWh.

UNE PRODUCTION RENTABLE

Sweetch Energy n’a pas pour objectif de baser son succès sur le montant de ses levées de fonds. Sa priorité est de bâtir un modèle rentable, permettant ainsi d’enclencher un mouvement vertueux en matière d’énergie propre. Inod, le procédé breveté par l’entreprise permet de convertir en continu l’eau salée en électricité, garantissant l’efficacité, mais surtout, la startup annonce que cela peut se faire à prix compétitif, permettant véritablement d’envisager les unités de fabrication du futur.

L’INOD est le cœur du dispositif, ce procédé technologique mis en place par l’équipe de la startup consiste en une nouvelle génération de membranes à l’échelle nanométrique créée à partir de matériaux biosourcés, le tout sans impact environnemental.

DEMAIN

Le déploiement de la solution de Sweetch Energy peut être extrêmement rapide, encore un élément qui pousse à l’optimisme. L’équipe dirigeante parle même d’un déploiement dès l’an prochain. Sans surprise, on retrouve parmi les fondateurs de la startup des profils d’ingénieurs et de chercheurs (50% de docteurs) qui ont au départ travaillé avec persévérance dans leur laboratoire dans l’objectif de trouver une solution pour lutter contre le changement climatique, et ce rapidement.

Cette énergie renouvelable pourrait fournir jusqu’à 15% des besoins mondiaux en électricité, soit 4 gigatonnes de CO2 évitées par an. Sur la France, la filière osmotique devrait pouvoir répondre à 15% des besoins en consommation électrique, un point essentiel en cette période d’inflation du coût des énergies.

CNR (la Compagnie Nationale du Rhône), EDF et Sweetch Energy vont contribuer à ce grand mouvement en lançant en 2023 la première usine pilote de production à grande échelle dans le delta du Rhône, qui sera suivi par d’autres d’une puissance d’environ 500 MW, soit un demi-générateur nucléaire.

BONNES NOUVELLES

Pour contrer le pessimisme ambiant, il peut être intéressant de consulter l’un des derniers rapports de l’Agence Internationale de l’Énergie qui affirme que les énergies renouvelables deviendront la première source d’électricité mondiale en… 2025. L’éolien, le photovoltaïque et bientôt l’hydrogène vert sont déjà dans l’esprit des citoyens. À cela s’ajoute un atout majeur : l’utilisation de la nouvelle technologie innovante et unique à ce jour, mise en lumière suite aux travaux du CNRS et de Sweetch Energy.

LES BRETONS AUX COMMANDES

L’équipe de fondateurs est bretonne, le siège installé à Saint-Grégoire, près de Rennes, abrite une quarantaine de collaborateurs. Une future usine doit également voir le jour, actuellement en discussion avec la région.

Nicolas Heuzé, Pascal Le Mélinaire, Bruno Mottet et Lydéric Bocquet sont les quatre piliers de Sweetch Energy. Leurs profils sont complémentaires. Nicolas Heuzé, PDG de la société depuis 2020, est un professionnel du financement de startups après avoir travaillé chez Galileo Partners, Bionersis ou Medincell. Pascal Le Mélinaire, président du conseil d’administration, a plus de trente ans d’expérience dans le domaine en passant entre autres par Paradigm Geophysical, Bionersis avant d’intégrer Sweetch Energy il y a six ans. Bruno Mottet, directeur scientifique, a aussi une trentaine d’années d’expérience dans l’énergie et la création d’entreprise. Lydéric Bocquet, membre de l’Académie des Sciences, est reconnu internationalement et Sweetch Energy se base sur ses travaux et découvertes en matière d’énergie osmotique.

Au-delà de ce premier pas vers une filière d’énergie osmotique, Sweetch Energy travaille également à une production utilisant la source des chaleurs perdues par les industries ou les centres de serveurs informatiques, une énergie très abondante. Les avancées de la startup française semblent pouvoir entrevoir cette solution jusqu’alors impossible.

LA FRANCE SERA-T-ELLE À LA HAUTEUR DU PROJET ?

Chacun des fondateurs en est conscient. L’objectif est de créer un nouveau champion mondial de l’énergie, encore faut-il que les structures de financement françaises et européennes soient à la hauteur et dans les temps. Il n’est pas trop tard pour nos fleurons tricolores de l’énergie (Engie, Véolia, Suez ou Totalénergies) de se pencher sur le prometteur berceau de la nouvelle pépite bretonne de l’électricité osmotique.

Anne Florin

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