Par Grégoire Leclercq, directeur général délégué du groupe EBP
Tribune. Les professionnels du bâtiment affichent leur confiance pour terminer l’année 2021 convenablement. Mais la hausse des prix des matières premières, les contraintes du pass sanitaire et le manque de personnel sont source de tensions. Le BTP cherche à retrouver son équilibre d’avant-crise.
Les chefs d’entreprise du bâtiment sont confiants. Ils devraient terminer l’année 2021 dans des conditions satisfaisantes. C’est en tout cas ce qu’affirme l’analyse publiée par l’INSEE ce 26 août dernier, alors que les trois derniers mois présentaient des résultats en léger repli.
Ce moral au beau fixe des professionnels du BTP provient évidemment des carnets de commande. Ils affichent et assurent une activité à venir équivalente à neuf mois de travail. Une durée qui demeure nettement au-dessus de la moyenne habituelle, proche des 6 mois. Pourquoi ? Les mises en chantier ont bondi entre février et avril 2021, presque autant pour les logements neufs (+ 51,6 %), que pour les locaux professionnels (+ 24,7 %).
Aussi, les entreprises du secteur prévoient d’ajuster leurs effectifs pour les trois prochains mois. Mais un quart d’entre elles s’interrogent sur leur capacité à livrer les chantiers dans les délais. Si 55 000 emplois ont été créés depuis le début de la pandémie, ce volume n’est aujourd’hui pas suffisant pour combler les besoins des acteurs du BTP. A cela s’ajoute le pass sanitaire entré en vigueur le 30 août, désormais quasi-obligatoire pour les salariés du secteur face à une France qui avance inégalement dans le parcours vaccinal.
Fluctuation des matières premières
A la désorganisation des chantiers s’ajoute aussi une perte de rentabilité. Ces facteurs conjoncturels affectent la trésorerie au point que certaines TPE-PME envisagent la cessation d’activité. En effet, difficile de faire un devis et de dégager des marges convenables lorsque les prix des matières premières s’envolent et que la pénurie des matériaux n’arrange rien aux affaires. En cause, un marché international capricieux aux effets déjà connus en 2003 et 2009, mais aussi un ralentissement de la production ou encore l’effet d’aubaine des industriels.
Quel que soit le corps d’état du BTP, l’heure est donc à la mobilisation pour éviter le pire. Pour les entreprises qui en ont encore la possibilité, il faut envisager d’acheter les matériaux disponibles et les stocker afin de juguler la variation des prix. Cela implique d’avoir une bonne relation avec ses fournisseurs, aussi bien pour sécuriser l’approvisionnement que pour négocier les commandes.
Plan Marshall
Ensuite, les chefs d’entreprises du BTP doivent ajuster leur politique tarifaire de sorte à retrouver de l’oxygène financier. C’est-à-dire, indexer leurs devis sur les indices des matières premières. De plus, il conviendra d’adapter les plannings de production en fonction de l’approvisionnement pour gagner en agilité. Ajoutons que des solutions de gestion sont indispensables aussi bien pour suivre les chantiers que pour établir les plans de trésorerie.
Enfin, l’Etat doit être à la relance du secteur, car la pierre est le placement préféré des Français. Au-delà des aides gouvernementales liées à l’épidémie, il serait bon de réarmer les dispositifs fiscaux d’investissement dans le logement, mais aussi de donner les moyens aux Français de préparer la transition énergétique de leur habitat. C’est donc un vrai plan Marshall dont les professionnels du BTP ont besoin, en partie financé par l’épargne placée durant les confinements successifs. Mais surtout de remettre la formation et la valorisation des métiers du Bâtiment à l’ordre du jour, pour rendre ce secteur à nouveau attractif et lui donner les moyens de la reprise attendue. Quoi qu’il en coûte !