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Eric Bompard et ses pulls en cachemire s’attaquent à l’Europe

Fil après fil, sans brûler les étapes, l’entrepreneur a conquis le cœur des Français. Rejoint par sa fille, il s’attaque aujourd'hui  à l'Europe et lorgne même sur l’Amérique du Nord.  

Entreprendre - Eric Bompard et ses pulls en cachemire s’attaquent à l’Europe

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Fil après fil, sans brûler les étapes, l’entrepreneur a conquis le cœur des Français. Rejoint par sa fille, il s’attaque aujourd’hui  à l’Europe et lorgne même sur l’Amérique du Nord.
 

C’est l’histoire d’un pionnier ! Armé d’une idée et d’une ténacité à toute épreuve, Éric Bompard, 66 ans, est devenu en 30 ans le roi du cachemire. L’entreprise éponyme vend plus de 500.000 pulls par an dans ses 54 boutiques et corners, compte 300 collaborateurs en pleine saison et affiche un CA de 85 M€. Pas mal pour un ancien cadre informatique qui a créé sa SARL au début des années 80, avec 100.000 francs en poche.

 

Une idée folle ?

«En 1985, il fallait prendre un train des années 30 pour rejoindre la Mongolie-Intérieure. Ce train du froid en janvier m’a offert cette vision unique de la région portant les troupeaux de chèvres qui allaient devenir la vie de notre entreprise», se souvient celui qui refera souvent ce périple pour rejoindre les hauts plateaux du désert de Gobi où sont élevées les capra arbas, chèvres qui produisent une laine rare, fine et chaleureuse.

À l’époque, le cachemire est encore l’apanage de l’Écosse, dont les fabricants font venir les ballots de fibre de Mongolie. Mais le jeune cadre dynamique, séduit par cette matière, a une idée pour tirer son épingle du jeu : faire fabriquer ses pulls sur place, pour limiter les intermédiaires et bénéficier de faibles coûts de production.

Il se rend donc dans cette province de Chine et passe 1 mois à rencontrer les éleveurs, découvrir les animaux dans leur environnement, apprendre comment ils sont gérés…

«Mon projet m’a terrifié mais je croyais en cette aventure et rien ne m’aurait fait reculer. Dans les années 80, il était très difficile d’être introduit. Il fallait être invité pour franchir le seuil de cet univers très secret. C’est ainsi que j’ai croisé sur la route des steppes l’homme qui allait m’accorder sa confiance», raconte Éric Bompard, encore aujourd’hui fidèle à son partenariat avec Wang Linxiang, un entrepreneur chinois, patron d’une usine locale.

«Erdos n’était alors qu’une petite usine de préparation de la laine, perdue dans le désert de Gobi. Aujourd’hui, c’est le leader mondial avec une production de 25.000 tonnes de cachemires par an». L’homme se heurte également à la législation européenne sur les produits d’importation soumis aux quotas – une contrainte qui prend fin en 2000 avec l’ouverture des marchés – mais tient bon le cap et rentre en France avec ses pulls en cachemire.

De Paris à Pékin

Le nom de l’enseigne ? Ce sera Éric Bompard, tout simplement. «Il m’est apparu pertinent de lui donner mon nom, par souci d’authenticité et pour donner confiance à l’acheteur. Puis, nous avons avancé par étape pour monter un circuit de distribution solide, tout en développant la vente par correspondance», raconte le fondateur, qui ouvre en 1984 la première boutique dans la très chic rue Montrosier à Neuilly-sur-Seine, avec trois modèles déclinés en trois tailles et trois coloris.

Pour attirer la clientèle, il diffuse une simple annonce dans le Figaro : «Le cachemire, c’est au 28, rue Montrosier à Neuilly à partir de 620 francs». Un prix extrêmement concurrentiel face aux pulls écossais ! Le succès est au rendez-vous et une deuxième boutique est créée rue de Varennes à Paris, puis d’autres suivent en France et à l’étranger (Düsseldorf, Vienne, Bruxelles, Genève…).

En tout, plus d’une cinquantaine d’adresses et quelques corners dans les grands magasins. La maison se paie même le luxe d’ouvrir un flagship en 2007 sur l’avenue des Champs-Élysées.

«Nous ouvrons en moyenne une à deux boutiques par an. C’est peu mais nous avons fait le choix de poser les assises structurelles et financières localement avant de conquérir un territoire». En parallèle, il signe une joint-venture avec Erdos pour distribuer sa marque en Asie. Trois magasins sont ouverts en Chine et un à Hong Kong. «Notre objectif est désormais de nous implanter dans les capitales européennes où la vente à distance fonctionne. Puis, nous nous tournerons vers l’Amérique du Nord, les États-Unis et le Canada», confie le dirigeant.

Toujours une maille d’avance

Dès le début de l’aventure, Éric Bompard mise sur la qualité, choisissant les fils les plus longs et les plus fins, qui sont aussi les plus doux. Il développe plus de 400 nuances de coloris pour séduire une clientèle toujours en quête de nouveauté et donne carte blanche à son studio de création.

Forcément, le cachemire est un produit saisonnier, qui se vend essentiellement entre septembre et février. «Il fallait donc développer de nouveaux produits, comme une collection de cachemires ultra-fins pour la mi-saison, ou des accessoires : gants, écharpes, bonnets, étoles, plaids, carrés, foulards…», explique l’entrepreneur.

Chaque saison, Bompard présente ainsi une collection de 150 pièces pour femme, homme et enfant. Des classiques pour la vie quotidienne mais aussi des pièces de style comme celles de la ligne LABO, une collection exceptionnelle de pièces numérotées (des pulls entre 650 et 900 € pièce) avec des points très élaborés ou exclusifs, comme les tricots «architecturaux» en 3D.

Très attaché au caractère familial et indépendant de sa PME, Éric Bompard travaille depuis 10 ans avec sa fille Lorraine de Gournay, 38 ans, directrice générale. Titulaire d’une maîtrise d’économie à Dauphine, d’un DEA à Sciences Po et d’un master à HEC, elle a rejoint la maison en 2004.

Chargée de dessiner l’avenir de Bompard, elle lance notamment le site de vente en ligne, devenu en 10 ans la première boutique du réseau en termes de CA. Aujourd’hui, le tandem père/fille travaille sur le développement international mais aussi le renforcement des équipes en place.

«Nos projets sont essentiellement humains. Avec le succès de la boutique en ligne, nous devons recruter dans les métiers de la gestion des stocks, de l’informatique, du développement Web, de la logistique…», assure le patriarche. Des emplois français grâce à des chèvres chinoises, on n’avait jamais vu ça !


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